SUR UNE INSCRIPTION

 

 

Voici le noir bouquet des Pins ; voici la grille

Et l’enclos. Tout ici parle de toi, ma fille.

Les syllabes d’argent de ce nom rauque et doux

Comme un roucoulement de colombe : Rûn-Rouz,

C’est toi, c’est ta petite main mal assurée

Qui, sur le clair granit des piliers de l’entrée

Les traça lentement, religieusement...

Ô vestiges sacrés, le ciel vous soit clément !

Épargne, ô vent de mer, vent aux brusques coups d’aile,

La frêle inscription où palpite un peu d’elle,

Et que l’averse aux dards aigus l’épargne aussi,

Afin que chaque année, en revenant ici

Et retrouvant au seuil de l’enclos solitaire,

Qui lui fut, avant l’autre, un paradis sur terre,

Ces mots tracés par elle et du temps respectés,

Nous croyions qu’elle a feint de nous avoir quittés,

Qu’elle se cache-là, par jeu, sous quelque feuille

Et que c’est elle encor dont la voix nous accueille,

Tout bas, du nom béni, du nom cher entre tous,

Le dernier qui flotta sur ses lèvres : Rûn-Rouz.

 

 

 

                                                       Charles LE GOFFIC.

 

                                          Paru dans La Muse française en 1922.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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