Lisons l’Évangile

 

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

 

Jean-Paul TERSANNE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le Christ prêche au milieu de la foule : La mère de Zébédée s’approche de lui avec ses deux fils et se prosterne : « Ordonne, dit-elle, que mes deux fils soient assis l’un à ta droite, l’autre à ta gauche dans ton royaume » ; Jésus répondit : « Vous ne savez pas ce que vous demandez ; pouvez-vous boire le calice que je vais boire ? » Ils répondirent : « Nous le pouvons ». Il leur dit : « Vous le boirez, mais être à ma droite et à ma gauche, ce n’est pas à moi, c’est à mon Père de vous l’accorder. Sur la terre, les chefs tiennent les peuples sous leur domination... Parmi vous, celui qui voudra être grand sera votre serviteur... Le Fils de l’Homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir. »

S. Matthieu, Chap. XX.    

 

Les mères furent toujours ambitieuses pour leurs enfants. Elles font pour eux hardiment et sans rougir les démarches qu’ils n’osent pas faire eux-mêmes. Celle-ci a imaginé que ses deux grands fils pouvaient fort bien devenir des chefs dans le futur royaume dont parle quelquefois dans ses conversations le Maître. C’étaient des places à ne pas laisser saisir par les autres apôtres, aussi la mère et ses enfants ont-ils sans doute comploté en famille durant les jours précédents celle requête audacieuse et inattendue.

Être chefs, être rois, commander aux peuples !!! Quelle fierté pour elle, quel orgueil pour eux si un jour ils gouvernent le monde aux côtés du Messie !

Ce n’est pas essentiellement un mal de convoiter les premières places ; aussi Jésus ne les repousse-t-il pas précisément ; il ne leur dit pas non. Il se contente de leur faire connaître les qualités indispensables que doit posséder celui qui veut être un chef. Pour être un chef, il faut commencer d’abord par se dévouer, il faut savoir « boire le calice », c’est-à-dire se sacrifier, s’entraîner à l’effort, s’oublier. Il faut commencer par accomplir de petites tâches obscures et pénibles, par être un bon ouvrier, un bon associé, un bon citoyen ; il faut commencer par bien obéir, par se charger des besognes les moins intéressantes, des lourds fardeaux (Jésus s’est chargé de la Croix) ; il faut commencer par bien exécuter son petit travail quotidien et professionnel.

Et quand on a bien fait tout cela ; il ne faut pas encore se figurer que ce sacrifice, ce dévouement, ces travaux nous donneront un droit strict de commander aux autres et d’exiger le pouvoir.

Non, le pouvoir : aucun homme n’a de lui-même le droit de le prendre ou de le donner.

Sans doute on peut y penser, y aspirer à cause des services rendus. Sans doute les hommes peuvent désigner, en suivant les méthodes qui leur paraissent les meilleures, celui qui exercera l’autorité. Mais l’autorité elle-même, sa consécration, la consécration du chef, quel qu’il soit, elle ne peut venir que de Dieu seul : « C’est mon Père qui a le pouvoir de l’accorder », dit Jésus.

Et quand un homme est devenu le chef, lorsqu’il gouverne, quelle que soit la société, grande ou petite, dans laquelle il commande ; que ce soit une commune, une famille, une nation, il faut que le chef se souvienne toujours qu’il n’est pas le chef pour les honneurs, pour son plaisir, pour lui-même :

« Celui qui voudra être grand parmi vous, sera votre serviteur », a dit Jésus.

On le prononce souvent, ce mol, dans les milieux laïques et profanes, mais on y oublie trop Celui qui l’a trouvé, Celui qui l’a prononcé le premier, Celui qui nous l’a appris.

Pour être un chef et un bon chef, pour être au-dessus des autres, pour mériter et garder la place qu’on occupe dans toute société de village ou de ville, il ne faut pas penser à soi-même, il faut s’oublier, se sacrifier, peiner, il faut se dévouer au bien commun.

C’est Jésus qui l’a dit depuis vingt siècles : « Il faut SERVIR ! »

 

 

Jean-Paul TERSANNE.

 

Paru dans Les Causeries en 1927.

 

 

 

 

 

 

 

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