Tu possédais en vain...

 

 

Tu possédais en vain des richesses sans nombre,

Un cœur naïf et bon, un esprit simple et grand ;

Jamais, pauvre Schlémil, je n’ai lu qu’en pleurant

Ton histoire amusante et cependant bien sombre.

 

On peut se confier au navire qui sombre,

Et, vivant, s’arracher au gouffre dévorant ;

Mais quoi ! dans ce bas monde, ô sublime ignorant,

Tu voulais vivre heureux, et tu n’avais pas d’ombre ?

 

Ah ! le ciel t’inspira quand, fuyant nos cités,

Asile du mensonge aux souffles empestés,

Tu courus embrasser l’éternelle nature,

 

Et, sous l’abri des bois comme au désert en feu,

Pus étaler enfin, sans honte ni souillure,

Ton âme toute nue aux doux regards de Dieu !

 

                                                                     1er juin 1849.

 

 

Edmond ARNOULD, Sonnets et poèmes, 1861.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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