Marie de Calages
(1630-1661)
Notice biographique extraite de :
Jeannine MOULIN, La poésie féminine, Seghers, 1966.
Billardon de Sauvigny a publié de ses textes dans son Parnasse des Dames. Seulement, il les a tellement modifiés en les truffant de passages de son cru qu’il les a rendus méconnaissables.
Indigné de ce procédé, un érudit scrupuleux, M. Tourlet, rétablit, dès 1814, la vérité sur l’œuvre et sur l’auteur.
En 1660, paraît un important volume de cinq mille vers dédié à la nouvelle épouse de Louis XIV, Marie-Thérèse d’Autriche : Judith ou la délivrance de Béthulie. L’auteur, Mme Marie Pech de Calages, se voit immédiatement récompensée par les soins de la famille royale qui lui accorde dix mille livres. Mais la pauvre femme meurt, peu de temps après cette publication, n’ayant pu profiter ni de cette somme appréciable ni de sa récente renommée.
L’œuvre se rattache au genre épique dont la vogue fut assurée de 1650 à 1656 par les talents de Saint-Amant et de Le Moyne, de Desmarets de Saint-Sorlin et de Chapelain. On y découvre certaines analogies avec la Judith de Du Bartas qui fut dédiée en 1573 à Marguerite de Valois. Les deux poèmes ne s’inspirent de la Bible que dans les grandes lignes. Par contre, ils diffèrent de style et de pensée. Du Bartas décrit les batailles avec plus de précision, il se sert même de termes techniques. Marie de Calages manifeste plus de finesse dans l’analyse des sentiments. On est séduit par sa puissance dramatique et par la vivacité de ses dialogues. D’autant plus qu’à cette époque, Corneille est le seul maître de la scène et Racine n’en est encore qu’à ses débuts. Celui-ci a dû lire Judith et peut-être en retenir des fragments. En tout cas, le vers où Marie de Calages décrit Holopherne :
Il se cherche lui-même et ne se trouve plus...
Hyppolite le prononce à la deuxième scène du deuxième acte de Phèdre (1677).
Il est incontestable que Mme de Calages dessine avec fermeté ses mouvements de foule, campe admirablement un Holopherne amoureux et une émouvante Judith bien proche d’Andromaque. Elle fait prononcer à son héroïne des vers aux accents très purs : Ce cœur brûle toujours pour une froide cendre... et le cantique dont nous donnons ici quelques strophes imposantes.
Cette épopée, qui n’est même pas citée dans les manuels d’histoire littéraire, constitue un sérieux apport du lyrisme féminin à la poésie du XVIIe siècle.
OEUVRE: Judith ou la délivrance de Béthulie, Toulouse, A. Colomiez, 1660.