Sophie de Bazancourt d’Arbouville
(1810-1850)
Notice biographique extraite de :
Alphonse SÉCHÉ, Les Muses françaises.
Outre que ses poésies sans être très originales ne sont pas dénuées de tout mérite, Mme d’Arbouville a encore, pour nous, un double intérêt : elle eut aux environs de 1835 un salon littéraire très suivi, et son influence était telle qu’on lui prêtait le pouvoir de « faire des académiciens », – enfin, et c’est cela surtout qui la recommande à notre curiosité, elle fut durant dix années la meilleure amie de Sainte-Beuve, une amie qu’il paraît bien avoir aimée passionnément.
Elle était la fille du général baron de Bazancourt qui avait épousé Élisa d’Houdetot, une petite-fille de la comtesse d’Houdetot, l’amie de Jean-Jacques. – Née le 29 octobre 1810, Sophie de Bazancourt avait vingt-deux ans lorsqu’on la maria à M. François-Aimé-Frédéric Loyré d’Arbouville, chef de bataillon au 2e régiment d’infanterie légère.
Ce fut une union heureuse. La jeune femme aimait beaucoup son mari et le suivait dans ses diverses garnisons, sans avoir un trop vif regret de Paris et du monde brillant où elle avait cependant été élevée. Cela ne veut pas dire qu’elle s’amusait beaucoup en province. Non, elle ne s’amusait pas du tout, elle s’ennuyait même souvent. Pour se distraire, elle faisait de la musique et écrivait des vers. – « Je crois, dit-elle à une amie, que je fais des progrès et qu’il serait même possible qu’en travaillant je parvinsse à faire quelque chose de bon. » Elle se juge bien. De fait, Mme d’Arbouville n’est guère qu’une amateur de lettres. Elle n’écrivit d’ailleurs jamais pour le public. À peine si elle soumettait ses essais en prose et en vers à ses parents et à ses amis. Elle écrivait pour elle-même et avec une parfaite modestie. Aussi ses Poésies et nouvelles ne furent imprimées qu’après sa mort.
L’influence de Mme d’Arbouville sur Sainte-Beuve fut très grande. On peut dire qu’après l'héroïne du Livre d’Amour, Mme d’Arbouville fut la femme qui tint la place dans la pensée et dans le cœur de Sainte-Beuve. Il fit beaucoup de vers pour elle, et nous connaissons par une curieuse ébauche de roman, le Clou d’Or, quelques-unes des lettres qu’il écrivit pour cette amie dévouée.
Mme d’Arbouville, qui souffrait d’un cancer au sein, mourut à Paris le 2 mars 1850.