Le vrai, le beau, le bien

 

 

                                                           À un sceptique.

 

Si tu fermes l’oreille à de vaines paroles

D’un ministre divin prêchant son Rédempteur,

Si tu ne peux souffrir tous ces discours frivoles

Que l’intérêt inspire au plat complimenteur,

Cherche la Vérité dans la simple Nature,

Retrouve cet amour dont ton cœur est sevré ;

Œuvre du Créateur, aime la créature,

             Et tu croiras au Vrai...

 

Rien ne te sourit plus à travers l’existence. :

Tu doutes du Bonheur, même de la Beauté !

Accuse, si tu veux, la femme d’inconstance...

Le jour de l’abandon, maudis sa cruauté !

Mais ne va point nier le pouvoir de ses charmes...

Plutôt que d’aspirer au calme du tombeau,

Regarde en ses grands yeux le reflet de tes larmes,

             Et tu croiras au Beau...

 

La Vertu, j’en conviens, est un trésor plus rare

Si l’on veut la trouver dans sa perfection ;

L’homme a toujours en lui quelque ferment barbare

Prêt à ternir l’éclat d’une bonne action :

Mais il n’en accomplit pas moins de grandes choses :

Évoque le Passé : rappelle-toi combien

Se sont sacrifiés pour les plus nobles causes,

             Et tu croiras au Bien...

 

 

 

Félicien LUCRON.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1895.

 

 

 

 

 

 

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