Citations et extraits

 

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

 

Vladimir SOLOVIEV

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Et la lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont point comprise. »            

(JEAN I, 5.)             

 

Pour que le principe divin l’emporte vraiment sur la volonté mauvaise et la vie de l’homme, il faut qu’il se manifeste pour l’âme comme une force vivante et personnelle, capable d’y pénétrer et de le posséder, il faut que le Logos divin n’exerce pas seulement sur l’âme une influence extérieure, mais qu’il naisse dans l’âme elle-même, qu’il ne se borne pas à la limiter et à l’éclairer, mais qu’il la régénère. Or, comme l’âme de l’homme naturel n’apparaît réellement que dans la pluralité des âmes individuelles, l’union réelle du principe divin avec l’âme doit aussi avoir une forme individuelle et personnelle, le Logos divin doit naître comme un homme réel et individuel. Dans le monde physique, le principe divin de l’unité s’était manifesté d’abord dans la force de gravitation qui groupe les corps par une impulsion aveugle, puis dans celle de la lumière, qui dévoile leurs propriétés réciproques, et, enfin, dans celle de la vie organique, où le principe formateur pénètre la matière, et, après une longue série de formes, donne naissance à l’organisme physique parfait de l’homme. Il en est exactement de même dans le processus historique qui suit : le principe divin rassemble d’abord par la force de la gravitation spirituelle les êtres humains séparés en une unité générique, puis il les éclaire par une lumière idéale de la raison, et, enfin, pénétrant à l’intérieur même de l’âme et s’unissant à elle d’une manière organique et concrète, il naît comme un homme nouveau et spirituel. Et de même que dans le monde physique, une longue série d’êtres imparfaits, tout en étant des êtres organiques et vivants, avait précédé l’organisme parfait de l’homme, ainsi, dans le domaine de l’histoire, la naissance de l’homme spirituel parfait a été présagée par une série de révélations du principe divin à l’âme, révélations incomplètes, mais cependant vivantes. Ces révélations vivantes d’un Dieu vivant sont consignées dans les livres sacrés du peuple juif.

Sans la force d’une personnalité qui s’affirme, d’un " moi " conscient, les meilleures qualités de l’homme apparaissent comme débiles et froides, ne sont qu’une idée abstraite. Tout caractère actif et moral présuppose une force de mal, de l’égoïsme, mais domptée. Tout comme, dans le monde physique, une force doit, pour devenir énergie, consommer ou transformer en sa propre forme une quantité correspondante d’énergie antérieure (par exemple la chaleur se transformant en lumière, le mouvement mécanique en chaleur), ainsi, dans le monde moral de l’homme tombé sous l’ordre de la nature, la possibilité du bien, que recèle son âme, ne peut se manifester qu’après avoir consommé ou transformé en soi l’énergie antérieure de l’âme. Or, cette énergie dans l’homme naturel, c’est l’énergie de la volonté qui s’affirme, l’énergie du mal ; c’est elle qui doit être réduite en puissance pour que la nouvelle force du bien, au contraire, passe de la puissance à l’acte. Le bien essentiel est un don divin, mais, pour qu’il se manifeste effectivement en l’homme, il faut que la volonté personnelle qui tend à s’affirmer elle-même, soit transformée par un effort, qu’elle soit domptée et ramenée à l’état de puissance. C’est ainsi que chez un Saint le bien en acte suppose le mal en puissance : l’homme s’élève si haut en sainteté, parce qu’il aurait pu, aussi, être grand dans le mal ; il a surmonté cette force du mal, il l’a soumise au principe suprême, cette force est devenue un fondement du bien.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Fondements spirituels de la vie.
Traduction par le R. P. Georges Tzebricow.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

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La source de toutes les actions de l’homme réside dans sa volonté. L’obstacle qui le sépare du bien absolu, ou de Dieu, est également représenté par la même volonté. Mais c’est par elle encore que l’homme a la faculté de se décider à ne pas agir de lui-même et selon le monde, à ne pas se comporter d’après les volontés qui émanent de lui et du monde. L’homme peut bien prendre la décision que voici : « Je ne veux pas suivre ma propre volonté. » Une telle abnégation, une pareille conversion de la volonté humaine, voilà, ce qui représente pour celle-ci le suprême triomphe.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Bases spirituelles de la vie.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

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Pour ne pas rester stérile, pour donner au contraire le jour à une nouvelle vie spirituelle et pouvoir ainsi agir et créer en liberté, la faculté divine de notre âme doit se livrer à son Libérateur et Seigneur, le Père de cette nouvelle vie. En se livrant à Lui dans la foi, elle s’unit avec Lui dans la prière. C’est que le premier acte de foi, le premier mouvement (soit la première grande œuvre) de la nouvelle vie spirituelle où Dieu agit de concert avec l’homme, c’est la prière.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Bases spirituelles de la vie.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

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C’est la grâce qui nous convertit à Dieu, nous ne faisons qu’agréer de notre propre volonté à cette conversion ; et c’est là l’essence de la prière qui constitue, de par son fait même, une certaine œuvre bonne et réelle. À cette occasion, nous agissons en Dieu et Dieu agit en nous, ce qui représente déjà un début de la nouvelle vie spirituelle. Nous en prouvons dès lors, dans notre for intérieur, le premier mouvement. Nous savons que cette vie est « en nous » et qu’elle forme la meilleure partie de nous-mêmes. Mais nous savons tout autant qu’elle « n’émane pas de nous ». En effet, ce n’est pas nous qui avons créé la réalité de cette nouvelle vie heureuse que nous sentons en nous : elle nous a été « donnée », ce fut un don libre.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Bases spirituelles de la vie.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

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Désirer Dieu, cela signifie un désir spontané de Lui appartenir. Cet assujettissement, tout intérieur et volontaire de notre part, constitue le Règne que Dieu exerce sur nous.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Bases spirituelles de la vie.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

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Ce n’est qu’en tournant vers le Seigneur Tout-Puissant, qui ne comporte nulle division ni partant nulles ténèbres, mais en Lequel réside dès le début le Logos (le sens) de tout, et qui est l’amour, ce n’est – dis-je – qu’en tournant dans notre for intérieur vers Lui que nous modifions en nous l’élément ténébreux, dément et méchant qui existe dans notre nature. En nous attachant par la foi au principe de tout ce qui est bon, nous gagnons notre libération du pouvoir de contrainte exercé contre nous par le principe du péché. Nous cessons d’être les esclaves du péché dès que nous nous reconnaissons dominés par la volonté de Dieu.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Bases spirituelles de la vie.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

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Ce n’est qu’à force de croire au Dieu Invisible et d’agir selon cette foi, accordée par Lui, que notre volonté s’avère comme une volonté réelle, c’est-à-dire comme un principe libre, indépendant de lui-même, ce qui rend ainsi cette volonté capable d’agir non seulement en tant que phénomène psychologique, mais en qualité de force créatrice. La rencontre d’un cœur humain et de la grâce divine qui le recherche ne peut guère avoir lieu qu’en procédant d’une ligne directe de la conscience ; cependant, quel que soit le lieu où se passe cette rencontre, ce n’est que par elle que nous obtenons la volonté effective.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Bases spirituelles de la vie.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

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Ce n’est pas une conformité extérieure entre l’acte et sa rémunération, c’est par contre l’action intérieure de notre propre âme qui importe à Dieu. Aussi un pardon qui revêt la forme d’un mouvement secret de notre cœur possède-t-il une force agissante même lorsqu’un acte extérieur n’est plus possible.

 

Vladimir SOLOVIEV, Les Bases spirituelles de la vie.

Recueilli dans Textes mystiques d’Orient et d’Occident,
choisis et présentés par Solange Lemaitre,
Plon, 1955.

 

 

 

 

 

 

 

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