Les plaies d’Égypte

 

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

 

F. VIGOUROUX

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les prodiges que Dieu opéra pour délivrer Israël de la servitude d’Égypte, sont célèbres sous le nom des dix plaies. Ils méritent d’être étudiés, à cause de leur importance et des difficultés particulières auxquelles ils donnent lieu.

Depuis longtemps, les enfants de Jacob gémissaient sous le joug, lorsque Dieu, touché de leurs prières, résolut de les affranchir, par la main de Moïse, son serviteur. Celui qui occupait alors le trône des Pharaons était, selon l’opinion commune, Menephtah, fils de Ramsès II ou Sésostris. Menephtah est un des monarques les plus obstinés dont l’histoire fasse mention : il ne céda, comme nous le verrons plus loin, qu’après avoir été frappé dans la personne de son propre fils.

Avant d’entrer dans l’étude détaillée des dix plaies d’Égypte, il est nécessaire de faire quelques observations générales 1.

Toutes et chacune des dix plaies sont des miracles produits par une intervention surnaturelle de Dieu. Quelle a été la nature de ces miracles ? en quoi ont-ils précisément consisté ? Ce sont des questions qu’on ne s’est posées que dans ces derniers temps, et sur lesquelles nous trouvons à peine quelques mots, en passant, dans les Pères et les Docteurs. Aujourd’hui l’on ne peut se dispenser d’y répondre.

Il y a, pour le commentateur catholique, deux manières d’exposer l’histoire des prodiges accomplis en Égypte par Moïse, pour délivrer son peuple. La première consiste à reproduire simplement le récit biblique, sans rechercher quel a été le caractère des faits qu’il rapporte. C’est celle qui a été suivie par les auteurs anciens, qui, ne connaissant pas l’Égypte, se bornaient, faute de renseignements, ou à résumer ou à développer la narration de l’Exode, sans autre but que d’apprendre l’histoire sainte à leurs lecteurs, s’ils étaient historiens ; que d’édifier leurs auditeurs par quelques leçons morales qu’ils en tiraient, s’ils étaient prédicateurs.

La seconde manière consiste à rechercher quelle a été la nature des dix plaies d’Égypte, et à examiner les rapports qui existent entre elles et les fléaux propres à la vallée du Nil. Ce nouveau sujet d’étude est imposé à l’apologiste contemporain par les nécessités du présent. Autrefois les incrédules niaient quelques-unes des plaies comme incroyables ou impossibles ; aujourd’hui les rationalistes les admettent, en les réduisant aux proportions de faits naturels, en se contentant de rejeter comme des « exagérations poétiques » tout ce qu’ils ne peuvent expliquer naturellement. C’est un membre de l’expédition scientifique d’Égypte, sous le général Bonaparte, Du Bois Aymé, qui emploie ces expressions.

Ce revirement d’opinion, parmi les ennemis de nos livres saints, a été amené par l’étude des lieux. Il a été impossible de nier, sur place, le caractère historique du récit de Moïse : tous les efforts de la libre pensée doivent se borner désormais à en éluder les conséquences.

Nous avons donc deux choses à faire dans l’étude des plaies d’Égypte : montrer d’abord, contre les rationalistes, qu’elles sont surnaturelles ; établir ensuite, par l’examen même des fléaux racontés par Moïse, en nous éclairant des découvertes modernes, combien le récit de l’auteur inspiré est digne de foi.

Nous ne nierons pas que Dieu, pour forcer Menephtah à délivrer Israël, ne se soit servi de fléaux déjà connus des Égyptiens. Nous reconnaissons que la plupart d’entre eux sont naturels en eux-mêmes ; mais nous ajoutons qu’ils sont, tous, miraculeux dans les circonstances qui les accompagnent. Ces plaies ne sont pas sans précédents ou sans analogues dans la vallée du Nil : on n’en a jamais douté pour la grêle, pour l’orage, pour la peste ; on l’avait ignoré jusqu’à ces derniers temps pour la neuvième plaie, celle des ténèbres, et pour la première, celle du changement du Nil en sang, si l’on y voit le phénomène du Nil rouge, dont nous parlerons bientôt ; mais il est impossible d’en rien conclure contre l’intervention surnaturelle de la Providence dans la délivrance de son peuple.

Maintenant que la vallée du Nil nous est mieux connue, nous devons étendre à quelques plaies de plus ce qu’on appliquait auparavant à un moindre nombre, voilà tout. Cette conduite de Dieu, se servant de la nature même pour arriver à ses fins et la pliant au miracle, est conforme aux voies ordinaires de sa providence dans l’ordre surnaturel : elle ne saurait donc nous surprendre. Le caractère, en effet de la plupart des miracles de l’Ancien et du Nouveau Testament, de la plupart de ceux qu’a opérés Notre-Seigneur comme de ceux qu’ont opérés ses apôtres et ses saints, n’a pas consisté dans la production des choses inouïes, mais dans la nature des moyens employés pour produire les effets voulus, moyens qui étaient sans proportion avec la fin, comme un peu de boue guérissant un aveugle-né ou une parole purifiant de la lèpre. Il y a sans doute des miracles où tout est extraordinaire, comme, dans l’Évangile, la résurrection de Lazare ; comme, dans l’Exode, le passage de la mer Rouge ; mais il n’en est pas moins vrai que le miracle consiste ordinairement à produire par un moyen surnaturel ce qui a lieu d’autres fois par des moyens naturels.

Le caractère miraculeux de la plupart des plaies d’Égypte ne consiste donc pas dans les fléaux eux-mêmes, mais dans la manière dont ils se sont produits : « Sans doute ces plaies, dit M. l’abbé Glaire, sont des fléaux naturels ; et, ce qui plus est, ces fléaux désolent plus particulièrement l’Égypte. En frappant les Égyptiens de ces calamités connues et par là même redoutées, Moïse agissait bien plus efficacement que s’il avait employé quelque phénomène inconnu, dont aucun Égyptien n’aurait pu ni prévoir ni calculer le danger. C’est donc par des maux pour ainsi dire indigènes qu’il importait de frapper Pharaon. D’ailleurs, Dieu ayant créé et gouvernant tout ce qui est, devait aussi avoir en sa puissance tous les fléaux qui désolent le genre humain, et dont il peut surtout épouvanter les impies. Ainsi ce n’est pas Moïse qui crée ici ces fléaux : ils étaient, ainsi que nous venons de le dire, connus de tout temps des Égyptiens ; mais il les évoque comme des êtres malfaisants et qui obéissent aussitôt à son ordre, comme ils obéiraient à la voix de Dieu même 2. »

Il n’en subsiste pas moins d’ailleurs une différence essentielle entre les plaies dont nous parle l’Exode et celles dont l’Égypte a souffert en d’autres temps. Ce qui distingue les premières des secondes, en leur donnant un caractère miraculeux, évident et incontestable, c’est qu’elles arrivent à point nommé, comme sanction de la parole de Dieu, dans des circonstances annoncées à l’avance, précises, qui révèlent manifestement une intervention surnaturelle : elles se produisent par l’ordre de Moïse, au moment qu’il a prédit, de la manière qu’il a déclarée ; elles cessent quand il l’ordonne, et ; dans plusieurs cas, au moment qui lui a été fixé par le Pharaon ; le pays de Gessen en est toujours exempt ; les Égyptiens n’en contestent jamais le caractère extraordinaire ; ils en sont au contraire consternés, et acceptent ces signes comme une preuve de la mission divine de Moïse 3.

De tout ce que nous venons de dire, nous avons donc le droit de conclure que les plaies d’Égypte, quelque analogie qu’elles puissent avoir avec un certain nombre de fléaux qui affligent ce pays, sont de vrais miracles. Nous avons le droit de conclure aussi que les rapports qu’elles ont avec l’état physique de la vallée du Nil sont une preuve de la véracité du récit de Moïse. « Ces rapports, dit avec raison M. l’abbé Glaire, montrent clairement, contre les mythologues, que ces terribles calamités ne sont point des fictions imaginées par un écrivain postérieur 4. »

Cette double conclusion ressortira plus clairement encore de l’étude détaillée des dix plaies d’Égypte, que nous allons maintenant commencer.

La première plaie fut le changement de l’eau en sang. Quelle fut la nature de cette plaie ? Le Nil offre tous les ans un phénomène singulier, qui est ainsi décrit par M. Osburn : « Lorsque le fleuve commence à grossir, les eaux perdent le peu de limpidité et de fraîcheur qui en faisaient, hier encore, une boisson délicieuse. Elles prennent la teinte verte, gluante et terne de l’eau saumâtre entre les tropiques, sans que filtre au monde ait réussi jusqu’à ce jour à les séparer de la substance nauséabonde et malsaine qui cause ce changement. Le phénomène du Nil vert provient, à ce qu’on dit, de vastes nappes d’eau stagnante que le débordement annuel laisse sur les larges plaines sablonneuses du Darfour, au sud de la Nubie. Il est heureux que ce phénomène dure rarement plus de trois ou quatre jours... Dès lors la rivière augmente rapidement de volume et devient trouble par degrés. Il s’écoule pourtant dix ou douze jours avant l’apparition du dernier et du plus extraordinaire phénomène que présente le Nil. J’essayerai de décrire les premières impressions qu’il me fit éprouver.

« C’était à la fin d’une nuit longue et accablante, à mon juger du moins : au moment où je me levai du sopha sur lequel j’avais tenté vainement de dormir, à bord de notre bateau, que le calme avait surpris au large de Beni-Soüef, ville de la Haute-Égypte, le soleil montrait tout juste le bord supérieur de son disque au-dessus de la chaîne arabique. Je fus surpris de voir qu’à l’instant où ses rayons vinrent frapper l’eau, un reflet d’un rouge profond se produisit sur-le-champ. L’intensité de la teinte ne cessa pas d’augmenter avec l’intensité de la lumière ; avant même que le disque se fût dégagé complètement des collines, le Nil offrait l’aspect d’une rivière de sang. Soupçonnant quelque illusion, je me levai à la hâte, et me penchant par-dessus le bordage ; ce que je vis me confirma dans ma première impression. La masse entière des eaux était opaque, d’un rouge sombre et plus semblable à du sang qu’à toute autre matière avec laquelle j’aurais pu la comparer 5. En même temps, je m’aperçus que la rivière avait haussé de plusieurs pouces pendant la nuit, et les Arabes vinrent m’expliquer que c’était là le Nil rouge.

« La rougeur et l’opacité de l’eau sont soumises à de constantes variations, tant qu’elle reste dans cette condition extraordinaire. À de certains jours, quand la crue n’a pas dépassé un pouce ou deux, les eaux redeviennent à demi transparentes, sans perdre toutefois cette teinte d’un rouge sombre dont j’ai parlé. Il n’y a point là de mélange nuisible, comme au temps du Nil vert ; l’eau n’est jamais plus saine, plus délicieuse, plus rafraîchissante que pendant l’inondation. Il y a des jours où la crue est plus rapide, et par suite où la quantité du limon charrié dépasse, dans la Haute-Égypte, la quantité entraînée par toute autre rivière à moi connue ; même, en plus d’une occasion, j’ai pu m’apercevoir que cette masse opposait un obstacle sensible à la rapidité du courant. Un verre d’eau que je pris alors et que je laissai reposer pour un peu de temps, fournit les résultats suivants : la partie supérieure du liquide resta parfaitement opaque et couleur de sang, tandis qu’un précipité de boue noire remplissait environ le quart du verre. Une portion considérable de ce limon est déposée avant que la crue atteigne la Moyenne et la Basse-Égypte, où je n’ai jamais vu l’eau du Nil en cet état 6. »

L’inondation du Nil commence ordinairement du 15 au 20 juillet. Elle atteint en octobre son point culminant. De janvier en avril, les eaux baissent de plus en plus, de sorte qu’en mai, elles ne sont que le vingtième de ce qu’elles étaient en octobre.

La cause de la coloration du fleuve au commencement de la crue avait été jusqu’ici complètement inconnue. Les Arabes racontent que, la nuit qui précède la croissance du fleuve, il tombe en amont une rosée merveilleuse qu’ils appellent nokta, « la goutte » 7. Elle a la vertu de purifier l’air, de faire fermenter les eaux et de produire le phénomène de l’eau rouge, ma achmar 8. Quelques savants attribuent la couleur du Nil à la terre rouge que charrient ses eaux depuis le Sennaar 9 ; Ehrenberg, après avoir examiné l’eau au microscope, en a vu la cause dans des infusoires et des plantes cryptogames. Quoi qu’il en soit de la nature de cette cause, il est certain, d’après les récentes études de M. Linant-Bey, qui a fait les recherches les plus sérieuses sur le régime des eaux de l’Égypte, que la coloration du Nil provient d’un de ses affluents.

Le fleuve n’a pas un seul affluent en Égypte. Le premier cours d’eau qu’il reçoit en remontant son cours est à 2 787 kilomètres de la Méditerranée. Non seulement sur cette longueur les affluents manquent ; mais les sources font encore défaut sur 1 202 kilomètres entre Assouan et la mer. L’air est très sec depuis Thèbes jusqu’à Berber, un peu au nord de l’Atbara. Les orages qui amènent des pluies en Abyssinie proviennent tous de la mer des Indes. Alors les pluies tombent à torrents sur les montagnes ; puis, plus tard, à Sennaar ; ensuite à Khartoum, et enfin jusqu’à l’Atbara. Le Nil bleu est le premier affluent qui grossit ; ensuite, le Rhahad et le Dender, et enfin l’Atbara. Avant la pluie, le Nil bleu est limpide ; mais un de ses affluents, qui vient du sud-sud-ouest et se joint à lui au-dessus de Sennaar, à Fazoglo, charrie des eaux rougeâtres qui communiquent cette couleur au Nil bleu 10.

La première plaie d’Égypte ne fut-elle que ce phénomène naturel de la coloration des eaux du Nil, produit par Dieu d’une manière miraculeuse en un temps où il ne se produisait pas d’ordinaire ? Beaucoup le croient aujourd’hui. Cependant, quelque spécieuse et séduisante que cette opinion puisse paraître, nous ne la trouvons pas suffisamment fondée, et nous croyons que le Nil fut véritablement changé en fleuve de sang. Il n’était certainement pas plus difficile à Dieu de le transformer en vrai sang que d’en colorer les eaux de telle sorte qu’elles eussent l’aspect du sang. Il voulait punir les Égyptiens par ce fleuve même dont ils étaient si fiers, et qu’ils vénéraient comme un Dieu ; il voulait surtout leur reprocher le sang innocent des enfants des Hébreux, qu’ils avaient si inhumainement noyés et pour lesquels ils étaient maintenant châtiés : le châtiment était aussi plus grand et plus significatif. C’est d’un sang réel que les pères et les docteurs ont toujours, comme nous, entendu les expressions du texte sacré, et nous ne voyons aucun motif sérieux d’abandonner leur sentiment.

Nous devons néanmoins reconnaître que des apologistes catholiques modernes sont d’avis que les termes de Moïse peuvent, à la rigueur, être entendus d’une coloration rouge, analogue à celles dont nous avons parlé plus haut, quoique miraculeuse.

Voici en effet ce que dit M. Glaire : « Nous pourrions même accorder (aux rationalistes) que les trois premiers prodiges, c’est-à-dire, le changement de la verge d’Aaron en serpent, celui des eaux en sang ou en un liquide de couleur sanguine, et enfin la production des grenouilles, prodiges opérés par Moïse et Aaron, n’étaient que des effets purement naturels, comme nous avouerons sans peine que dans toutes les autres plaies, il se trouve des faits qui ne sont point naturels en eux-mêmes. »

Nous ne saurions admettre que ces trois premiers prodiges furent des effets purement naturels ; mais concéderait-on aux rationalistes que les eaux du Nil ne furent pas changées en un véritable sang, ils n’y gagneraient rien et le miracle n’en subsiste pas moins.

Ce qui, en effet, n’était assurément pas un fait naturel auquel on pût s’attendre, c’est que ce changement des eaux se produisit à Tanis, où il n’est pas probable qu’il eût régulièrement lieu, puisque M. Osburn nous apprend qu’on ne l’observe pas aujourd’hui dans le Delta ; c’est ainsi qu’il se produisit à une époque tout à fait différente de l’époque ordinaire. Il est important de préciser ici la date.

Le phénomène du Nil rouge se passe ordinairement au mois de juillet. Les rationalistes prétendent que c’est pendant ce mois qu’eût lieu la première plaie ; mais leur calcul n’est pas d’accord avec l’ensemble des données du texte sacré. La dixième plaie est datée dans l’Exode : Dieu frappa les premiers-nés de l’Égypte le 14 du mois de nisan, c’est-à-dire, vers le commencement d’avril. La septième plaie, celle de la grêle, est également datée : le texte nous dit que la grêle ravagea les récoltes au moment où « l’orge montait en épis et le lin en tuyau », c’est-à-dire, au mois de mars. Les quatre dernières plaies remplirent donc ainsi un mois environ, et elles se succédèrent à une semaine d’intervalle à peu près les unes des autres. Il est probable que les six premières ne furent également séparées les unes des autres que par une semaine. Il est dit expressément que la seconde, celle des grenouilles, eut lieu sept jours après le changement des eaux du Nil en sang 11. D’après ce calcul, la première plaie arriva donc vers le milieu de février, et par conséquent à une époque où le phénomène du Nil rouge n’a jamais lieu naturellement.

Outre cette première circonstance miraculeuse du temps, nous en avons encore plusieurs autres non moins surnaturelles à signaler : contrairement à ce qui arrive tous les ans, l’eau ainsi changée eut toutes les qualités malfaisantes du Nil vert, au lieu d’avoir les qualités bienfaisantes du Nil rouge ; de plus, elle fit périr les poissons et cessa d’être potable, non seulement dans le fleuve lui-même et dans les canaux, mais jusque dans les étangs et les vases de pierre placés dans les villes, au carrefour des rues, qui, avec les vases de bois, sont suffisants en temps ordinaires pour clarifier l’eau bourbeuse du fleuve. L’eau du Nil se corrompt souvent avant l’inondation : « Pendant les mois qui précèdent l’inondation, juin, juillet et août, dit le docteur Lambert, l’eau du Nil se réduit et devient si basse dans son lit, qu’elle n’a plus de mouvement et acquiert toutes les qualités des eaux stagnantes : elle s’échauffe dans ce qui lui reste de profondeur ; elle devient verdâtre, fétide, et se remplit facilement de vers. » Au contraire, d’après le témoignage unanime de tous ceux qui connaissent l’Égypte, l’eau du Nil n’est jamais corrompue quand, dans les commencements de la crue, elle devient rougeâtre ; elle ne cause pas alors la mort des poissons, et peut être bue sans aucun danger. Un changement chimique insolite, que le phénomène du Nil rouge ne suffit point à expliquer, s’était donc produit dans les eaux ; quand elles avaient été frappées de la verge de Moïse, un miracle s’était opéré.

Cependant ce miracle, quelque grand qu’il fut, ne toucha point le cœur de Pharaon 12, comme tant d’autres qui devaient le suivre. Dieu envoya alors en Égypte une seconde plaie : celle des grenouilles.

Peut-être, sous ce nom de grenouilles, faut-il comprendre aussi un animal plus désagréable et plus repoussant encore : le crapaud, car l’hébreu ne distingue pas l’un de l’autre. Quoi qu’il en soit, les grenouilles sont très abondantes en Égypte, et, à l’époque de la croissance du Nil, leur nombre est tel, qu’elles empêchent, par leur coassement, le sommeil des voyageurs qui ne sont pas habitués à ce bruit étourdissant et d’une monotonie exaspérante. Il est aisé de s’imaginer l’incommodité d’une invasion de grenouilles pénétrant dans les appartements, couvrant tous les meubles, les tables, les lits, et remplissant tous les vases et les ustensiles de ménage. Dès la plus haute antiquité, les indigènes avaient confié à une divinité le soin de les délivrer de l’importunité de ces animaux malfaisants. On voit, représenté sur les monuments, un dieu avec une tête de grenouille. On considérait sa mission comme si importante, qu’il occupait un des premiers rangs dans le panthéon égyptien.

De même que le dieu Nil avait été humilié dans la première plaie, le dieu à la tête de grenouille fut humilié dans la seconde ; Jéhovah prouva l’impuissance de cette fausse divinité, qui ne put défendre ses adorateurs contre l’invasion des grenouilles.

Dans cette seconde plaie, Dieu multiplia d’une manière miraculeuse cet instrument de sa colère contre les Égyptiens, et il fit éclater son souverain domaine et sa toute-puissance, en faisant apparaître les grenouilles, quand Aaron étendit sa main sur les eaux, de même qu’en les faisant disparaître, lorsque, au jour déterminé à l’avance par Menephtah lui-même, Moïse demanda cette grâce au Seigneur.

Le pharaon, délivré du fléau, endurcit son cœur et refusa d’obéir à la voix de Jéhovah. Il en fut puni par la troisième plaie.

La troisième plaie fut celle des insectes, appelés par le texte original : kinnim. Les kinnim sont les moustiques, l’un des fléaux ordinaires de l’Égypte ; Hérodote les décrit dans son histoire. C’est surtout lorsque l’air est frais et vers la fin de l’inondation, que leurs piqûres sont à redouter. Ils persécutent les hommes, les incommodent dans leurs repas, les troublent dans leur sommeil, et, en leur suçant le sang, les couvrent de petites pustules très douloureuses, qui peuvent produire la fièvre. Pococke et Maillet disent qu’ils forment quelquefois au Caire de véritables nuages qui obscurcissent le ciel. De toute antiquité, on a été obligé de se servir, dans la vallée du Nil, de moustiquaires pour échapper à leurs morsures pendant la nuit, ou de ne dormir que complètement enveloppé d’un manteau. Nous voyons souvent représentés, sur les monuments, les porteurs d’éventails chargés de préserver les grands personnages de leurs piqûres.

Le caractère miraculeux de la plaie, d’ailleurs fréquente en Égypte, dont Dieu affligea alors ce pays, consista dans la manière dont Moïse la produisit en faisant frapper la poussière par son frère Aaron, armé de sa verge, et aussi sans doute dans l’abondance tout à fait extraordinaire des moustiques. Ils ne sont généralement en grand nombre que sur les bords de la mer ; mais, en cette circonstance, toute la poussière de l’Égypte fut changée en moustiques, sous la verge miraculeuse d’Aaron 13. Les enchanteurs de Menephtah ne purent contrefaire ce dernier prodige, comme ils l’avaient fait pour les précédents ; néanmoins le cœur du roi resta endurci 14.

On croit généralement que la quatrième plaie fut celle des mouches, quoique le sens précis du mot hébreu arôb soit difficile à déterminer. Ce mot signifie proprement « mélange », et nous pouvons l’entendre de toute espèce de mouches, sans distinction d’espèces. Les mouches sont un des fléaux de l’Égypte, et, lorsqu’elles abondent plus qu’à l’ordinaire, elles rendent la vie presque intolérable. « Leurs essaims sont si nombreux, dit M. Wood, que l’étranger mange des mouches, boit des mouches, respire des mouches 15. » Mais ce qui les rend surtout insupportables, c’est qu’elles se posent de préférence sur les paupières et au coin de l’œil : l’humidité de cette partie du corps les y attire. Or les ophtalmies sont très fréquentes en Égypte, et il est aisé de se figurer le supplice que causent à des yeux malades ces ennuyeux insectes. Un des spectacles qui impressionnent le plus péniblement l’Européen sur les bords du Nil, c’est la multitude des enfants dont les yeux sont malades et couverts de mouches.

Une espèce de ces mouches appelées dthehab, est longue, de couleur grise, et apparaît vers l’époque de l’inondation du Nil ; elle est si pernicieuse, qu’elle peut causer par ses piqûres la mort des chameaux, si l’on néglige de soigner à temps les blessures qu’elle leur fait. Elle attaque les hommes comme les animaux.

Quelque habitués que pussent être les Égyptiens aux incommodités causées par les mouches, les souffrances que leur fit endurer la quatrième plaie furent si grandes, que le pharaon commença à proposer des concessions à Moïse. Il ne voulut point lui accorder cependant tout ce que ce dernier lui demandait, et il en fut puni par une épizootie qui fit périr un très grand nombre d’animaux.

L’histoire mentionne quelques épidémies de ce genre en Égypte. En 1786, la peste tua un si grand nombre de bœufs, qu’on fut obligé d’employer les buffles à leur place pour les travaux d’irrigation. Le fléau sévit de temps en temps dans le Delta avec une grande violence, et l’on est alors forcé d’aller chercher de nouveaux bœufs en Syrie ou dans les îles de l’Archipel. Mais, quelle que soit la fréquence de la maladie, elle n’est pas régulière, et ce n’est que par un miracle évident que Moïse put en annoncer l’apparition. « Il faut savoir, comme l’a dit avec beaucoup de raison Origène, que quoique la plupart des prodiges opérés par Moïse contre l’Égypte ne descendissent point du ciel, ils n’en avaient pas moins manifestement Dieu pour auteur 16. »

La peste des animaux n’ayant point suffi pour toucher le cœur endurci des Égyptiens, Dieu les frappa eux-mêmes. Ce châtiment dut d’autant plus leur imprimer une terreur salutaire, qu’il n’est pas très commun dans la vallée du Nil. « Avec les grandes chaleurs et l’humidité qui règnent dans certaines villes pendant l’été, dit le docteur Lambert, médecin des chemins de fer et des télégraphes du gouvernement égyptien, l’on croirait que l’Égypte est un des pays les plus malsains, surtout lorsque, par l’inondation du Nil, le pays devient, pendant des mois entiers, un marécage où l’eau croupit pendant trois mois environ ; marécages dont les exhalaisons devraient causer des épidémies graves et des maladies d’infection générale. Mais l’expérience vient nous prouver que les émanations des eaux stagnantes, causes de tant de maladies et si meurtrières dans tous autres pays, ne peuvent avoir cette qualité en Égypte, et la raison en est simple : d’un côté, les courants des vents continus, ne trouvant pas le moindre obstacle, pas même une seule montagne pour empêcher leur cours, passent et emportent avec eux toute exhalaison malsaine, tout miasme ; de l’autre, deux contrées immenses, voisines de l’Égypte, embrasées et desséchées par un soleil ardent et privées tout à fait d’eau : l’Afrique et l’Arabie, couvertes de sables toutes les deux et ayant une atmosphère dont la siccité est extrême, aspirent et absorbent continuellement toute humidité, et avec elle toute exhalaison malsaine et miasmatique 17. »

Il est impossible de déterminer exactement quelle fut la maladie dont Dieu frappa les Égyptiens dans la sixième plaie, et qui atteignit les animaux comme les hommes. Les enchanteurs ne furent pas eux-mêmes épargnés, néanmoins l’obstination de Menephtah n’en demeura pas moins grande.

La septième plaie fut un orage affreux, où les éclairs et le tonnerre furent accompagnés d’une grosse grêle, qui causa dans les champs de très grands ravages. Cette grêle effraya d’autant plus les Égyptiens, qu’elle est plus rare dans leur pays. Personne n’en avait jamais vu d’aussi désastreuse, beaucoup sans doute n’en avaient jamais vu du tout. « Pendant un séjour de douze ans (en Égypte), dit le docteur Pruner, il n’est venu à ma connaissance qu’un seul cas de mort produit par la foudre, et encore c’était dans l’île de Rhodes. Il n’est tombé de la grêle que trois fois en été, pendant le même intervalle de temps, et elle était très peu abondante. »

Le texte sacré détermine l’époque où eut lieu cet orage : c’est lorsque l’orge monte en épi et le lin en tuyau, c’est-à-dire au mois de mars, comme nous l’avons vu plus haut. L’orge et le lin furent ainsi détruits par la grêle, les pertes furent très grandes. Néanmoins, quand le fléau fut passé, Menephtah persista dans son endurcissement.

Dieu résolut donc de frapper encore davantage les Égyptiens dans leurs biens et de leur enlever le reste des récoltes que la grêle avait épargnées, en faisant compléter l’œuvre de destruction par les sauterelles.

Les invasions de sauterelles sont un des fléaux les plus terribles qu’aient à redouter un grand nombre de populations du globe. Tout le pays qui s’étend du cap de Bonne-Espérance à la Norvège, de la Chine au cap Vert, et en particulier de l’Arabie à l’Inde, du Nil et de la mer Rouge à la Grèce et au nord de l’Asie Mineure, tout ce pays est exposé à leurs dévastations. On a vu des légions de ces insectes traverser la mer Noire et porter leurs ravages jusqu’en Pologne, franchir la Méditerranée et aller ruiner les plaines de la Lombardie. Mais, malgré ses voyages lointains, on peut assigner comme patrie à la sauterelle le sud de l’ancien monde, et plus spécialement la frontière des pays cultivés, comme l’Arabie Déserte, la Syrie. Les femelles, vers le mois d’octobre, déposent leurs œufs dans des terres sèches et à l’abri du vent ; ils sont enveloppés d’une substance gluante qui se durcit sous l’influence de la sécheresse du sol ; la chaleur du soleil les fait éclore au printemps, vers le mois de mars ou d’avril. La jeune sauterelle est beaucoup plus petite que notre mouche commune ; ses ailes sont roulées sur le dos et ses grandes pattes enfermées dans une gaine. Mais, après une série de quatre transformations successives, qui durent neuf à dix semaines, l’insecte a atteint son complet développement : ses ailes se déploient, ses pattes se dégagent, sa couleur a cessé d’être brune ou noire, pour devenir jaune d’or, verte ou rose couleur de chair, rayée de lignes foncées. La famille des sauterelles compte de nombreuses espèces. Celle qui nous occupe ici doit à ses habitudes le nom scientifique de locusta migratoria, ou sauterelle voyageuse.

Arrivée ainsi à l’âge adulte, elle marche toujours devant elle, semant partout sa nombreuse postérité et ravageant tout sur son passage. Lorsque les conditions atmosphériques ont été favorables à l’éclosion des sauterelles, elles sont en si grand nombre, qu’elles méritent bien le nom que leur donnaient les Hébreux, arbêh, les « nombreuses », ou l’un des noms que leur donnent les Arabes, danahsah, qui signifie « celles qui cachent le soleil ».

Elles cachent aussi la terre, quand elles s’y reposent, et la font complètement disparaître sous leurs légions denses et pressées. Le vent est le complice et l’instrument nécessaire des dégâts commis par les sauterelles. Quoiqu’elles aient une puissance de vol considérable et qu’elles soient capables de franchir de grandes distances, elles ne peuvent cependant se diriger à leur gré : instruments aveugles de la Providence, elles sont complètement livrées à la merci du vent, dont le souffle les porte au but que Dieu leur a marqué ; quand il se lève brusquement, elles sont agitées comme les flots de la mer, et si une trombe, ce qui n’est point rare dans les contrées où elles abondent, vient à les surprendre, elles sont emportées çà et là par le tourbillon furieux, sans pouvoir réussir à se débarrasser de son inextricable étreinte.

Il faut avoir été soi-même témoin du passage d’une nuée de sauterelles pour se représenter l’espace que peuvent occuper ces légions, que l’on ne peut comparer qu’aux gouttes d’eau ou aux grains de sable de la mer. On dirait que le désert s’est animé et que chaque grain de sable est devenu un être vivant. Leur multitude obscurcit la lumière du soleil et projette une ombre épaisse sur la terre. Cette masse compacte, vue de loin, fait l’effet d’une montagne aérienne qui s’avancerait lentement et sans interruption, sur un front de plusieurs kilomètres d’étendue. Malheur au pays qu’elles traversent, si le vent se calme et laisse aux insectes dévastateurs le temps de se reposer ! Ils tombent plus drus et plus serrés que des flocons de neige ; le sol est aussitôt complètement couvert comme d’un immense matelas mouvant et grouillant. Les Orientaux les ont souvent comparées à une armée envahissante. Une armée ennemie peut faire plus de mal aux personnes, mais non aux champs et à la campagne. Les sauterelles dévorent tout : l’herbe verte disparaît en un instant ; quand elle est dévorée, c’est le tour des arbres. Elles grimpent par myriades en mangeant toutes les feuilles, et rongent jusqu’à l’écorce des rameaux. Elles escaladent les murs des maisons qui se rencontrent sur leur passage, en couvrent les ouvertures, pénètrent dans les appartements, et attaquent, quand elles ont faim, le bois des portes et des meubles. Leur voracité est telle, qu’on entend à une grande distance le bruit causé par ces milliers de petites mâchoires rongeant le gazon et le feuillage. Devant elles, le paradis ; derrière elles, le désert.

Impossible de prévenir et d’empêcher ces dégâts et ces ruines. L’homme, armé de toutes ses ressources de destruction, est impuissant contre ce petit animal, dont l’union rend la force irrésistible. Une voiture, surprise par cette avalanche, est forcée de s’arrêter : les chevaux aveuglés et affolés, refusent tout service, ne sachant comment se dérober aux coups multipliés de ces myriades d’ennemis, qui se heurtent contre tout ce qu’ils rencontrent. Des régiments entiers de soldats ont tenté en vain d’arrêter leur marche. On creuse des tranchées pour leur servir de tombeau ; l’avant-garde les comble de leurs corps morts, et le reste de l’armée continue à avancer. On allume des feux sur leur passage ; les premières l’étouffent sous leur multitude, et les autres passent. C’est bien véritablement le fléau de Dieu, que rien ne peut arrêter, si ce n’est celui qui l’a déchaîné.

Il est si odieux dans les contrées qu’il ravage, que les anciens manichéens concluaient de son existence à l’existence du mauvais principe, en opposition avec le principe du bien, et qu’un écrivain arabe nous a fait de la sauterelle cette description monstrueuse : elle a la tête du cheval, les yeux de l’éléphant, le cou du taureau, les cornes du cerf, la poitrine du lion, le ventre du scorpion, les ailes de l’aigle, les jambes du chameau, les pieds de l’autruche et la queue du serpent.

Enfin, quand les sauterelles sont repues, si elles n’ont pas tout détruit, elles souillent tout ce qui reste, comme les antiques harpies, de leur bave immonde, qui corrode et brûle tout ce qu’elle touche. Heureux encore si le vent qui les a apportées les emporte enfin plus loin ! car elles feraient plus de mal après leur mort qu’elles n’en ont fait pendant leur vie : leurs cadavres, entassés en monceaux, deviendraient un foyer de corruption, qui empesterait l’atmosphère et produirait bientôt des maladies contagieuses qui feraient périr les hommes dont les récoltes ont déjà été ravagées 18.

Dieu, qui ne voulait frapper le grand coup contre la personne des Égyptiens que quand ils auraient résisté à tous les autres moyens destinés à les plier à sa volonté, leur épargna ce dernier malheur : un vent d’est avait amené les sauterelles sur le sol de l’Égypte ; un vent du nord, soufflant de la Méditerranée, les jeta dans la mer Rouge, où elles périrent submergées. Mais elles avaient déjà exécuté l’œuvre de dévastation que leur avait assignée la Providence ; tout ce que la grêle avait épargné était devenu leur proie : le froment, l’épeautre, tous les fruits des arbres, tous les légumes de la terre.

Ce nouveau malheur remplit les Égyptiens de consternation. La grêle leur avait enlevé la première partie de leurs récoltes ; ils espéraient au moins sauver la seconde, mais maintenant tout avait péri et la famine s’avançait menaçante. Le désastre était d’autant plus ressenti qu’il était plus rare. De même que la grêle, les dévastations de sauterelles ne sont pas fréquentes en Égypte 19. Nous apprenons par les monuments 20 et par les récits des voyageurs qu’elles n’y sont pas inouïes, mais aussi qu’elles n’y sont pas communes. Elles sont assez connues pour justifier le récit de l’Exode ; elles ne le sont pas assez pour lui ôter son caractère miraculeux.

Un fléau non moins terrible que celui des sauterelles lui succéda pour châtier les Égyptiens toujours endurcis.

Il souffle dans le nord de l’Afrique un vent d’une extrême violence, qui est la terreur et le fléau des populations. Il porte, selon les pays, des noms différents. En Algérie, on l’appelle le simoun, c’est-à-dire « le poison », parce que, comme un poison véritable, il allume dans le corps une chaleur intense, capable d’amener la mort 21. Il vient mourir dans le midi de la France, où il se rend encore quelquefois redoutable. Le siroco d’Italie et le solano d’Espagne, ne sont aussi que les contrecoups du simoun africain. En Égypte, les arabes appellent ce vent le chamsin. Le mot chamsin signifie « cinquante ». Il est ainsi nommé parce qu’il souffle pendant une période de cinquante jours, vers l’équinoxe du printemps, entre le mois de mars ou le mois de mai 22, à des intervalles divers, tantôt deux, tantôt trois, tantôt quatre jours consécutifs, séparés par un calme plus ou moins long. Dans le désert, il soulève des montagnes de sable et ensevelit quelquefois des caravanes entières. Il engloutit ainsi l’armée envoyée par Cambyse contre les Ammoniens : elle disparut, comme si elle avait été noyée dans les flots de l’Océan, sans qu’on en sût d’autres nouvelles 23.

Les récits des voyageurs, témoins et quelques-uns presque victimes des ravages de ce vent terrible, nous permettent de rendre assez bien compte de ce que dut être la neuvième plaie d’Égypte. Les exégètes modernes croient reconnaître dans ce fléau l’instrument providentiel dont Dieu se servit miraculeusement pour frapper les Égyptiens, en l’accompagnant de circonstances surnaturelles et en lui donnant une intensité inouïe jusqu’alors.

Le chamsin est un vent du sud-ouest. Il souffle les jours où le soleil est le plus ardent. Il s’annonce par une chaleur d’une nature particulière, que connaissent très bien les indigènes, et qui commence à les remplir d’effroi. Bientôt un point imperceptible tache au loin l’horizon ; il grandit à vue d’œil, et, comme une immense voile qui se déploie, il envahit le ciel tout entier. L’air, d’abord tranquille, s’agite ; la tempête se déchaîne ; quelquefois des tourbillons se forment, et ces cyclones terrestres emportent tout dans leurs cercles gigantesques. Plus souvent, l’ennemi approche sans perturbation sensible dans l’air ; on dirait une armée d’esprits qui s’avance silencieusement et ne manifeste sa présence que par ses dévastations. Le ciel aussitôt se rembrunit, l’espace est rempli de poussière ; le disque solaire devient rouge comme le sang, puis livide ; tout le firmament pâlit, et se colore de teintes violacées et bleuâtres. D’épais nuages de sable fin, rouges comme la flamme d’une fournaise, enveloppent toute l’atmosphère et l’embrasent comme un immense incendie. Ils brûlent tout sur leur passage : ils aspirent la sève des arbres, ils boivent l’eau renfermée dans les outres. Lorsque le thermomètre marque de 20 à 30 degrés, le chamsin élève aussitôt la température à 45 ou 50 degrés. Peu à peu, les ténèbres deviennent plus épaisses ; bientôt tout est sombre, plus sombre que nos plus noires journées d’hiver, obscurcies par les plus épais brouillards : on ne peut rien distinguer à quelques pas devant soi, on ne peut sortir, on ne peut marcher. Même jusqu’au fond des maisons, impossible d’échapper à cette poussière imperceptible qui pénètre partout, dans les appartements les mieux fermés, dans les vases les mieux couverts. Elle se dépose sur le visage comme un masque enflammé, elle s’insinue dans les narines et dans la bouche ; chargée de molécules sulfureuses, elle produit dans tout l’organisme une irritation violente, et, atteignant jusqu’aux poumons, qu’elle brûle, elle peut en arrêter le mouvement et occasionner la mort. La respiration est courte et pénible, la peau se dessèche et se crispe, la transpiration s’arrête, le sang afflue à la tête et à la poitrine ; on est plongé dans une prostration profonde, on se sent impuissant et désarmé contre un si terrible ennemi. Le chameau se jette à terre et enfonce le nez dans le sable, les animaux se cachent, les hommes s’enveloppent la tête d’un pan de leur manteau, ils abandonnent leurs huttes ou leurs tentes, ils descendent dans les souterrains, dans les puits et dans les tombeaux, où ils sont comme « enchaînés par les ténèbres 24 ». Les rues sont désertes ; partout, sur la terre et dans l’air, règne un silence profond, comme si la vie avait disparu du monde sous le souffle mortel du chamsin. On est réellement plongé dans une atmosphère ou une mer de sable brûlant, de sorte que les ténèbres qui vous enveloppent sont véritablement des ténèbres palpables 25.

Si tels sont les effets ordinaires du chamsin, que durent-ils être le jour où ce fléau redoutable, déchaîné par la colère divine contre les Égyptiens endurcis, exerça ses ravages avec une violence miraculeuse 26 ? Le récit de l’Exode ne mentionne qu’un petit nombre de circonstances de cette plaie : la manière surnaturelle dont elle commence quand Moïse étend sa main, sur l’ordre de Jéhovah ; l’épaisseur de ces ténèbres palpables, durant trois jours dans toute l’Égypte ; l’impossibilité des habitants de se reconnaître les uns les autres et de se mouvoir de place ; l’exemption merveilleuse du pays de Gessen, qui continue à jouir de la lumière du jour. L’excès de chaleur qui dut accompagner ces ténèbres est passé sous silence, sans doute parce que l’auteur sacré voulait faire ressortir avant tout le caractère symbolique de ce nouveau châtiment, image frappante de l’aveuglement du pharaon, de la colère de Dieu contre ce dernier, de sa grâce sur les enfants d’Israël.

La terreur causée par ce fléau à Menephtah, qui s’empressa de faire de nouvelles concessions à Moïse, et qui n’aurait point été effrayé par une tempête ordinaire de chamsin, nous montre assez quelle en avait été la rigueur et la nature tout à fait extraordinaire. L’auteur du livre de la Sagesse nous en a décrit plus longuement les horreurs : il nous montre les Égyptiens « captifs des ténèbres », cette image du deuil et de la mort dans leur symbolique ; se retirant dans les endroits les plus cachés ; se couchant, comme le font encore aujourd’hui les indigènes, pour échapper au fléau, et refusant de voir et de respirer l’air, que cependant on ne peut fuir. Il parle aussi du bûcher embrasé dans lequel ils étaient plongés comme des criminels condamnés au feu, et qui brûlait de lui-même, en les remplissant d’effroi.

Ces coups, si nombreux et si violents, frappés par la Providence, n’avaient pu cependant triompher encore de l’endurcissement du pharaon et de ses sujets. Le moment était venu où il fallait triompher de cette résistance opiniâtre ; en une seule nuit, Dieu fit mourir tous les premiers-nés d’Égypte, « depuis le premier-né de Pharaon, qui était assis sur son trône, jusqu’au premier-né de la captive qui était enfermée en prison, et au premier-né des animaux, de sorte qu’il n’y eut pas de maison où il ne se trouvât un mort. » Ce fut la dixième et dernière plaie.

Il est évident qu’il s’agit ici d’un miracle tout à fait extraordinaire, qui ne peut rien avoir d’analogue dans l’histoire d’Égypte. L’ange exterminateur put se servir de la peste, comme de tout autre moyen approprié au but de Dieu, pour frapper les premiers-nés des Égyptiens ; mais aucune peste naturelle ne peut l’expliquer, quoi qu’aient prétendu certains rationalistes.

Nous pouvons seulement rechercher si nous ne rencontrons rien, dans les documents indigènes, qui puisse confirmer le récit de Moïse. Or voici ce que nous lisons dans M. Chabas : « Nous trouvons sur un monument du musée de Berlin, décrit par M. Brugsch, le souvenir de l’existence d’un fils de Menephtah Ier, qui serait mort avant son père, comme celui de l’Exode. » M. Lauth nous donne des renseignements encore plus précis et plus complets à ce sujet : « Le pharaon qui régnait en Égypte, quand Moïse revint de Madian, ne peut être que Menephtah. Cela admis, nous devons arrêter notre attention sur une statue colossale de Menephtah, maintenant au musée de Berlin, où est représenté son « fils aîné, prince royal, associé à l’empire, – comme le montre l’uréus qui est sur sa tête, – le chantre qu’il aime, le fils qu’il aime, qui incline le cœur de son seigneur, qu’il a engendré, le basilicogrammate, le chef des archers, le prince Menephtah. » Il portait donc le même nom que son père. Il est représenté adorant « Sutech, le grand dieu, le seigneur du ciel » et en même temps comme « Khuma », c’est-à-dire « justifié » ou « bienheureux ». « Ce n’est pas être trop crédule, continue M. Lauth, que de voir dans ce jeune prince, mort avant son père, dont le frère cadet, Séthos, succéda à Menephtah, ce fils du pharaon dont parle l’Exode, IV, 23 : « Je ferai mourir ton fils aîné, parce que tu refuses de laisser partir mon fils aîné », Israël, pris collectivement. Cette menace fut exécutée, d’après l’Exode (XI, 5), qui ajoute cette particularité : « le fils aîné de Pharaon, qui était assis sur son “trône”, détail par lequel est manifestement indiqué la dignité de repa seps, ou d’associé à l’empire, comme nous l’avons dit plus haut ».

La dixième plaie mit enfin un terme à l’obstination du pharaon, il était vaincu et laissa partir Israël. Peu après, il est vrai, il revint sur sa décision et poursuivit les fugitifs sur les bords de la mer Rouge. C’est là que le Seigneur l’attendait pour mettre le comble à son humiliation.

Tels furent les principaux évènements qui amenèrent la sortie d’Égypte et contraignirent Menephtah à donner la liberté aux Israélites. Leur caractère est incontestablement miraculeux, le lecteur a pu s’en convaincre par le simple récit des faits et des circonstances qui les accompagnèrent ; ils présentent en même temps une couleur égyptienne frappante, comme nous l’avons montré, et ils confirment ainsi la valeur historique du livre qui nous en a conservé la mémoire.

 

 

F. VIGOUROUX

dans Les questions controversées

de l’histoire et de la science,

1894.

 

 

 

 

 



1 Cette étude sur les plaies d’Égypte est extraite de La Bible et les Découvertes modernes, en Palestine, en Égypte et en Assyrie. Paris, Berclie et Trallin, 2e édit., t. II, p. 257 et suiv.

2 GLAIRE, Les Livres saints vengés, 1re édit., t. I, p. 355 ; 2e édit., t. II, p. 15. « Il est à remarquer, dit aussi l’annotateur de la Bible d’Allioli, que les dix plaies dont Dieu frappa l’Égypte ont des rapports naturels avec l’état physique du pays et les fléaux qui ordinairement l’affligent : il n’y aurait guère d’exception que pour les deux dernières, les ténèbres et la mort subite des premiers-nés. Encore peut-on dire que les nuages de sable que les vents soulèvent à certaines époques de l’année, produisent de véritables ténèbres, et que la peste qui ravage si souvent ces contrées, rappelle l’extermination des enfants des Égyptiens. Mais quoique Dieu, pour exercer ses jugements, se serve des causes naturelles, des phénomènes qui sont comme indigènes et endémiques, les plaies d’Égypte, considérées avec leurs circonstances de temps, de lieux, de manières et d’occasions, n’en sont pas moins des faits entièrement miraculeux et qui ne peuvent être attribués qu’à la puissance divine. » Nouveau Commentaire littéral, critique et théologique sur tous les livres des divines Écritures, par le Dr ALLIOLI ; traduit par M. l’abbé Gimarey sur la sixième édition allemande ; 3e édit. française, 1860, t. I, p. 287.

3 « Sans doute, dit M. l’abbé GLAIRE (Livres saints vengés, 1re édit., t. I, p. 354 ; 2e édit., t. II, p. 16), si on considère les prodiges opérés par Moïse uniquement en eux-mêmes, et chacun pris séparément, en faisant abstraction de ses circonstances, telle que la manière dont il fut opéré et la fin à laquelle il se rapportait, ils pourront ne paraître que des effets purement naturels ; mais si, au contraire, on a égard à ces circonstances, comme on le doit dans l’examen de tout fait historique, il en sera bien autrement. » – « En effet, comme le remarque judicieusement Janssens, à qui paraîtra-t-il naturel que des fléaux si nombreux et si terribles, qui n’ont aucun rapport entre eux, fondent à la fois sur un pays, et cela dans l’espace de cinq ou six semaines, et que les seuls Israélites, réunis dans la petite terre de Gessen, en soient exempts ? Comment, par des moyens naturels, Moïse aurait-il pu prévoir, prédire, produire tous ces fléaux, en élevant ou en abaissant sa verge, les prolonger à son gré, puis les faire cesser d’un seul mot ? Ces miracles avaient une fin vraiment digne de Dieu : ils étaient nécessaires pour que Moïse, obtenant de Pharaon la liberté des Hébreux, les formât en corps de nation, leur donnât des lois justes et leur enseignât le culte du vrai Dieu ; c’est cette délivrance des Israélites, c’est leur sortie d’Égypte qui fraya au genre humain la route au christianisme, et le dessein de Dieu de racheter le genre humain, dessein annoncé dès la chute de nos premiers parents, dont on doit voir la confirmation et même un commencement d’exécution dans l’évènement qui constitua les Hébreux en corps de peuple, fut enfin accompli par la venue du Messie. » JANSSENS, Introduction à l’Écriture sainte, no 125.

4 GLAIRE, Livres saints vengés, 1re édit., t. I, p. 356 ; 2e édit., t. II, p. 16. Il ajoute judicieusement : « Un poète étranger à l’évènement et qui aurait vécu longtemps après l’époque à laquelle on suppose qu’il a eu lien, n’aurait jamais songé, en décrivant ces plaies désastreuses, à faire intervenir les magiciens de Pharaon pour en produire quelques-unes ; jamais il n’aurait imaginé le récit de la mort des premiers-nés tel qu’il est raconté dans l’Exode : des traits de cette nature ne s’inventent pas. »

5 Bunsen (Bibelwerk, t. V, p. 128) ne va pas si loin : il compare la couleur du Nil à celle de l’ocre rouge ou à la couleur de la peau des Égyptiens. Il ajoute que la coloration dure autant que la crue, environ quatre-vingt-dix jours.

6 OSBURN, The Monumental History of Egypt, Londres, 1855, t. I, p. 10-12. Nous avons reproduit la traduction de M. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, p. 3-4.

7 Voir NIEBUHR, Voyage en Arabie, t. I, p. 104 et suiv.

8 POCOCKE, Description of the East, in-fo, t. I, p. 199 ; ANTES, Observations on the Manners of the Egyptians, p. 75 ; ABD-ALLATIF, Relation de l’Égypte, Note de Sacy, p. 346.

9 LABORDE, Commentaire géographique de l’Exode, p. 28.

10 Lettre de Linant-Bey à M. Belgrand, Comptes rendus de l’Académie des sciences, 14 décembre 1874, p. 1358. Cf. Journal officiel, 11 décembre 1874, p. 8198-8199.

11 Exode, VII, 25.

12 On peut être surpris qu’un aussi grand miracle que le changement des eaux en sang ne produisît pas plus d’impression sur le cœur de Menephtah, mais il ne faut pas oublier que les Égyptiens, étant habitués à voir le Nil rougir tous les ans, devaient être moins frappés par le changement des eaux en sang que ne l’auraient été les habitants de pays qui n’auraient jamais vu rien de semblable.

13 OSBURN, Monumental History of Egypt, t. II, p. 582.

14 « Les moucherons naissent et se multiplient ordinairement, dit la Bible d’ALLIOLI, t. I, p. 294, dans les pays chauds, dans les endroits humides, marécageux, remplis de détritus ou de corps en putréfaction. Après la retraite des eaux du Nil, et même pendant qu’elles se retirent, il y en a beaucoup en Égypte ; et nul doute qu’en cette occasion, les amas de grenouilles mortes n’aient encore contribué à les multiplier. Mais, à la manière dont les choses se passent ici, on voit clairement que le fléau n’avait pas une cause naturelle ; ce n’était pas non plus la saison où les moustiques infestent d’ordinaire l’Égypte. »

15 « Les mouches sont un fléau de tous les pays chauds, dit la Bible d’ALLIOLI, t. I, p. 291, et l’Égypte, après la retraite des eaux du Nil, vers le mois de septembre ou d’octobre, en est infestée. Mais la plaie des mouches dont Moïse frappa Pharaon, arriva au mois de février ou au commencement de mars, et ce fait, considéré dans toutes ses circonstances, est évidemment miraculeux. »

16 « Les épizooties, les pestes et toutes les maladies qui attaquent les animaux ou les hommes, dit la Bible d’ALLIOLI, t. I, p. 293, sont de tous les temps et de tous les lieux... Cependant il est vrai de dire que les pays du Levant, et en particulier l’Égypte, sur la fin de l’été, sont plus exposés à ces fléaux que les contrées du Nord. Pour ce qui regarde l’Égypte en particulier, les miasmes qui s’élèvent du limon déposé par le Nil à son débordement, la mort des insectes qui périssent par essaims, peut-être aussi l’usage de certains fruits crus pour les hommes, et pour les animaux un mauvais fourrage, tout cela et bien d’autres causes tirées de l’hygiène ou du défaut de propreté, y occasionnent de fréquentes épidémies et épizooties. Mais ce n’est pas le cas de chercher dans ces maladies épidémiques la cause de la plaie de la peste, ou de celle des ulcères dont Moïse raconte ici l’origine et les effets : il est visible que, dans son récit, toutes les circonstances tiennent du surnaturel et du miracle (Exode IX, 4, 7, 9-11). D’ailleurs, on n’était pas alors dans la saison où les épizooties et les maladies épidémiques sévissent en Égypte. »

17 Dr Lambert, Hygiène de l’Égypte, p. 27-28.

18 V. H. NEWMAN, Callista, a sketch of the third Century. London, ch. XV, p. 132-139. – JOËL, II, 2-11.

19 « L’Égypte a à souffrir, comme la Syrie et les autres contrées de l’Asie, du fléau des sauterelles ; cependant on ne trouve point de documents qui établissent qu’elles produisent ici des ravages aussi extraordinaires qu’en Syrie et en Arabie. » NORDEN, Reisen, ap. Hengstenberg, p. 122. Voyage d’Égypte et de Nubie, Copenhague, 1723 et 1755, 2 in-fo.

20 Dans les Instructions au roi Osortesen Ier, attribuées à Amenemhat Ier, les ravages causés par les sauterelles sont mentionnés parmi les fléaux qui peuvent affliger l’Égypte, et mises sur la même ligne que les guerres civiles et l’insuffisance du débordement du Nil. « Soit que les sauterelles aient organisé le pillage, » dit-il, etc. Apud MASPERO, Hist. anc. des peuples d’Orient, p. 101.

21 Voir une belle description du simoun et de ses ravages, par Lucien Dubois, Le Pôle et l’Équateur, p. 228-231.

22 Olivier RITT, Histoire de l’isthme de Suez, 2e édit., 1869, p. 168, dans une lettre datée de Kantara, où est décrit le chamsin pendant qu’il souffle, le 18 février 1860, le fait commencer « vers le 15 février ».

23 Hérodote, 1. III, cap. XXVI, édit. Didot, p. 141. – « En 1838, plus de quarante mille pèlerins musulmans étaient campés dans le désert près du but de leur voyage, lorsque le chamsin se déchaîna tout à coup : les tentes furent déchirées et jetées au loin, beaucoup de voyageurs furent frappés d’apoplexie, et d’autres, déjà fatigués d’une longue route, présentèrent bientôt les symptômes cholériques les plus alarmants ; ceux qui survécurent, précipitèrent leur marche en désordre vers la Kaaba, frappés de terreur. » Didot, Univers pittoresque, Égypte moderne, IIIe partie, p. 96-98. – Des ouragans analogues existent aussi en Chine, où on leur donne le nom caractéristique d’« orages de poussière ». Un prêtre de la Mission, M. Armand David, a décrit une tourmente de ce genre. « Pendant deux ou trois jours, le soleil fut complètement obscurci par la poussière, surtout du côté de Tien-Tsing et de Takou, et cette poussière, poussée par un vent impétueux, alla si loin en mer, qu’un navire à vapeur se trouva dans la nécessité de suspendre sa marche plus de vingt-quatre heures. » Émile BLANCHART, « Les récentes explorations des naturalistes en Chine », Revue des Deux Mondes, 15 février 1871, p. 723.

24 Sap., XVII, 2.

25 Exode, X, 21.

26 « Lorsque le vent du désert, dit M. l’abbé Drioux, Bible, t. I, p. 181, souffle dans la saison des grandes chaleurs, il obscurcit l’air, et on se trouve comme plongé dans les ténèbres. Mais ces ténèbres ne sont rien comparativement à celles qui couvrirent alors l’Égypte pendant trois jours. »

 

 

 

 

 

 

 

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