La perdrix et ses petits

 

 

             « Taisez-vous, disait la perdrix,

            Un jour d’orage, à ses petits

Qui jabotaient, murmurant de la pluie :

            Voulez-vous, dans votre folie,

Régler le temps qu’il doit faire ici-bas ?

            Et l’ordonnateur des frimas

Sait-il donc moins que vous, présomptueuse race,

            Ce qu’il faut, ce qu’il ne faut pas ?

Évitez le panneau, le fusil, la tirasse,

            Voilà votre important devoir ;

      Remplissez-le et laissez pleuvoir ;

Songez même que c’est pour votre bien, peut-être,

      Qu’il pleut ainsi du matin jusqu’au soir. »

      Disant ces mots, la Perdrix voit paraître

      Un chien couchant, qui vient à pas de loup :

       « Partons, dit-elle, et prévenons le coup. »

Elle part, on la suit ; la compagnie entière

S’élève dans les airs, et dans le même instant

            Certain cliquetis qu’on entend,

            Fait frissonner la pauvre mère :

            C’est un fusil qui se détend ;

      Mais, par bonheur la poudre meurtrière

      Était humide, et le feu ne prit point.

      Cet incident arriva bien à point

      Pour le bonheur de la famille ailée

      Qui, rendant grave au ciel d’être mouillée,

      Reconnut qu’il ne faut se dépiter de rien,

            Que rien n’est stable dans la vie,

            Et que ce qui nous contrarie

            Prépare souvent notre bien.

 

 

 

NIVERNAIS.

 

Recueilli dans

Choix de poésies morales

et religieuses, 1837.

 

 

 

 

 

 

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