Consolations pour la mort d’un père

 

 

Donc, il s’en est allé, celui qu’on aimait tant !

Il est parti serein, calme, presque content,

          Les yeux clos, les lèvres fermées,

Et sa joie eût été complète, s’il eût su

Comment faire pour disparaître inaperçu

          De celles qu’il avait aimées.

 

Doux père !... S’il eût su comment vous éloigner,

Il serait bien mort seul, et pour vous épargner

          L’horreur du cadavre livide,

Il aurait pris son vol nuitamment, clandestin,

Et vous eussiez pu voir, en entrant, le matin,

          Sa chambre ouverte et son lit vide.

 

Mais ce n’est point ainsi qu’on s’en va. Le devoir

Veut qu’on ait le linceul blanc avec le drap noir

          Et tous les appareils funèbres,

Comme si, lorsqu’il entre en la maison de Dieu,

L’homme, au lieu d’un manteau tissu d’or et de bleu,

          Ceignait un voile de ténèbres.

 

Oh ! que l’homme est étrange, et que nous avons tort

D’attrister le sépulcre et d’enlaidir la mort

          Avec nos cortèges moroses !

L’homme juste devrait entrer dans son sommeil

Entouré de parfums, de chants, en plein soleil,

          Et le front couronné de roses.

 

 

 

Jules CARRARA.

 

 

 

 

 

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