Paraphrase du Te Deum

 

À MONSIEUR DE VALENCE : POUR CHANTER EN SON ÉGLISE

 

 

Ô Seigneur Dieu, nous te louons

Et pour Seigneur nous t’avouons.

Toute la terre te vénère

Et te confesse éternel père.

 

Toute la puissance des cieux,

Tous les archanges glorieux,

Chérubins, séraphins, te prient,

Et sans cesse d’une voix crient :

 

Le Seigneur des armes est saint,

Le Seigneur des armes est craint,

Le ciel et la terre est remplie

Du los de sa gloire acomplie.

 

Les saints Apôtres honorés,

Les Martirs de blanc décorés,

La troupe de tant de prophètes

Chantent tes louanges parfaites.

 

L’église est partout confessant

Toy père grand Dieu tout-puissant,

De qui la majesté immense

N’est que vertu, gloire et puissance.

 

Et ton Fils de gloire tout plein,

Vénérable, unique et certain,

Et le Saint-Esprit qui console

Les cœurs humains de ta parole.

 

Christ est roy de gloire en tout lieu,

Christ est l’éternel fils de Dieu

Qui, pour oster l’homme de peine,

A pris chair d’une Vierge humaine.

 

Il a vaincu par son effort

L’eguillon de la fière mort,

Ouvrant la maison éternelle

À toute ame qui est fidelle.

 

Il est à la dextre monté

De Dieu près de sa majesté,

Et là sa ferme place il fonde

Jusqu’à tant qu’il juge le monde.

 

Ô Christ éternel et tout bon,

Fay à tes serviteurs pardon,

Que tu as par ta mort amère

Racheté de rançon si chère.

 

Fay nous enroller s’il te plaist

Au nombre du troupeau qui est

De tes esleus, pour avoir place

En paradis devant ta Face.

 

Las ! Sauve ton peuple, ô Seigneur !

Et le bénis de ton bonheur,

Regis et soustiens en tout âge

Ceux qui sont de ton héritage.

 

Nous te bénissons tous les jours

Et de siècle en siècle toujours

(Pour mieux celebrer ta mémoire)

Nous chantons ton nom et ta gloire.

 

Ô Seigneur Dieu ! sans t’offenser

Ce jour icy puisse passer

Et par ta sainte grâce accorde

À nos péchés miséricorde.

 

Seigneur tout benin et tout doux,

Respan ta pitié desus nous

Ainsi qu’en ta douce clemence

Avons toujours notre espérance.

 

En toi, Seigneur, nous espérons,

T’aimons, prions, et adorons,

Car ceux en qui ta grâce abonde

N’iront confus en l’autre monde.

 

 

 

Pierre de RONSARD.

 

 

Recueilli dans Anthologie de la poésie catholique

de Villon jusqu’à nos jours, publiée et annotée

par Robert Vallery-Radot, Georges Grès & Cie, 1916.