Le réveil de l’ancêtre

 

 

            Sous le sommet

Du vieux toit, au grenier des mansardes,

Sont des lits de bois noir, des tapis et des hardes :

C’était là que l’aïeul, le vieux maître, dormait.

 

C’était là qu’il couchait dans le temps des semailles.

Le lit étant plus dur, il se levait plus tôt,

Donnait son cœur à Dieu, puis gagnait aussitôt

Les champs où se livraient de fécondes batailles.

 

Sur ces lits, il aimait se reposer aussi

Par les jours de moisson, où, de ses mains robustes,

Il engerbait les richesses augustes

            Dont le soir était ébloui.

 

De la fenêtre, que nul ombrage ne voile,

Avant de retomber dans l’oubli, jusqu’au jour,

            Il regardait avec amour

Chaque gerbe luisant comme une grande étoile...

 

            Et quand ses membres assoupis

Se retrempaient enfin dans la douceur des trêves,

            L’ancêtre faisait de beaux rêves

Où dans un champ d’azur naissaient des flots d’épis...

 

Toute l’ambition féconde de la race

Ressuscitait en lui quand le jour éclatait,

            Et quand la fenêtre mettait

            De l’aube sur sa face.

 

Alors il se levait. Mais l’horloge au teint pâle

N’a pas fait retentir pour lui sa voix sonore,

Car il reconnaissait la marche de l’aurore

Au rayon du soleil qui tombait sur son lit.

 

 

 

Blanche LAMONTAGNE.

 

 

 

 

 

 

 

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