Le calvaire

 

 

Mon Dieu aujourd’hui loin de moi

Qui dormez encore à Saint-Paul,

En la rue douce où fut mon toit,

En ma rue blanche comme un pôle,

 

Mon Dieu, qui les avez connus

Les primes matins de ma vie,

 

À son aube quand j’étais nu

De chair comme de cœur aussi,

 

Mon Dieu encore ici c’est moi

Mais las ! et de tout revenu,

 

Des jours en long que j’ai vécus

Plus en la peine qu’en la foi.

 

                               *

                            *    *

 

Mon Dieu j’avais trop espéré

Des matins qui m’avaient souri,

 

Et je me suis ainsi trompé

Sur la voie loin que j’ai suivie,

 

Et tout est mort ou s’est allé

De ce que jadis j’ai aimé ;

 

Et maintenant voici le soir

Et mon heure qui va sonner,

 

Et mon âme qui va entrer

Là-bas, où la nuit se fait noire,

 

Mon Dieu mien, de la rue Saint-Paul,

Donnez-moi vous en long couché,

 

Là-bas au calvaire du môle

Comme aux marins que vous aimez,

 

Le sommeil doux qu’après la vie

J’ai de tous les temps espéré.

 

 

 

 

Max ELSKAMP.

 

Recueilli dans La poésie francophone

de Belgique 1804-1884,

par Liliane Wouters et Alain Bosquet,

Éditions Traces, 1985.

 

 

 

 

 

 

 

 

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