L’assemblée des enfants

 

 

Et ce soir là encore, les enfants s’étant groupés dans le cercle de son regard,

Le Récitant leur caressa le visage, à tous ;

À ceux dont les cheveux sont rouges, et la peau luisante ;

À ceux dont les traits sont déjà flétris, parce qu’ils portent des soucis millénaires ;

À ceux dont les joues sont translucides (il suffirait de les pincer à peine, pour que le sang gicle en rosée vivante...) ;

À ceux qui ont l’odeur du pain frais ;

À ceux qui sentent le lait maternel ;

À ceux qui ont l’odeur du Printemps ;

À ceux dont les yeux sont des fontaines de lumière ;

À ceux qui sont nés aveugles ; à ceux qui sont devenus aveugles pour avoir trop pleuré ;

À ceux qu’un sourire perpétuel illumine ;

À ceux-là qui sont toujours au bord des larmes ;

À ceux qui étaient là, et à tous les autres qui n’étaient pas venus ;

À ceux qui seront sauvés, à ceux qui peut-être seront damnés ;

À ceux qui étaient au monde, et à tous ceux qui attendent dans le secret des cieux et qui ne sont pas encore au monde ;

 

À tous il parla d’une voix de rêve, celle qu’il cache au-dedans de lui et qui est la voix de la Pureté,

Celle-là même dont usent les Anges.

 

À tous ces enfants il parla encore, parce que tous les enfants du monde ont les mêmes yeux,

Des yeux qui font la transparence du monde.

 

Il leur parla de son Ami,

de cet Ami de Légende dont il n’était que l’envoyé.

 

Comme nul ne savait son nom, ils l’appelèrent

                                       L’ABSENT.

 

 

 

Jean AMROUCHE, Étoile secrète, 1983.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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