Chants de route

 

 

Quand il faut passer par un bois, la nuit,

Et que sur la route on est sans boussole,

Pour chasser la peur et tromper l’ennui,

On chante, très haut, quelque chanson folle.

 

Pour charmer ainsi plus d’un dur moment,

Chantons, mes amis, en passant la vie,

Chantons les refrains où sonne gaiement

La candeur des gens qui n’ont pas d’envie !

 

Proclamons la guerre aux esprits chagrins ;

Si nous rencontrons quelque ombre méchante

Nous la ferons fuir sous nos pas sereins

Comme fuit la nuit dès que l’oiseau chante.

 

Chantons tous en chœur pour nous étourdir.

Les faiseurs de vers n’ont pas l’âme noire :

Chantons les lauriers qui vont reverdir,

Et les chants d’orgueil, et les airs de gloire !

 

Tels, nous passerons le bois plein d’effrois,

Et, si le serpent se tient aux écoutes,

Il s’ira cacher dans ses antres froids

Tant nous chanterons tout le long des routes !

 

Puis, quand nous aurons atteint le bon Dieu,

Amis, dans ses mains tout étincelantes,

Nous mettrons, afin qu’il sourie un peu,

Notre humble bouquet de chansons vaillantes !

 

 

 

François CASALE.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1891.

 

 

 

 

 

 

 

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