Charles Le Goffic

(1863-1932)

 

Notice biographique extraite de :

Gérard WALCH, Anthologie des poètes français contemporains, 1924.

 

 

 

 

En 1891, dans une de ses subtiles et attachantes causeries du Temps, Anatole France, le maître écrivain, détaillait les origines de Charles Le Goffic, lequel naquit, le 14 juillet 1863, dans la petite ville de Lannion, qui était encore, à l’époque, une ville du Moyen Âge. « Il coula de longues heures, rapportait l’auteur du Lis rouge, à voir, sur les quais, les eaux paresseuses du Léguer caresser mollement les coques noires des côtes et des chasse-marée. Il mena ses premiers jeux dans les rues montueuses, à l’ombre de ces vieilles maisons aux poutres sculptées et peintes en rouge, aux murs que les ardoises revêtent comme d’une cotte d’armes, azurée et sombre. Il courut sur le pont à dos d’âne et à éperons qui, près du moulin, ouvre la route de Plouaret... Par la suite, il étudia. »

« C’est à Paris qu’en 1885 Charles Le Goffic, qui avait alors vingt-deux ans, rencontra Jules Tellier, le merveilleux écrivain si prématurément disparu. En compagnie de Maurice Barrès et de Raymond de La Tailhède, les nouveaux amis fondèrent Les Chroniqueurs, une vivante et curieuse revue qui eut sa bonne part dans le mouvement littéraire du temps, et où notre Lannionnais, que les destinées professorales entraînaient aux quatre coins de la France, publia ses premiers contes et ses premiers vers, à côté du plaisant récit de ses pérégrinations de Paris à Morlaix et de Morlaix à Gap. Déjà des critiques clairvoyants notaient dans ses essais le sens et le goût de la perfection. Un vif succès accueillit son volume de début, Amour Breton, suite de courts poèmes rattachés par un lieu unique, qui, à l’exception de quelques pièces de ton différent, sont pleins de la mélancolie naturelle aux esprits bretons.

« M. Le Goffic exprime ses sentiments et ses rêves dans un langage d’une incomparable pureté et avec une puissance d’émotion en vérité peu commune. Le poète d’Amour Breton est de ceux pour qui le fond ne va point sans la forme et réciproquement. Entre deux ouvrages d’un intérêt plus spécial, des Extraits de Saint-Simon, en collaboration avec Tellier, et un Nouveau Traité de versification (avec M. Thieulin), Charles Le Goffic consacra aux Romanciers d’aujourd’hui un beau livre, gros d’aperçus judicieux et d’ingénieuses déductions. L’écrivain, dont le nom commençait à se répandre, joignait bientôt l’exemple au précepte en publiant Le Crucifié de Kéralès, roman que Académie française, réalisant le vœu des lettrés, honora d’un de ses prix. Cette remarquable étude de caractères et de milieux révélait dans M. Le Goffic, en même temps qu’un peintre délicat et fidèle de rudes et singuliers paysages, un pénétrant analyste des passions humaines. Là encore l’artiste et l’observateur marchaient de pair. Une seconde oeuvre, Passé l’Amour, a définitivement établi le renom de romancier de M. Le Goffic. Sous ses dehors de roman à la manière du XVIIIe siècle et propre à être rapproché des confessions de Mme de Tencin ou de Mme de Souza, Passé l’Amour recèle une histoire douloureuse et incontestablement « vécue », pour user du langage courant.

« M. Le Goffic a publié depuis : La Payse, où l’auteur fait le roman – qui est aussi de l’histoire – de l’émigration bretonne dans les grandes villes de l’intérieur; Morgane, dont l’apparente étrangeté ne déconcerte que si l’on ignore tout ce qui s’agite de trouble et de mystérieux au fond de la conscience celtique; Croc d’argent, qui est – plus encore que le duel de deux races – la lutte émouvante de deux conceptions de la vie; Piphanie, qui met en scène le dernier des légitimistes bretons; de remarquables études économiques et sociales et une pièce de théâtre, en collaboration avec le regretté Gabriel Vicaire. De plus, il a collaboré à de nombreux quotidiens et périodiques.

« À ceux qui eussent craint que le poète ne s’effaçât en lui devant le romancier, la critique et le chroniqueur, M. Le Goffic a répondu en 1900 par la publication d’un nouveau recueil de poésies et de poèmes : Le Bois Dormant, où l’on trouve les vers les plus délicieux du monde et mille preuves que le talent natif du poète d’Amour Breton est arrivé au plus haut point de la perfection dans la simplicité. » (Daniel de VENANCOURT.)

En 1900, Charles Le Goffic fut nommé chevalier de la Légion d’honneur.

 

 

 

 

 

 

 

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