Psaume de l’imprévoyance

 

 

Celui qui donne sera sauvé.

 

Celui qui mangeait son blé en herbe, celui qui écrivait Amour sur le sable,

Celui qui voulait épouser le vent, peigner la vague, prendre la lune entre ses dents,

Celui qui mettait la charrue devant les bœufs

Mourront comme leurs frères prudents, du même souffle suspendu

Du même abandon de leur cœur à la flamme de l’infini,

Ô mes frères en désir et en folie, qui payez le don d’amour d’un simple chant,

Vous êtes la nation de cigales ivres de la beauté divine, lancée dans l’azur bondissant,

Ô imprudents, imprévoyants funambules du chant,

Vous avez donné aux pauvres le blé de joie, vous avez écrit Amour sur la plage du ciel,

Vous avez peigné le nuage, apprivoisé la vague,

Vous avez rapporté tant d’étoiles entre vos dents...

C’est vous qui avez cru en la Parole; c’est vous qui avez choisi la louange et l’amour,

La grande main d’ombre, bienveillante, vous lancera parmi les mondes musiciens,

Vous blessera d’une lance de diamants, d’une blessure suave

D’où ruisselleront les visions les plus pures

Vous serez les bouches chantantes de l’Éternité.

Tombera en vous, à chaque aurore, la manne irisée de l’inspiration.

Les fourmis qui vous maudissaient aux guichets des banques,

Les honnêtes fourmis laborieuses, les quotidiennes fourmis vous nourriront de blé et de miel.

 

Qui s’oublie connaîtra la joie.

 

 

 

Pierre-Louis FLOUQUET.

 

Paru dans Paroles pour Marie,

textes recueillis par Michel Dubost,

Droguet-Ardant, 1978.

 

 

 

 

 

 

 

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