L’enfant perdu

 

 

La Vierge, devant qui s’abaissent les anges du ciel, triste et seule, cherche partout l’Enfant-Dieu qui s’est perdu hier au soir en revenant de cette fête si grande et si belle. Elle le cherche parmi les femmes, le demande dans les rues.

– Qui a vu un enfant, dit-elle, perdu depuis hier au soir, ayant des cheveux d’or, des yeux longs et grands, un front beau et serein, semblable au soleil.

Une femme lui répond :

– Il a passé par ici hier au soir ; il allait demandant l’aumône ; il disait : « À qui me donnera, je donnerai des biens qui valent bien plus, je les lui tiens réservés dans le royaume de mon père. »

Je sortis sur la porte avec du pain, pour lui donner l’aumône. Je le vis si petit, tremblant à l’air froid, car le soleil allait se coucher et la nuit approchait. Je lui dis : « Entre, mon chéri, pour toi ma porte s’ouvre. »

Il entra et s’assit sur le sol, il ne trouva pas mieux pour s’asseoir.

– Qui es-tu ? lui demandai-je.

Il me répondit comme un ange :

– Je suis fils du Père Éternel, une Vierge est ma mère. On m’appelle Jésus, et je viens pour te sauver.

Je lui préparai un lit avec grand soin, il ne voulut qu’une natte de paille d’Alicante, pour oreiller, une pierre. Avec cela il a assez. Il dormit toute la nuit d’un sommeil très suave, et le matin, quand je m’éveillai, il me dit bonjour en me bénissant et me laissa avec Dieu. Il a emporté mon cœur, car il défaille d’amour.

La Vierge partit de là, plus consolée qu’auparavant, le cherchant par les rues. Où vint-elle à le trouver ? Parmi les sages les plus grands. De là, on l’emporta en triomphe auprès de sa mère.

 

 

 

 

Fernan CABALLERO,

Contes andalous.

 

Paru dans Les grands écrivains

de toutes les littératures,

2e série, tome 3e, 1888.

 

 

 

 

 

 

 

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