Ô toi parmi ces soirs lunaires...

 

 

Ô toi parmi ces soirs lunaires,

Quand la brise éveillée aux bords des lacs tremblants

Fait vibrer dans l’air bleu la subtile lumière

Que pleurent les étoiles d’or, au firmament.

 

Ô toi dans les frissons inconsistants qui passent

Le long des soirs lunaires où rêve mon amour

Ô toi dont les frissons aux frissons de l’espace

S’unissent par les fins désolantes de jours,

Pour enivrer aussi mon âme à jamais lasse !

 

Ô toi ! Serait-ce toi ce rêve que j’ai fait

Et cet amour qui me torture en m’enivrant

Ô toi ! Et cette incompréhensibilité

Et ce désir qui hurle et cette piété

Qui prie et tout ce mal, avec cette bonté

Ô toi dans ce vouloir divin d’aller vers Dieu

Et dans cette faiblesse où le mal est profond !

 

Ô fuir à travers champs vers l’horizon des cieux

Avoir autant de ciel au cœur que dans les yeux

Aller ayant l’espace infini devant soi

N’avoir d’autres espoirs : et n’avoir d’autre but

Que la Beauté, chère âme, et n’avoir d’autre joie

Que de t’aimer en Dieu et de L’aimer en toi.

Et te mener ainsi par ces lointains sentiers

Vers la joie éternelle et le bonheur entier.

Au lieu de t’entraîner à ces choses méchantes

Et de te laisser être aux bords de ces abîmes

Te prendre par la main, ma chère enfant perdue

T’enseigner d’une voix par toi seule entendue

Éveiller la Beauté pure afin qu’elle chante

En toi, voix de ton cœur où Dieu s’est endormi

T’enseigner l’espérance et la sérénité

Allumer le flambeau de toute vérité,

Te montrer comment croire et comment adorer

Comment être très bonne ainsi de Dieu te veut,

Mon amour. Et c’est là mon rêve de Bonté !

 

 

 

Hector de SAINT-DENYS GARNEAU, Œuvres,

édition critique établie par Jacques Brault et Benoît Lacroix,

Presses de l’Université de Montréal, 1971.

 

 

 

 

 

 

 

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