Ballade de Noël

 

 

                                                 « Tant l’on crie Noël qu’il vient. »

                                                                  François VILLON.

 

 

C’est vrai qu’il vient et qu’on le crie !

Mais non sur un clair olifant,

Quand on a la gorge meurtrie

Par l’hiver à l’ongle griffant.

Las ! Avec un râle étouffant

Il est salué chaque année

Chez ceux qu’il glace en arrivant,

Ceux qui n’ont pas de cheminée.

 

Il jasait, la mine fleurie,

Plus joyeux qu’un soleil levant,

Apportant fête et gâterie,

Bonbons, joujoux, cadeaux, devant

Le bébé riche et triomphant.

Mais quelle âpre et triste journée

Pour les pauvres repus de vent

Ceux qui n’ont pas de cheminée.

 

Heureux le cher enfant qui prie

Pour son soulier au nœud bouffant,

Afin que Jésus lui sourie !

Aux gueux, le sort le leur défend.

Leur soulier dur, crevé souvent,

Dans quelle cendre satinée

Le mettraient-ils, en y rêvant,

Ceux qui n’ont pas de cheminée ?

 

                          ENVOI

 

Prince, ayez pitié de l’enfant

Dont la face est parcheminée,

Faites Noël en réchauffant

Ceux qui n’ont pas de cheminée.

 

 

 

Jean RICHEPIN, La chanson des gueux,

Fasquelle, 1876.

 

 

 

 

 

 

 

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