Le soldat

 

(D’après une poésie danoise, d’Andersen)

 

 

On marche au roulement assourdi du tambour ;

Dieu, que c’est loin ! Que la route est longue !

Ô s’il avait la paix, si tout était fini !

Je crois que mon cœur se brise !

 

Je n’ai aimé que lui au monde,

Lui seul, auquel cependant on va donner la mort.

La musique joue, c’est la parade d’exécution,

Et je suis du peloton de service.

 

Voici que pour la dernière fois il lève son regard

Vers les rayons joyeux du soleil de Dieu.

Et voici qu’on lui bande les yeux ;

Que Dieu te donne le repos éternel !

 

Les neuf hommes ont bien mis en joue ;

Huit balles ont manqué le but.

Ils tremblaient tous de pitié, de chagrin,

Mais moi, je l’ai atteint en plein cœur.

 

 

 

Adalbert de CHAMISSO, Choix de poésies,

traduction et introduction de René Riegel,

Aubier, 1950.

 

 

 

 

 

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