Credo

 

 

                         « Acceptant votre loi qui m’indigne et m’effraie,

                        Je baisserai, soumis, mon front et mon regard. »

                                                                                         (M.-L. V.)

 

 

Je n’ai pas retrouvé ma foi docile et calme,

Ma blanche foi d’enfance et son parfum de lis,

La foi de ceux qui vont, simples, tels que des fils,

Vous porter leur amour comme une verte palme,

 

Et je Vous cherche en vain depuis que j’ai souffert,

Que j’ai perdu ma force avec ma joie intime

Et que l’humanité me semble une victime

Dont, à vos pieds, le sang jaillit sous votre fer.

 

J’entends toujours ses cris, ses plaintes pathétiques

Qui, pour Vous accuser, ainsi que ses sanglots,

Montant vers Vous, pareils au bruit croissant des flots,

Couvrent les sons sacrés de l’orgue et des cantiques.

 

Vous êtes la Justice, ou vous n’êtes pas Dieu :

Par quelle loi, pour nous trop terrible ou trop haute,

Devons-nous expier, nous, innocents, la faute

Qui nous a fait bannir de l’Éden au seuil bleu ?

 

Si la douleur rend noble et si l’on est par elle

Purifié sur son bûcher mystérieux,

Pourquoi mettre, ô Bonté, pour nous déchirer mieux,

Cette soif de bonheur en nous, si naturelle ?

 

Vous observez, serein, voilé de votre azur

Où votre majesté dominatrice habite,

Nos désespoirs qu’empli d’une pitié subite,

Secourrait aussitôt l’homme au cœur le plus dur.

 

Est-il vrai qu’aucun d’eux, quel qu’il soit, ne vous touche

Ou que vous refusez d’écouter leur appel ?

Vous êtes impassible ou vous êtes cruel,

Et les mots de prière expirent sur ma bouche !

 

Mais moi qui ne sais rien, qui ne peux rien savoir,

Je sens toujours plus lourd mon front de condamnée,

Car sans Vous l’on n’a plus, pour fuir sa destinée,

Qu’à se réfugier au fond du néant noir.

 

Comme un voyageur marche, exalté par l’envie

De découvrir la mer qui brille, immense, au loin,

J’ai de votre existence un trop brûlant besoin :

Il faut que Vous soyez, Flamme et Lumière, ô Vie !

 

Et, me laissant tomber dans mon doute à genoux,

Malgré la lutte obscure où notre ferveur sombre,

Malgré la Mort, ô Dieu, que vous fîtes si sombre,

Je crois en Vous ! Je crois en Vous ! Je crois en Vous !

 

 

 

Marie-Louise VIGNON,

La Douleur solitaire : La Mort qui passe.

 

 

 

 

 

 

 

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