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Je te salue, étoile


Fragments


Je te salue, étoile,
Qui nouvelle apparaît,
À genoux sous ton voile,
Vierge de Nazareth.

Ô Vierge bienheureuse,
Quel est donc cet esprit ?
En ta dextre pieuse
Un lis s’épanouit.

Vierge sainte, n’hésite :
Sauve-nous au plus vite
Des fins du réprouvé,
Reçois tôt cet ave,
Quoique le plus étrange
Qui du serpent nous venge.
C’est fait, j’entends ta voix.
C’est fait, je vois la Croix.
Ce n’est plus au nom d’Ève,
C’est au tien qui relève,
Que ma Mère je vois !

Mère la plus aimable,
Pour avoir notre Dieu
Mis au monde en étable,
L’hiver, de nuit sans feu.

Ô le dur privilège!
Quel Noël ! sous la neige
Réchauffer de Jésus
Les petits membres nus.

Mais quoi ? des luths s’entendent !
Ô Porte des Élus,
Rois, bergers te demandent ;
D’autant que tous perclus
Dans le siècle où nous sommes
Sans toi, nous, pauvres hommes,
Ne nous sauverions plus !

Or donc le plus coupable
Soit par toi détaché.
Tiens l’aspic à ta table,
En ton lit soit couché.
Aux aveugles des rues
Fais du moins belles vues,
Voir qu’à nos obstinés 1
Tes sourds soient pardonnés.
Des guerres et des pestes,
De nos fléaux funestes,
Écarte les tableaux.
Jette aux vers des tombeaux
Les faux biens périssables,
Et des biens véritables
Choisis-moi les moins beaux.

Mais à Cupide obscène,
Injuste en son avoir,
Montre que veuve en peine,
Enfant en sa chaumière,
Ont chez toi bonne Mère
Qui sait les protéger
Et pourrait les venger [...]

Ô Vierge singulière
Dont l’humble humilité
Est jardin de lumière
En plus noire cité !
Quoi ! tu n’es point altière !
Eh quoi ! tu n’es point fière
De si grand’ pureté !
Oh ! pour ta grand’ bonté,
Sois donc notre Bergère,
Et sous ta panetière,
Houlette et long manteau,
Change un sanglant taureau,
Change un tigre plein d’ire,
Ce qui revient à dire :
Change l’homme en agneau.
Délivre-nous d’un monde
Qui foule la pudeur !
Autre Jeanne plus monde 2
Sus au fornicateur ! [...]
Si que 3, par ton canal
Sortis de cette impasse,
(Notre-Dame de Grâce,
Daigne tous nous bénir !)
Chacun s’aille esbaudir
Le jour de la Victoire
Au séjour d’une gloire
Qui ne doit point ternir !



Germain NOUVEAU.




NOTES

1. Sens ancien de « obstination » : « Fais que devant nos prières obstinées, ceux qui sont sourds à ta voix soient pardonnés. »
2. Plus pure.
3. Si bien que.

 

 

 

 

 

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