La fin de nos misères

 

 

Venez, ô les souffrants, ô les déshérités,

Ô les êtres mal faits pour l’âpre résistance,

Les malades, les gueux, les esprits tourmentés,

Les vaincus du combat fatal de l’existence

Venez tous, le poète a le cœur plein d’amour,

Et ne méprisez pas cette voix qui s’élève,

Cette voix qui vous dit : Après la nuit, le jour ;

Après le mal, le bien. Non, ce n’est pas un rêve,

Un mensonge pieux : croyez au ciel plus beau,

À l’aurore plus rose, à l’éternelle vie !

Car le corps franchissant les portes du tombeau,

Vers l’horizon bleu l’âme, étonnée et ravie,

Montera doucement !

                                  – Alors, ô malheureux !

Vous trouverez un sort autre que sur la terre,

Toi, poète, chantant, hagard, tremblant, fiévreux,

Martyr de l’idéal ; toi, penseur, solitaire,

Courbé sur les raisons et les nombres obscurs ;

Toi, sacrificateur mystérieux des temples ;

Toi, vierge qui, cachée à l’ombre des grands murs,

Dédaignes les amours de la terre, et contemples

Le divin bien-aimé ; toi, soldat que la mort

Attend dans les combats : Ô vous tous, dont les hommes

Disent : Ils sont des fous, vraiment ils ont bien tort

De se donner du mal sans nul profit : nous sommes

Plus raisonnables qu’eux. Ô vous tous, fous sublimes

Dont ce siècle d’argent n’a pas flétri les cœurs,

Vous tous, dont les esprits demeurent sur les cimes,

Vaincus du monde : alors vous serez les vainqueurs !

 

 

 

Gabriel de PIMODAN, Lyres et Clairons.

 

 

 

 

 

 

 

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