La divinité de Jésus-Christ

 

Démonstration nouvelle tirée des dernières attaques de l’incrédulité,

par AUGUSTE NICOLAS, auteur des Études philosophiques sur le Christianisme, Paris, Vaton.

 

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

 

Augustin COCHIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LES mandements, les articles, les brochures, opposés, dès le premier moment, aux récentes attaques de l’incrédulité savante contre la foi chrétienne, vont être suivis par des volumes plus lentement élaborés. Cela est dans l’ordre. À des livres qui ont coûté de longues recherches, des voyages, une patiente mise en œuvre, on ne pouvait exiger qu’il fût répondu complètement sur l’heure et à la minute. Nous allons donc voir paraître, à ce que l’on annonce, plusieurs réponses étendues à la Vie de Jésus ; la première est celle de M. Auguste Nicolas, l’auteur de ces belles Études philosophiques, écrites il y a quinze ans par un juge de paix de province pour la consolation d’un ami, et qui, traduites, méditées, répandues dans tous les pays, sont devenues l’un des livres les plus bienfaisants et les plus goûtés de notre époque. Un pareil témoin ne pouvait garder le silence dans le procès engagé de nouveau entre ceux qui croient et ceux qui nient.

L’impression universelle sera, je crois, que ces réponses arrivent un peu tard. Cette réflexion de tout le monde établit à merveille que la Vie de Jésus n’est pas un livre fait pour durer ; déjà l’attention se refroidit et s’éloigne, cela est incontestable.

On convient généralement qu’une partie du succès de ce livre tient non seulement au talent remarquable de l’écrivain, mais aussi à l’audace de son titre. Si l’ouvrage eût été intitulé : Recherches sur l’origine du christianisme, il aurait passé du cabinet de l’auteur dans le cabinet des savants, sans devenir célèbre. Mais il s’attaque à Jésus, et nulle âme humaine n’est indifférente à ce nom-là. Je suppose qu’un M. Smith publie un livre sur la fin probable du régime monarchique en Angleterre, on s’occupera peu de l’opinion de M. Smith. Mais si l’on affiche dans toutes les villes, dans tous les bourgs, dans tous les villages de l’Angleterre : Mort imminente de S. M. la reine Victoria, par M. Smith, tout le monde sera frappé, intéressé, attiré ; le livre circulera de main en main et le nom de M. Smith sera prononcé autant de fois que celui de la reine Victoria. Tout le succès sera dû à ceux qui aiment la reine. Le succès de la Vie de Jésus est dû au grand nombre de ceux qui aiment Jésus.

On convient encore généralement, et tout à fait en dehors du monde des croyants, que ce livre, avec beaucoup de bruit, n’a pas produit beaucoup d’effet sérieux. On se demande quel est le caractère de l’ouvrage. Est-ce de l’histoire ? est-ce de la science ? est-ce de la littérature ? est-ce de la religion ? On ne sait. C’est une tentative hardie pour refaire une grande figure historique, la plus grande de toutes les figures historiques. Or, dans l’opinion des meilleurs juges, la tentative n’a pas réussi. Jésus se présente toujours aux regards du monde et aux respects de l’histoire sous les mêmes traits. En vain le vent a redoublé ses efforts, en vain on a vu accourir avec furie le plus terrible, disait-on, des enfants que la science eût portés jusque-là dans ses flancs. Quelques roseaux ont plié, rompu peut-être, mais on n’a pas ébranlé, dans la plus frêle de ses racines,

 

          Celui dont la tête au ciel était voisine,

          Et dont les pieds touchaient à l’empire des morts.

 

Il semble donc qu’on ait raison de dire aux auteurs des nouvelles réfutations qui vont paraître : « C’est trop tard, cela ne vaut plus la peine ! » Mais les auteurs ont raison à leur tour de répondre : « Si ce n’est le livre, le sujet du moins vaut toujours la peine. Ne nous lassons pas de parler de Jésus-Christ. »

C’est ce que vient faire M. Nicolas. Il réfute moins qu’il n’expose ; comme le dit le titre de son livre, il veut tirer une démonstration nouvelle de la divinité de Notre-Seigneur des dernières attaques de l’incrédulité. Il commence par remercier l’incrédulité de tous les actes de foi qu’elle provoque. Ayons horreur de la guerre, mais, quand elle est déclarée, félicitons-nous d’être attirés sur un bon terrain. Depuis quelques années, la discussion n’étant pleinement permise en France que sur les questions religieuses, tout l’effort de l’attaque et de la résistance s’épuisait trop souvent sur de petites positions sans importance, sur de vieilles citadelles, sur des frontières mal tracées. Cette fois, on a assiégé la place forte qui est la clef, le cœur, le centre de tout notre système de défense. Tant mieux ! Nous sommes unis, inébranlables et invincibles sur ce point. Pour sortir des métaphores, j’aime mieux que, dans les journaux ou dans les chaires, en France ou en Belgique, en Angleterre ou en Russie ou en Amérique, on discute et on prêche Jésus-Christ, Dieu de tous les chrétiens de toutes les nations, que tant d’autres sujets que je pourrais nommer, grands eux-mêmes, mais bien petits à coté de celui-là ! M. Nicolas reconnaît cet avantage, et il pose la question éloquemment en ces termes 1 :

 

 « C’est un premier service que M. Renan aura rendu au Christianisme, en posant et en agitant la question religieuse, trop endormie dans les consciences, en la réveillant par l’attaque, et en la faisant vibrer dans les intelligences et dans les cœurs. Malheur sans doute à l’homme par qui le scandale arrive ; mais il est utile qu’il y ait des scandales 2, l’incurie et l’indifférence qui tournent le dos à la vérité étant plus funestes que le combat qui la fait voir en face.

« Entre les mille preuves de la divinité de notre foi, je suis particulièrement frappé de cette prophétie qui fut faite sur l’ENFANT-DIEU : « L’enfant que voilà est posé pour la ruine et pour le salut d’un grand nombre, et pour servir de signe à la contradiction 3. » Prophétie dont l’accomplissement se déroule et se renouvelle de siècle en siècle avec une fidélité et une sagesse de dessein admirables, et toujours par les mains de ses ennemis, qui sont les premiers instruments de son triomphe...

« ...Voici donc JÉSUS-CHRIST redevenu encore une fois, grâce à ses ennemis, la question du jour ; aussi vivante, aussi ardente qu’elle le fut jamais parmi les Juifs quand il était visible sur la terre ; perce qu’il n’y est pas moins présent : la grande question, comme l’appelle très bien M. Havet ; le plus grand sujet qui puisse occuper une plume, comme dit encore très bien M. Schérer. Cette question, renfermée depuis trop longtemps dans les temples, la voici à l’Institut, dans la Revue des Deux-Mondes, dans le premier-Paris des journaux, dans toutes les conversations, dans l’air ; et tout le monde, depuis le philosophe et le magistrat jusqu’à l’oisif des boulevards et à la femme frivole, est mis en demeure de se prononcer et de voter en quelque façon pour ou contre.

« Quelle question, en effet, si on la mesure sur ses conséquences !

« JÉSUS-CHRIST n’est-il pas Dieu, il n’est qu’un homme : un homme qui a trompé le genre humain en se faisant passer pour Dieu ; un homme qui a jeté l’humanité dans les liens d’une morale fausse, puisqu’elle repose tout entière sur l’amour exclusif qu’on doit avoir pour lui, sur la haine de soi, la mortification, le crucifiement, l’immolation à sa personne. C’est un géant sombre, dévorant la vie à sa racine, et réduisant tout à un affreux désert ; qui a fait et qui fait périr tous les jours des milliers d’hommes, sur la foi mensongère à sa divinité, et qui asservit et dégrade les multitudes par la superstition de son cadavre pendu à un gibet.

« S’il n’est pas Dieu, nous recouvrons la liberté de nos penchants, qu’il a contrariés, de nos rêves de plaisir ou de sagesse, qu’il a interdits, de nos idolâtries pour les beautés ou les forces de la nature, qu’il a renversées. Nous pouvons relever les autels de Vénus, et les fêtes d’Adonis près de la sainte Byblos et des eaux sacrées, où les femmes des mystères antiques venaient mêler leurs larmes. Nous n’avons plus à compter avec les pauvres et les malheureux, dont il a pris en main la cause, et nous pouvons rétablir l’esclavage par le droit naturel et social de la guerre, de la fortune ou de l’intérêt, qui place les deux tiers du genre humain dans la dépendance forcée de l’autre tiers.

« S’il n’est pas Dieu, il faut refaire le sermon sur la montagne et les huit béatitudes. Il faut dire : Bienheureux les riches, bienheureux ceux qui rient, bienheureux les forts, bienheureux ceux qui ne sont pas altérés de la justice, bienheureux ceux qui n’ont pas sous les yeux le spectacle de la misère, bienheureux les voluptueux, bienheureux les puissants, bienheureux les heureux !

« S’il n’est pas Dieu, c’est même une question de savoir s’il y a un Dieu, du moins un Dieu qui s’occupe de l’homme, et qui lui tienne rigueur, en deçà ou au delà de cette vie, pour les faiblesses d’un moment.

« S’il n’est pas Dieu, c’est une forte présomption qu’il n’y a pas de Dieu. Comment, en effet, ce Dieu aurait-il laissé usurper son culte par une idolâtrie aussi sacrilège, et en même temps aussi spécieuse ? Comment se serait-il laissé dérober, par ce nouveau Prométhée, le feu du ciel, tous ses attributs de justice, de miséricorde, de sainteté, de sagesse et de vérité ?

« Enfin, s’il n’est pas Dieu, une révolution immense, pareille à celle qui a asservi le monde au christianisme, doit l’en affranchir : le monde roule sur le faux ; nous sommes les dupes d’une jonglerie de dix-huit siècles ; tout est à refaire : les mœurs, les coutumes, les institutions, les lois, l’homme même.

« D’autre part, s’il est Dieu, ah ! s’il est Dieu ! sa parole est la vérité même, ses commandements sont la loi du monde, ses préceptes la règle obligée de nos mœurs, ses jugements infaillibles et inévitables.

« S’il est Dieu, malheur au monde, malheurs aux sensuels, aux oppresseurs, aux superbes, aux lâches, aux infidèles, aux impies, aux apostats !

« S’il est Dieu, il faut prendre sa croix et le suivre, prétendre au céleste royaume, et le ravir contre tous nos penchants.

« S’il est Dieu, nous allons avoir, d’un instant à l’autre, à lui rendre compte de nos vies, et de l’usage que nous avons fait de ses dons, de notre intelligence par rapport à sa doctrine, de nos affections par rapport à sa morale, de nos biens par rapport à sa charité.

« S’il est Dieu, et que nous ne l’ayons pas servi, adoré, aimé comme tel, il nous dira au jour où il sera notre seul refuge : « Je ne vous connais pas. »

« S’il est Dieu, il est le maître de nos destinées, il a des biens et des maux infinis à nous départir. Ici-bas même il a des forces, des consolations et des joies que nous perdons à ne pas nous attacher à lui, et nous restons follement loin de lui dans des misères, des douleurs et des hontes dont il est le remède spécifique, le soulagement infaillible, le libérateur souverain.

« S’il est Dieu, enfin, nous sommes des insensés autant que des coupables, de braver sa loi, de jouer avec sa divinité, de nous liguer contre lui, d’élever contre nous la masse accablante de nos infidélités et de nos révoltes, et de nous faire des trésors de justice, au lieu des trésors de grâce qu’il nous réservait.

« Voilà toutes les conséquences négatives ou affirmatives que cette question porte dans ses flancs.

« D’elle dépend ainsi, du tout au tout, la manière de voir les choses et les évènements de ce monde : le bien, le mal, la prospérité, l’infortune, la vie, la mort ; de les juger, de les souffrir, de les posséder, de nous conduire dans les mille rapports qui en résultent. Elle affecte toute l’économie de notre existence, et la rend folle ou sage, selon sa solution. Elle est, par conséquent, éminemment préjudicielle ; et, toutes choses cessant, chacun devrait se mettre à l’étudier. Si encore ses conséquences s’arrêtaient au tombeau, ce serait déjà une grande folie que de finir la vie avant d’avoir examiné comment on aurait dû la commencer. Mais qu’est-ce donc, lorsqu’on considère que cette vie, en elle-même, est la moindre des choses dans les conséquences de cette question ; que toute sa portée est dans l’avenir qui suit, avenir irrévocable, avenir éternel, et avenir dans lequel nous pouvons tomber à chaque pas, dont nous ne sommes séparés que par cette bulle d’air qu’on appelle la vie, que par un fil qui s’use, et que le moindre accident peut briser ?

« Elle est donc la plus grande, la plus sérieuse, la plus urgente de toutes les questions qui peuvent se dresser dans une conscience d’homme. Nous ne saurions l’examiner de trop près et trop religieusement. Ce n’est pas une question facultative et spéculative, une question dont le docteur, le prêtre ou le philosophe seuls soient chargés. C’est la question individuelle par excellence ; qui s’attache à chacun de nous sous les divers personnages que nous faisons dans le monde, et qui saisit en nous l’homme même, comme une question de santé ou de maladie, de vie ou de mort, avec cela de plus, que sa portée est au delà. C’est la destinée humaine tout entière.

« Tel est le caractère éminemment personnel et privé de cette suprême question.

« Enfin, elle a un caractère social et public que je n’ai pas besoin de développer... »

 

Nous n’avons point assez d’espace pour prolonger cette belle citation, et pourquoi ne pas le dire ? nous ne le ferions pas volontiers, parce que M. Nicolas esquisse en cet endroit ce qu’il appelle la guerre entre la Révolution et l’Église ; or, nous avouons ne pas très bien comprendre cette manière, aujourd’hui si commune et si commode, de raisonner. Nous savons ce que c’est que l’Église ; nous ne savons pas ce qu’on appelle d’un seul mot la Révolution, comme s’il y avait au monde un monstre nouveau, jusqu’ici inconnu, portant ce nom, et que l’Église serait particulièrement chargée d’exterminer.

Sans taire cette critique, sans discuter ce détail, admirons les pages éloquentes et touchantes écrites par M. Nicolas, pour poser la question. On y reconnaît la manière de l’auteur des Études philosophiques ; il excelle à donner aux problèmes leur grandeur, aux objections leur place, aux preuves leur force ; pour nous servir des nuances que permettent les délicatesses du langage, il ne parle jamais seulement à l’esprit, il parle à l’âme, il raisonne et il émeut, il s’adresse à ce point central où l’intelligence et la sensibilité se touchent, il sait toujours répandre beaucoup de chaleur avec beaucoup de lumière.

Avec beaucoup de sagacité, M. Nicolas profite, dans les chapitres sur la Méthode, des concessions de ceux qu’il combat et il indique nettement le terrain nouveau de la lutte.

Le christianisme, avant d’être une doctrine, est un fait historique. Or ce grand évènement est exposé aux appréciations de trois ou quatre genres d’observateurs. Les uns disent : « C’est un fait, il est certain, il est important, il est prodigieux ; croyons » ; ce sont les fidèles. Les autres disent : « Il est certain, il paraît prodigieux, mais il nous importe peu, allons à nos affaires » ; ce sont les indifférents. Vient une troisième classe d’observateurs qui disent : « Le fait est douteux ; les conséquences sont désagréables ; nous le nions » ; ce sont les impies du dernier siècle. Enfin, une dernière classe s’approche et dit : « Le fait est certain, il est important, mais il n’est pas prodigieux, par la simple raison que le prodige est impossible ; nous nous chargeons de l’expliquer humainement, raisonnablement et convenablement » ; ce sont les critiques contemporains.

Entre ces derniers ennemis qui concèdent le fait, sa certitude, son importance, et nous, il n’y a plus qu’un point en litige. Laquelle vaut le mieux de leur explication ou de la nôtre ? Tout est là. Or, cette discussion se réduit à établir ces trois points :

1° Philosophiquement, le miracle est possible ; en autres termes, Dieu est Dieu ;

2° Historiquement, le miracle est certain ; en autres termes, tout dans Jésus-Christ dépassa l’homme ;

3° Toute autre explication est absurde et ne se soutient pas.

Mais nous n’avons pas à prouver le fait, son authenticité et ses conséquences, comme on était obligé de le faire vis-à-vis des incrédules du dix-huitième siècle. C’est pourquoi M. Nicolas laisse de côté une grande partie des preuves de la foi, notamment toute l’argumentation sur l’origine du mal qui est, à mes yeux, la grande preuve, et si je puis me permettre ce mot, la grande nécessité de la rédemption ; il laisse encore de côté toutes les preuves morales, ce solide argument de la transformation d’une âme, la conversion, miracle que la chimie n’explique pas ; il se borne à exposer une fois de plus la question du surnaturel, puis il retrace l’admirable ensemble historique des prophéties, des évangiles et des enseignements traditionnels de l’Église.

Je renvoie à son livre, que je me borne à annoncer, pour tous ces larges développements.

Qu’il me soit permis seulement de traduire, par une comparaison peut-être un peu bizarre, l’impression profonde que m’a laissée ce tableau, que nous, croyants, nous ne contemplons jamais assez souvent, ce tableau de la tradition merveilleuse, imposante, colossale, qui rattache notre foi aux origines de la famille humaine. L’Église, l’Évangile, les prophéties, la Genèse, quelle chaîne ! quels anneaux ! quelle solidité ! À quelle histoire est-il possible d’ajouter foi, si celle-ci n’est pas acceptée ?

J’ai assisté à la rentrée de l’armée glorieuse qui avait pris Sébastopol ; j’ai vu défiler sous mes yeux ces bataillons fameux, la pesante artillerie, l’infanterie résistante, la cavalerie impétueuse, la marine intrépide, les chefs savants et braves, les aumôniers courageux, les blessés portant leur drapeau ; j’ai vu en même temps passer, dans le fond de mon âme, les morts, qui manquaient au triomphe, les sœurs de charité qui s’y dérobaient ; mon âme et mes yeux ont ainsi contemplé les vierges, les héros, les martyrs de la grande armée nationale, et j’ai cru, sur la foi de tous ces témoins, qu’une ville célèbre avait été assiégée, bombardée, occupée, grâce à la valeur des soldats, et grâce à la puissance du fer qui renverse les murailles et de la poudre qui éclate en lançant le fer.

Je suppose que deux ou trois chimistes m’arrêtent et me disent : Sébastopol est pris, cela est vrai, cela est glorieux, mais la poudre et le fer n’y sont pour rien, car la science vient de démontrer que le boulet ne renverse pas les murailles et que la poudre ne fait pas explosion. Croyez bien, quoique nous n’y fussions pas, que la chose s’est passée tout simplement et sans artillerie, par la puissance de la parole et par la magie du regard. Nous avons inventé qu’il n’y a pas de poudre.

Je retrouve le même langage dans la bouche des adversaires de la foi. Je vois, comme dans l’admirable fresque de notre peintre célèbre, Flandrin, je vois se dérouler la longue procession des docteurs, des pontifes, des vierges, des martyrs, des saints, des papes, des fondateurs, des missionnaires, des mères, des enfants, des croyants, des disciples, des apôtres, des meilleurs, en un mot, des plus grands, des plus intelligents, des plus purs, parmi les enfants des hommes. Rangés sur l’échelle des âges sans un seul jour d’interruption, ils ressemblent aux ouvriers qui se passent les pierres de l’édifice ; je les entends qui répètent : « Jésus a été annoncé avant de naître ; il est né, il a vécu, il a agi, il est mort, il est ressuscité, il a rendu la vue aux aveugles, la vie aux morts, la vérité aux hommes, l’espoir aux pauvres, la pureté aux familles, la justice aux lois, la liberté au monde. Tout a été miracle en lui, tout a été divin, c’est Dieu ! »

Deux ou trois critiques me tirent par la manche et me disent Jésus a fait tout cela, oui, cela est vrai, mais sans miracle, car le miracle n’est pas possible ; il a changé le monde à force de se faire aimer. Comment cela s’est-il fait ? Très simplement. Il a été aimé, il l’est toujours, parce que c’était en son vivant un jeune homme fort aimable.

Ah ! vraiment, c’est se moquer.

Tous les chimistes de la terre ne sauraient nous empêcher de saluer les canons et les drapeaux de la France. De même, malgré les critiques, embrassons la croix, bienfaitrice du monde, et remercions M. Nicolas dont le beau livre nous aidé à mieux comprendre que du côté où nous nous tenons fermement, se tiennent avec nous l’histoire, la conscience et le bon sens.

 

 

Augustin COCHIN.

 

Paru dans Le Correspondant en 1864.

 

 

 

 

 



1 Chap. II, la Question.

2 Matth., XVIII, 7.

3 Luc, II, 34.

 

 

 

 

 

 

 

 

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