Mon ami Charles-E. Harpe
par
Jeanne GRISÉ-ALLARD
Poète délicat, excellent épistolier, conteur intéressant, écrivain radiophonique, conférencier, auteur de pièces théâtrales, de « pageants », et d’un remarquable jeu de la Passion. Il était de chez nous et trop peu l’ont connu.
Pourquoi existe-t-il des cloisons étanches entre des régions proches – Québec et Montréal par exemple – des cloisons où ne passent par de petites portes dérobées que certains dévots aimant respirer l’encens des chapelles ?
Faut-il porter en écharpe son talent, pour qu’il soit reconnu, et partir en compagne, le bâton à la main, pour aller frapper à toutes les portes ?
Charles-E. Harpe n’était pas de ceux-là, et pourtant, mieux doué que bien d’autres, il aurait pu chercher à s’imposer, nouer des intrigues pour arriver plus vite et plus haut, se bâtir un piédestal à même le granit rose de succès qui ne lui manquaient pas.
Il s’est contenté d’être le poète inspiré, écrivant par besoin et par amour, donnant pleinement sa vie à tout ce qui était beauté dans le domaine de la littérature et de la musique ; il lui a suffi d’être un fils aimant, cherchant dans l’art les premières joies de sa jeunesse. Patriote et chrétien, il s’était donné comme mission de magnifier le théâtre populaire, et de mettre une large part de son immense talent au service d’un bel apostolat marial.
Quand je l’ai connu... il portait peut-être sa première culotte longue, et j’avais des anglaises sur le cou. On fêtait à Québec les Noces d’argent littéraires de Ginevra (Geneviève Lefebvre), nous étions là pour avoir risqué dans les pages féminines du temps – les pages littéraires des journaux étaient bien des pages féminines par leur direction – nos premiers essais, lui sous le pseudonyme de René DeBray, moi sous le modeste nom de Goutte d’eau.
Il habitait Lévis, sa ville natale, où le hasard plaça son berceau en août 1909, alors que de l’autre côté du fleuve, on célébrait le 3e centenaire de la fondation de Québec par Samuel de Champlain.
À peine de retour dans mon village, je recevais sa première lettre. Ce fut le début d’une amitié littéraire aussi belle qu’il soit possible d’en rêver. Pourtant à l’âge des émois du cœur, tous les liens au-dessus de ceux-là se nouaient, se renforcissaient avec les années, et quand j’appris brusquement la nouvelle de sa mort, par la radio, en juillet dernier, j’ai pleuré plus qu’un ami. Charles Harpe était devenu un frère auquel j’étais très attachée et dont j’admirais le talent sans cesse renouvelé. Sa dernière lettre était sur ma table de travail, je m’étais reprochée la veille de ne pas y avoir donné plus tôt une réponse.
Brisée, cette vieille amitié à peine marquée de sept ou huit rencontres en trente ans, brisée par l’impitoyable faux ! Je pourrais écrire certes, tout un livre à sa mémoire.
Mais je tenterai seulement d’élever un petit mausolée littéraire à la gloire de cet écrivain doué, trop tôt disparu, et d’ensemencer le tertre des fleurs du souvenir. Il les aimait tellement, les fleurs, surtout, m’écrivait-il un jour : « Le lilas, la marguerite, et la pensée que j’appelle un petit museau de pékinois. »
Charles-E. Harpe était né artiste. Le beau n’avait pour lui aucun secret, car il savait le découvrir partout. Il avait un nom bien prédestiné qu’il aimait, et je me souviens qu’il y a vingt ans, il l’écrivait presque toujours en image. Au bas de ses lettres, son prénom est suivi d’une petite harpe dessinée en quelques traits de plume.
Son écriture était elle-même tout un poème, on dirait une jolie guipure, régulière et serrée, mailles riches et pleines à nulle autre pareilles.
Et chaque phrase était riche d’idées, chaque mot lourd de sens. Il était certainement un de ces maîtres rares en style épistolaire si négligé à notre époque. Et c’était pour lui aussi naturel que de respirer.
Il va s’en dire qu’il avait la parole facile. Je n’ai jamais entendu un conférencier plus vivant. Il était d’ailleurs servi par un regard étrangement brillant où l’intelligence et la gaieté mêlaient leurs feux, et par un timbre de voix prenant. Que d’aisance, de facilité de geste et d’élocution, soutenues par un sourire perpétuel. Sur une trame très solide, la phrase poétique était toujours d’une simplicité et d’une clarté inouïe. Dans son entourage, on a su en profiter sans doute, mais on aurait dû davantage se l’arracher pour la joie des auditoires. Je regretterai toujours que des efforts infructueux de ma part n’aient pas permis de le faire entendre à Montréal à la tribune de Votre auteur préféré. Il était de ceux qu’on aurait dû mettre à la première page du palmarès, ce n’était ni le talent ni les œuvres publiées, ni la réputation d’écrivain qui lui manquaient.
C’est au collège de Lévis évidemment, qu’on peut retrouver le petit écolier. Un grand désir d’étudier la littérature, de la comprendre, le poussa à s’inscrire plus tard au cours du professeur Viatte, à l’Université Laval.
Il publia d’abord, sous le pseudonyme de René DeBray (auquel il ajouta ensuite le nom de Stéphane), des poèmes et des chroniques en prose dans divers journaux et revues qui donnaient volontiers l’hospitalité de leurs colonnes à cette collaboration bénévole. C’est ainsi que se créaient et survivaient les pages littéraires. Mais c’est ainsi également que l’on vient au monde... au monde des lettres.
Ses poèmes étaient déjà beaux et pleins de souffle. Il s’enhardit donc un jour jusqu’à en adresser un à l’une de nos poétesses, alors en pleine gloire, lui demandant respectueusement, humblement, si elle jugeait qu’il avait un peu de talent et s’il devait travailler avec espoir de connaître le succès...
On lui a retourné le poème froidement, tranchant dans le vif des plus beaux rêves, sans souligner même une rime, un mot, en lui disant de cultiver des choux, des navets, mais d’abandonner la poésie.
Méchanceté, envie sans doute (hélas !). Protégé par les Muses, le jeune poète ne se découragea pourtant pas. Il adressa le même poème en Europe à un concours de jeux floraux... et gagna une fleur de genêt d’or. La discrétion m’empêche de révéler le nom canadien de son implacable juge, et je n’ai pu malheureusement, retrouver les dates et les précisions sur ce premier succès à l’étranger. J’ai vu dans le temps, les pièces justificatives, ayant passé une journée dans sa famille.
Je me souviens de son étroite chambre de garçon, avec lucarne en plein ciel. Il l’appelait « sa cage verte », elle était encombrée de livres, de papiers, de bouquets, mais il l’aimait bien. Il y passait tant d’heures à rêver. C’est de là qu’il m’écrivait, en la Fête de la Trinité, 7 juin 1936 : « Vous avez raison, je suis un grand rêveur ! Est-ce un tort ? Je crois que le Rêve est le vêtement que, charitable, nous offre la vie, si décevante parfois, pour habiller nos misères et nos désillusions. D’ailleurs, le poète ne doit-il pas voir pour les aveugles, entendre pour les sourds, parler pour les muets ? Ne doit-il pas jouir pour les ignorants et souffrir pour les insensibles ? »
Il y avait la musique... Je sais qu’il l’aimait beaucoup, moins cependant que la littérature. C’était un peu son gagne-pain. Organiste de sa paroisse (Sainte-Jeanne-d’Arc de Lévis), il donnait aussi des leçons de piano.
Il s’est amusé à mettre en musique un de mes premiers poèmes « Mon cœur est un village » dont je possède une copie de sa main. (Ce poème, harmonisé plus tard par Jacques Aubert, fut chanté à la radio maintes fois.)
Il travailla surtout sur un poème de « Médailles de cire » qu’il aimait particulièrement. Il m’écrivait en juillet 36 : « Je souhaite que la musique de « Mon cœur et mon espoir » vous plaise. C’est d’abord une plainte mineure dans le style XIVe siècle, qui se fond – comme la glace – dans un accord majeur pour exprimer la foi aux amours éternelles. Puis, c’est un gazouillis d’oiseaux, c’est l’espoir qui chante, et pour finir le thème reprend sa gravité pour chanter, rire, pleurer tout à la fois. »
Il chantait à CKCV, mais c’était le théâtre surtout qui l’attirait. Il rêvait d’en faire sa vie. Il voulait faire le plus de bien possible, récréer, instruire et édifier par le spectacle.
En 1930, Charles-E. Harpe faisait partie de la troupe de Julien Daoust ; il fut attaché à une troupe parisienne pour une saison d’opérette française.
Mais il rêvait de pièces nouvelles, drames, comédies, revues et les sentait sourdre sous sa plume. Il se mit à la tâche et devint bientôt le régisseur d’une nouvelle troupe qui jouait exclusivement ses textes.
Son théâtre, hors commerce, est abondant. Voici quelques-unes de ses pièces qui furent les plus populaires :
L’angelus de la mer, 3 actes,
La gardienne du foyer, 3 actes,
Le semeur de haine, 4 actes,
Le cœur d’un homme, 3 actes,
La croix d’une mère, 3 actes,
L’homme rouge, 4 actes,
La déserteuse, 3 actes,
La femme enchaînée, 3 actes,
L’amour pardonne, 3 actes,
La fin du rêve, 3 actes,
Chômeurs de luxe, comédie-bouffe en 3 actes,
et surtout : Sœur blanche, pièce en 5 actes, qui connut de grands succès particulièrement dans la Gaspésie, la Beauce, les Cantons de l’Est, la Matapédia, la région de Québec, Témiscouata, Nouveau-Brunswick et le Maine. Il a vainement tenté de faire jouer ses pièces à Montréal.
Au cours d’une de ces tournées théâtrales, il fut victime d’un accident d’auto qui l’impressionna vivement, blessures peu graves mais choc nerveux terrible. En convalescence, il m’écrivait : « J’ai encore bras et jambes, grâce au ciel et, sans doute, à la médaille miraculeuse que maman avait eu soin de coudre, secrètement, dans la poche intérieure de mon manteau et dont la découverte m’a fait pleurer. »
Plus tard, il fonda la troupe « Les artistes du terroir », œuvre continuée sous le nom : « Les Copains de l’art ».
Poète des malades
Et voici qu’il devint « le barde des tuberculeux », comme dit si bien Gilles Morand, dans « Le Temps », il a chanté dans les strophes d’un pur lyrisme et de la meilleure veine poétique les sentiments des isolés.
Sa carrière féconde, sa vie bien remplie, furent interrompues par son entrée à l’hôpital Laval où il séjourna durant trois ans.
« Que vous dire de mes trois années de réclusion, m’écrivait-il quelques temps après, renouant le fil de notre correspondance ralentie à l’époque de mon mariage. Les « Croix » vous l’apprendront. Elles ont influencé ma vocation littéraire. Leurs causes ? La mort de maman, le 26 avril 1941. Je chantais à CKCV lorsque j’appris par téléphone qu’elle venait d’être foudroyée par une congestion cérébrale. Je crus devenir fou. »
En convalescence à Saint-Aubert de l’Islet, son médecin lui ayant recommandé la campagne, il publia ce recueil de magnifiques chroniques sanatoriales intitulées « Les Croix de chair » (Éditions Marquis), où la prose et la poésie s’entrelacent merveilleusement. La 2e édition de cet ouvrage est honorée d’une belle lettre de son Éminence le cardinal Villeneuve. Une version anglaise The Human Cross est restée je crois dans le domaine « À paraître » où se perdent tant de rêves.
Aux Éditions Marquis également paraissaient en 1947 un livre de contes et de poèmes, sous le titre : Le jongleur aux étoiles, ainsi dédicacé :
« Au labeur obscur de mon père,
À la mémoire de ma mère
qui sut si bien porter la vie
comme une chape de lumière,
et qu’il m’est doux de retrouver
lorsque je m’évade du monde
pour jongler aux feux des étoiles. »
Cet ouvrage est préfacé par Roger Brien de l’Académie Canadienne-française.
L’année suivante, Charles-E. Harpe présentait un très beau recueil de vers : Les Oiseaux dans la brume, dédié à sa femme Gabrielle (Éditions Marquis). M. l’abbé Arthur Lacasse, de la Société Royale du Canada, en fit une juste et très élogieuse préface.
Charles m’écrivait, le 5 août 1948 : « J’ai reçu une visite chère : l’abbé Lacasse. Un beau vieillard de 80 ans, d’une étonnante verdeur. Pendant deux jours, ce fut un feu roulant d’anecdotes, de bons mots, de souvenirs... et de conseils. Musicien, il nous a charmé de ses propres œuvres. Et puis, j’ai communié à sa messe. Le parrain semblait fier de ce fait et quant à moi, c’est comme s’il était resté quelque chose de divin dans notre foyer depuis qu’il est venu. »
J’ai essayé de retrouver dans « Les oiseaux dans la brume » mais en vain, quelque chose de ce premier recueil de poèmes prêt à paraître en 36, et dont il me disait :
« N’est-ce pas qu’Harvey (Jean-Charles) sera un parrain magnifique ? Les cloches sonneront en septembre pour la rentrée des pâtres et des rêves ! Le titre : « L’Oiseau de feu » le recueil contient 65 poèmes, soit 1,227 vers. Vous serait-il agréable de lire le manuscrit en primeur ? »
Vers le même temps, il me parlait souvent de son « Hébraïde ». « Ce sera l’œuvre de ma vie ! » disait-il... Elle est prête, j’attends un signe de Harvey. (Je m’excuse auprès de M. Harvey de le mêler à ces souvenirs, sans lui en avoir demandé la permission, mais mon ami Charles avait pour lui une si haute estime et une confiance sans borne.)
Guéri tout à fait, Charles-E. Harpe épousait en juin 1947 Gabrielle Arsenault de Saint-Aubert de l’Islet et prenait possession d’une grande maison ancestrale qu’il décrivait ainsi : « Changement d’atmosphère avec le Sana. Je possède un cabinet de travail, genre solarium, avec horizons magnifiques sur la campagne de St-Jean-Port-Joli, sur le large fleuve et sur les montagnes de la Baie St-Paul. Un grand jardin, un verger, un parterre précédant ce dernier, j’ai tout ce qu’il faut pour rimer dans l’extase des fleurs ou de la belle neige blanche qui ouate les branches du gros cormier encore en possession de ses grappes de corail. Je vis donc heureux dans le travail, dans un décor ravissant. »
On ne pouvait voir, en effet, plus beau cadre que cette maison hospitalière et trouver meilleure ambiance. C’était déjà un ravissement d’y vivre deux jours ! Le piano, des fleurs, de jolis meubles, des livres surtout, et cette paix si bienfaisante. Il semble que la vie aurait dû se continuer encore trente ou quarante ans dans un sillon si bien tracé.
Charles Harpe avait une grande vénération et un filial souvenir pour sa maman d’ici-bas. Il ressentait une forte émotion aux dates anniversaires de sa naissance, de son décès, en la Fête des Mères. Sa photo était constamment sous ses yeux.
Sa dévotion à la Sainte Vierge date de toujours. Dans toutes ses pièces théâtrales, il est rare qu’on ne trouve pas un décor où figure un petit oratoire à Marie, ou simplement une madone fleurie dans un appartement quelconque. Cette dévotion s’est accentuée à l’Hôpital Laval où Notre-Dame du Sourire est à l’honneur. C’est alors qu’il fonda la revue « Le sourire », organe encore bien vivant du Comité des loisirs de l’Hôpital.
Il publie en 1947 : Légendes mariales, en quatre brochures, édition confiée aux Pères gardiens du Sanctuaire du Cap-de-la-Madeleine, et une autre édition de Légendes mariales en 6 brochures traduites en anglais par le R. P. J. Môle (Éditions Chanteclerc).
Sa collaboration et ses reportages annuels au bénéfice des Annales de Notre-Dame-du-Cap, Sainte-Anne-de-Beaupré, l’Oratoire Saint-Joseph, le Saint-Sacrement, le Messager de Saint-Antoine, étaient quelque chose de vivant, de frémissant de foi et d’espérance.
Combien de nouvelles et de contes, d’études et de critiques littéraires principalement dans l’Action Catholique (Québec) et différents autres journaux et revues. On l’a trouvé, un certain temps dans Photo Journal et dans le Bulletin des Agriculteurs.
Charles-E. Harpe avait certainement un don particulier pour les jeux scéniques. Il en écrivait les paroles et la musique avec un souffle poétique qui tenait de l’irréel. Et c’est avec un art consommé que l’auteur devenait ensuite réalisateur.
Il créa pour l’U.C.C. « Le Credo du Paysan », puis ce furent de remarquables « pageants » historiques, si bien que le juge E. Marquis l’avait surnommé « le troubadour de la vie paroissiale ».
Après un premier pageant à la mémoire de Philippe Aubert de Gaspé il écrivit : Mon pays, mes amours, Les Anciens Canadiens (à l’occasion du 3e Congrès de la Langue française), Vive mon pays, vive la Canadienne, Terre de nos aïeux (réalisation inachevée) et La moisson du souvenir. C’est au cours d’une répétition de ce spectacle que Charles Harpe tomba, foudroyé par une attaque d’angine, au milieu de ses acteurs pour qui il était vraiment un jeune dieu.
La moisson du souvenir... Combien ce titre lui-même devient prophétique ! Et document très émouvant, un photographe amateur, membre de sa troupe a merveilleusement réussi une photo, trois minutes avant sa mort, alors qu’il apportait les « dernières » retouches au narrateur du pageant.
La Vie de Jésus, de François Mauriac l’avait à ce point impressionné qu’il m’écrivait en juin 36 : « Quel chef-d’œuvre ! La religion ne m’a jamais fait comprendre plus humainement le Calvaire de l’Homme-Dieu. Je n’ai jamais si bien compris la magnanimité de Son sacrifice et la scélératesse de notre ingratitude. Comme je l’aime son Jésus ! Que de souffrance et que d’amour dans sa vie ! »
En 1950, Charles-E. Harpe réalisa donc un grand jeu sacré de La Passion du Christ à Saint-Jean-Port-Joli. Ce fut un triomphe qu’il salua en disant : « La Vierge est contente de son poète ! » Les dialogues sont basés sur les textes évangéliques, sauf la si belle prière des narrateurs à la Mère des douleurs. Ce tableau de Mater Dolorosa était d’une poignante beauté, et il avait tenu à ce que sa femme personnifie la Vierge dans ce beau drame biblique.
Sans remonter à plus de vingt ans, alors qu’il chantait et écrivait des sketches pour CKCV et CHGB, il avait au moment de sa mort des émissions humoristiques hebdomadaires et cinq fois par semaine, un roman-fleuve « Les Trottoirs du Québec » à CKCV.
Mais ce qu’il réalisa de plus fameux fut encore sa série de trente émissions consécutives sur Le miracle de Fatima, dont il était l’auteur et le réalisateur. Après CKCV, elles passèrent sur tout le réseau et furent transportées en Europe, sur disques, où elles furent entendues à la radio vaticane, derrière le rideau de fer, et à Fatima même.
Ce fut l’occasion pour l’auteur d’un voyage enchanté, il ne pouvait parler sans une émotion allant jusqu’aux larmes de cette faveur d’une audience papale particulière.
Il était président de la Société des Poètes canadiens-français, membre des Écrivains canadiens, des Écrivains pour la jeunesse et il appartenait à de nombreuses sociétés.
À peine quelques semaines avant sa mort, les Écrivains pour la jeunesse lui avaient consacré un quart d’heure dans une série d’émissions à CHLP.
Sa brillante carrière est maintenant terminée. Devant sa tombe on considérera maintenant son inépuisable talent et son rayonnement littéraire. Il était un grand et bel écrivain.
S’il avait été de ceux qui se payent des publicistes, Charles-E. Harpe aurait connu de son vivant la gloire, le triomphe et l’encens. Mais il avait l’âme trop grande, il était trop chrétien, trop modeste et n’ambitionnait que d’être un apôtre du beau, du bien, de l’art.
On peut s’incliner très bas devant le souvenir d’un tel homme et c’est un devoir de placer son nom en lettres d’or sur un mausolée de marbre. Son œuvre littéraire le mérite, il est de ceux qui ont créé, de ceux dont peut s’enorgueillir la culture canadienne-française.
Jeanne GRISÉ-ALLARD.
Paru dans Amérique française en 1953.