Eugénie de Guérin
(1805-1848)
Notice biographique extraite de :
Jeannine MOULIN, La poésie féminine, Seghers, 1966.
L’existence d’Eugénie de Guérin se déroula au château du Cayla, partagée entre les soins du ménage, la lecture et les occupations pieuses. Un voyage à Toulouse, deux dans le Nivernais et à Paris sont les seuls événements qui aient troublé le rythme de journées presque monacales.
Ayant perdu sa mère à l’âge de quatorze ans, la jeune fille se consacra entièrement à sa famille. De la lignée des Jacqueline Pascal et des Lucile de Chateaubriand, sœurs admirables, elle s’associa étroitement au destin de son frère, Charles de Guérin, le futur poète.
Dans sa vie isolée, « cette fauve charmante, grandie comme Sainte Geneviève parmi les pastours » s’accordait la joie de se confier à son Journal. Celui-ci parut quatorze ans après sa mort et les huit premières éditions en furent épuisées en seize mois. Eugénie y avoue avoir renoncé à la poésie parce que Dieu le lui demandait, ce qui limite hélas ! le nombre de ses poèmes. Pourtant, « cette Marthe de l’Évangile était poète, dit Barbey d’Aurevilly, et l’on peut répondre qu’elle l’était toujours ». Sa phrase ne trahit jamais l’effort. De son propre aveu, il est en elle d’écrire comme à la fontaine de couler. Sa prose est tissée d’images lumineuses, de verbes ailés, de phrases arachnéennes. Elle tire de mille riens – d’un oiseau qui passe, d’un bouton de rose, de l’eau savonneuse, du feu qui s’anime – une atmosphère d’émerveillement et de féerie. Dans ses vers resplendissent tour à tour la pudeur et l’humilité de la jeune fille, la ferveur et l’élévation d’une mystique. La pureté du langage reflète bien celle d’un cœur qui n’a vécu que de se donner à autrui et au Seigneur.
La poésie d’Eugénie de Guérin se découvre autant dans sa prose que dans ses vers. Qui a lu sa Correspondance et son Journal n’oubliera plus cette atmosphère où les choses concrètes ne semblent rapportées que pour mieux percevoir l’irréalisme magique dont elles sont environnées.
OEUVRES : Reliquiae, publié par G.S. Trébutien, Caen, Hardel, 1855. Journal et fragments, publiés par G. S. Trébutien, Paris, Didier, 1862. Lettres, publiées par G. S. Trébutien, Paris, Didier, 1864. Lettres à Louise Bayne, 1830-1834, publiées par G. S. Trébutien, Paris, Gabalda, 1927, 2 vol. Lettres à son frère Maurice (1824-1839), publiées par Mgr Barthès, Paris, Gabalda, 1929. Lettres à sa famille et à divers (1827-1839), publiées par Mgr Barthès, Paris, Didier, 1942.