Intimité

 

 

Dans quel tiroir ai-je caché

le parchemin de mes rancœurs ?

Un vieux parfum de solitude

enlace le tic-tac des heures nostalgiques.

 

La lampe saigne à flots

sur mon livre écorné.

J’ai perdu la page des psaumes naïfs

que l’enfant chantait

          à la Vierge du quinze Août.

 

Et je rêve d’un songe aux contours étrangers

comme un chemin de Bethléem

          sous les pas des bergers.

 

La phalène complice

lance le manège

des ombres chinoises.

 

          Le vent du nord

          sonne du cor,

          souffle sa hargne

          au front des cheminées :

Fanfare tranche-lunes,

meutes des jours blessés aux trousses de la nuit.

 

          Taïaut ! Taïaut ! Taïaut !

          

          A-t-on tué le loup-garou

          qui lapidait mes tourterelles

          au temps de pigeon vole ?

          

          Taïaut ! Taïaut !

          A-t-on tué l’ogre géant

          qui rôtissait mes espérances

          aux feux de la Saint-Jean ?

          

          Taïaut !...

 

          ...Mais c’est la girouette

          qui triche les étoiles

          au cabaret de Hurle-Vent...

          

          ...Crépite la bûche

          sous la crémaillère,

          un serpent déroule

          ses anneaux de feu

          en contant la pomme et le paradis...

 

          ...L’horloge a sonné l’heure du rosaire.

 

 

 

Jacques ÉLAN,

L’archet brisé,

Unimuse, 1958.

 

 

 

 

 

 

 

 

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