La colonne

 

 

Jésus-Christ mis à nu, les tempes mutilées,

Garrotté sur le vil poteau des scélérats,

Sent pleuvoir, sur son corps qui frémit, des volées

De coups, qu’un grand bourreau frappe à revers de bras.

 

Le fouet d’airain fend l’air, siffle avec frénésie,

Et s’abat ; la poitrine, au soufflet du métal,

Rend le son d’une chair nerveuse et cramoisie

Qu’un valet de boucher mortifie à l’étal.

 

Bientôt un sang vermeil perle, écume, ruisselle,

Et rougit, jaillissant des vaisseaux écorchés,

Le bras droit du licteur, du poing jusqu’à l’aisselle,

Et tombe avec des brins de peau vive arrachés.

 

À travers l’épaisseur graisseuse et musculaire

Dont elle a déchiré les multiples réseaux,

La verge, dont l’élan furieux s’accélère,

Ébranle cent vingt fois la charpente des os.

 

Et quand Pilate, enfin, fit traîner la victime,

Pantelante devant le peuple rugissant,

Il dit : « Je ne découvre en cet homme aucun crime :

« Le trouvez-vous assez puni d’être innocent ? »

 

 

 

Léonce de LARMANDIE.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1893.

 

 

 

 

 

 

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