La jeune fille revient

 

 

La jeune fille revient de chez son amant – Ses mains sont rouges, sa mère lui demande : – « Mon enfant, pourquoi ces mains rouges ? » – La fille répond : « J’ai cueilli des roses – Les épines m’ont déchiré les mains » – Une autre fois, elle revient de chez son amant – Ses lèvres sont rouges, sa mère lui demande : – « Mon enfant, pourquoi sont rouges tes lèvres ? » La fille répond : « J’ai mangé des baies – Et leur suc m’en a coloré les lèvres » – Une fois encore, elle est revenue de chez son amant – Ses joues sont très pâles, sa mère lui dit : – « Mon enfant, pourquoi as-tu les joues pâles ? » – « Ô mère, fais creuser une tombe – Pour m’ensevelir avec une croix – Et sur cette croix grave ces paroles : – « Un jour elle vint avec ses mains rouges – Car son amant les avait serrées entre les siennes – Un jour elle revint avec ses lèvres rouges – Car son amant les avait ardemment baisées – Un soir enfin elle revint les joues pâles – Car son amant l’avait trahie. »

 

 

 

Johan Ludvig RUNEBERG.

 

Traduit du suédois par Jean-Clarence Lambert.

 

Recueilli dans Anthologie de la poésie suédoise, Seuil, 1971.