La source

 

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

 

Joseph WENDLING

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR une brûlante journée d’été, trois voyageurs s’étaient arrêtés dans un bois, près d’une source, pour se désaltérer et pour se reposer. Non loin d’elle, ils découvrirent l’inscription suivante, qu’une main inconnue avait tracée sur la roche :

 

            Passant ! qui que tu sois,

            Ressemble à cette source !

 

« Voilà assurément un conseil fort judicieux, dît l’un des voyageurs, mais qui peut s’interpréter de bien des façons. Comment ressemblerons-nous à cette source ???

 

– C’est bien simple ! répliqua l’un de ses compagnons. Oyez ma façon :

 

Nous sommes arrivés ici, mourants de soif et de fatigue ! La source a étanché notre soif, restauré nos forces. Nous lui ressemblerons si comme elle nous soulageons ceux qui souffrent.

 

Oh ! que cette eau est pure et limpide, fit à son tour le deuxième voyageur : elle reflète mon visage aussi fidèlement que le meilleur des miroirs. Nous ressemblerons à cette source si notre cœur est pur comme son eau et sincère comme son reflet.

 

Quant à moi, reprit le troisième voyageur, quand je contemple cette source dans l’accomplissement de la tâche et de la destinée qui sont sa raison d’être ici-bas, je ne puis m’empêcher d’admirer son obéissance et sa fidélité aux lois du Créateur. Voyez plutôt :

 

Dieu en la créant lui a dit : ta tâche sera le labeur incessant ; ta destinée, le continuel sacrifice de toi-même ; va, coule, prie, chante, arrose, féconde, donne-toi sans mesure !

 

Et elle va jour et nuit sans relâche ; elle coule avec un murmure doux et discret, qui berce nos sens ; c’est sa prière à elle, son perpétuel refrain d’amour, son hymne de reconnaissance au Créateur.

 

Et tout en coulant, tout en clapotant en cadence ses interminables couplets monotones, elle s’épand en un long ruisseau argenté, elle pénètre et féconde la prairie qu’elle arrose, caresse l’herbe et les fleurs qu’elle aime, offre à chacun son onde fraîche et réconfortante ; l’alouette et le passereau y baignent leurs ailes, le merle et l’hirondelle y mirent leur manteau de velours ; tous s’y abreuvent avec délices.

 

Et elle coule toujours, elle coule sans cesse, obéissant à sa destinée, triste ou gaie, comme le temps qu’il fait, comme la saison qui passe, mais se prodiguant, inlassable, à tous venants, personnes ou choses, qu’elle rencontre sur sa route.

 

Nous ressemblerons à cette source si, comme elle, nous accomplissons fidèlement la tâche pour laquelle le Ciel nous a créés ; si, comme elle, nous savons travailler et prier, chanter et aimer :

 

            Travailler avec courage,

            Prier avec ferveur,

            Chanter avec reconnaissance,

            Aimer avec désintéressement.

 

 

 

Joseph WENDLING, La source.

 

Paru dans L’Ange gardien en 1922.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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