Au poète

 

 

                   Que m’importe aujourd’hui qu’on me haïsse ou m’aime ?

                                     Mon cœur se trouve à bout ;

                   Pour m’avoir trop de fois étreint, la douleur même

                                     N’étonne plus mon goût.

 

                   J’ai fait en vain le tour de toutes les sagesses,

                                     Et de tous les plaisirs ;

                   Les livres m’ont déçu, je suis las des caresses,

                                     Et je voudrais mourir.

 

                                                CHARLES GUÉRIN.

 

 

Oh ! ne blasphème pas, poète à l’art divin,

Contre les saints accords de ta lyre sublime.

Tu chantes pour le siècle où l’homme au rôle vain,

Sans toi, serait plus bas descendu dans l’abîme.

 

Et tu chantes pour nous, les poètes infimes,

Qui marchons sur tes pas dans l’idéal chemin,

En nous montrant du doigt les sidérales cimes

Où ta Muse converse en sa langue d’or fin.

 

Si les hommes souvent, en leur abandon lâche,

Rendent vive la plaie où saigne notre cœur,

Il restera toujours pour aider à la tâche

 

Quelque Cyrénéen, compagnon de douleur.

Poète, honore-toi des crachats â ta face,

Car, pour demain, la gloire, en l’ombre, les efface.

 

 

 

Amédée JASMIN, Au pays des ailes, 1915.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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