Le Magnificat

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

SÉDIR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En ces jours-là, Marie se leva, et s’en alla en hâte au pays des montagnes, dans une ville de Juda. Et, étant entrée dans la maison de Zacharie, elle salua Élisabeth. Et aussitôt qu’Élisabeth eut entendu la salutation de Marie, l’enfant qu’elle portait tressaillit dans son sein, et Élisabeth fut remplie du Saint-Esprit. Et, élevant sa voix, elle s’écria : « Tu es bénie entre les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni. Et d’où me vient que la mère de mon Seigneur vienne me visiter ? Car la voix de ta salutation n’a pas plutôt frappé mes oreilles, que le petit enfant a tressailli de joie dans mon sein. Bienheureuse est celle qui a cru à l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur. » Alors Marie dit : « Mon âme magnifie le Seigneur ; et mon esprit se réjouit en Dieu, qui est mon Sauveur, parce qu’il a regardé la bassesse de sa servante. Désormais toutes les générations m’appelleront bienheureuse ; car le Tout-Puissant m’a fait de grandes choses. Son nom est saint ; et sa miséricorde est d’âge en âge sur ceux qui le craignent. Il a déployé avec puissance la force de son bras ; il a dissipé les desseins que les orgueilleux formaient dans leur cœur ; il a détrôné les puissants, et il a élevé les humbles ; il a rempli de biens ceux qui avaient faim, et il a renvoyé les riches à vide. Se souvenant de sa miséricorde, il a secouru Israël, son serviteur ; comme il en avait parlé à nos pères, à Abraham et à sa postérité pour toujours. »

Et Marie demeura avec Élisabeth environ trois mois ; puis elle s’en retourna en sa maison.

(LUC ch. I, V. 39 à 56.)

 

 

AUSSITÔT après la visite de l’ange, Marie se lève en hâte et part retrouver sa vieille cousine. Joseph l’accompagne, marchant à côté du petit âne modeste, et dont le sabot ne bronche point parmi les pierrailles des sentes de montagnes. Ces voyageurs sont de bien pauvres hères. L’homme porte dans sa ceinture quelque monnaie, un rouleau de sentences ; sur le bât tient le petit paquet de provisions et un humble cadeau aux parents. Mais comme cette course dut être charmante, parmi les vergers, les collines, les petits ruisseaux, les olivaies ; et la lente montée sinueuse à travers les terrasses en culture, et le repos de midi à l’ombre d’un ravin boisé ; et le soir auguste qui descend avec sa grande et noble paix ; et les étoiles et la claire lune de printemps ! Voici enfin la vieille maison de Zacharie, en grosses pierres brutes, comme vous en trouverez en Provence. En haut de l’escalier extérieur, sous l’arcade, apparaissent les deux vieilles bonnes gens qui se hâtent. Entendez leurs effusions, la bonhomie de leurs propos, leurs soins ; et l’eau chaude pour les pieds poudreux des voyageurs, et le frugal souper, et la provende de l’âne dans l’écurie obscure creusée à même le roc. Et les conversations lentes, les regards d’étonnement, les exclamations basses ; et la prière rituelle des deux hommes sous la lune à son zénith, tandis que les deux femmes se continuent leurs confidences. Scènes admirables dont la beauté intérieure correspond justement à la beauté du décor ! Mais, si ces personnages revenaient aujourd’hui, que leurs inquiétudes seraient plus tristes et leurs joies moins sereines dans notre vie moderne d’où la noblesse s’est enfuie !

On peut se demander pour quels motifs cette visite de la Vierge à sa cousine est relatée. C’était une démarche toute simple ; quel enseignement faut-il y découvrir ? Socialement, Marie est à un degré au-dessous d’Élisabeth. Spirituellement, elle la dépasse de loin. Au point de vue du Ciel, voilà deux raisons valables pour expliquer ce voyage. La loi divine demande, en effet, que nous observions les coutumes et les convenances ; et elle enseigne, d’autre part, que le supérieur se doit à l’inférieur. Marie satisfait à cette double observance.

Devant Dieu, toutes les positions hiérarchiques des êtres sont des fonctions égales. C’est à nous seuls qu’elles paraissent basses ou relevées ; leur classement ne vaut que dans le relatif. Pour éviter d’une part l’erreur anarchiste et, de l’autre, l’erreur absolutiste, il faut distinguer ces deux points de vue. Ainsi peut avoir lieu la collaboration franche et sans arrière-pensée des dirigeants et des dirigés.

Marie satisfera donc d’abord aux convenances sociales.

Il y a deux sortes de politesse : l’une, la nôtre, est toute dans les manières. Elle prodigue les formules courtoises sans que le cœur les vivifie. Elle est un mensonge. Elle engendre les fruits du mensonge : les médisances, les envies, les discordes. Dans la politesse vraie, au contraire, toutes les fleurs jaillissent du sol fertile de la bénévolence, de la compassion et de la modestie ; elle sort spontanément de cet état d’âme par lequel chacun de nous se considère comme le serviteur d’autrui, tout disposé à l’aider et à l’encourager ; et le charme dont elle revêt le prosaïsme quotidien le pare d’un sourire enchanteur. Elle est le luxe des rapports sociaux ; l’homme n’a pas besoin que de confort matériel, il a besoin aussi de beauté. Le nécessaire suffit ; cependant un peu de superflu lui est indispensable. Certains sont râpés dans leurs vêtements et grands seigneurs dans le tour de leurs pensées. Une existence mesquine se rend somptueuse par la richesse et la beauté des sentiments. L’homme ne peut être écrasé que matériellement. Par la vie intérieure, toutes les magnificences, les richesses, les majestés, toutes les audaces sont à lui. Et ce n’est pas là de la phraséologie, puisque tout influe sur tout, puisque la force la plus subtile finit toujours par opérer des transformations dans la matière. Un artiste qui n’est jamais sorti de son atelier, un philosophe qui n’a même jamais publié ses spéculations, un ermite perdu dans le fond d’un désert, pourvu qu’ils se soient consumés à la recherche de leur idéal, ils le forcent à descendre, ils l’acclimatent peu à peu à l’air lourd de notre terre ; et insensiblement l’état d’esprit général, le niveau social, l’opinion se modifient par l’influence occulte de l’effort ignoré de quelque travailleur anonyme.

Au bout de deux, de trois générations, – sept générations ne se passent point sans que cela arrive –, l’intelligence publique se trouve enrichie d’une idée nouvelle ; ou le législateur promulgue une loi humanitaire ; ou l’inventeur découvre le moyen d’améliorer la vie matérielle.

On ne se doute pas que les activités les plus positives jaillissent de racines secrètes dans le cœur humain. Prenez la vie industrielle, par exemple. Si l’on pouvait remonter dans l’au-delà jusqu’au type organique vivant dont la matérialisation a fourni la locomotive, l’automobile ou l’aéroplane, on serait surpris d’y rencontrer le sacrifice de quelque héros à jamais inconnu.

Tout ceci doit nous rendre attentifs aux moindres actes de notre vie quotidienne. Nous ne savons pas quelles transformations peut engendrer un sourire, un regard ou un geste de bonté.

Revenons à la Visitation.

 

 

*

*     *

 

Élisabeth devait être la mère du plus grand des humains. Regardez dans l’histoire quelles femmes admirables furent les mères des grands hommes ; à travers quelles luttes et quelles fatigues elles construisirent peu à peu le caractère et la sensibilité de ces enfants exceptionnels. Et, comme le Baptiste fut le plus grand de tous les hommes, combien sa mère devait-elle être pourvue et enrichie pour tisser à cette âme extraordinaire une enveloppe terrestre capable d’en soutenir et d’en entretenir la flamme.

Voici pourquoi la Visitation était nécessaire.

Tous les êtres rayonnent sur tous les êtres. Ne nous sentons-nous pas pires ou meilleurs selon la qualité spirituelle de ceux qui nous entourent ? N’avons-nous jamais reçu d’un passant un peu plus de méchanceté ou un peu plus de bonté ? Aux êtres qui sont grands dans le mal comme dans le bien il n’est point nécessaire de parler ni d’agir pour exercer leur suprématie. Ils paraissent et c’est assez. Parce que l’esprit de l’homme rayonne de soi-même son prestige. À nous d’analyser ces impressions pour les bannir ou les admettre. Ainsi l’esprit du Précurseur encore dans les limbes de la gestation reconnaît l’esprit de son Maître sous les mêmes voiles opaques, et il frémit ; telle est la vertu des contacts spirituels. Sachons-le, pour exalter en nous tous les espoirs, la puissance de ce rayonnement est plus victorieuse quand elle prend sa source dans la source même de la Vérité. Aux yeux du voyant, il y eut, à ce moment-là, dans le monde des réalités invisibles, la rencontre pathétique du plus ancien de tous les « soldats » et du plus grand de tous les chefs.

La naissance d’une âme à la vie terrestre est une résultante. Si, dans cette chambre, par exemple, un enfant doit venir au monde dix ans plus tard, nous pourrions, avec un regard clair, déjà discerner le travail du double et les premiers labeurs de l’esprit, qui tente de jeter l’ancre sur le fond terrestre de l’océan de l’existence. Nous traitons avec légèreté tous ces mouvements dynamiques, que leur fréquence nous fait paraître insignifiants. Il faut leur accorder une attention plus grave. Intermédiaires entre le visible et l’invisible, nos fonctions sont lourdes ; accomplissons-les de tout notre bon vouloir et avec le souci constant de ne point demeurer au-dessous de notre tâche.

 

 

*

*     *

 

Dans cette scène de la Visitation, les trois acteurs, Marie, Élisabeth et Zacharie, se trouvent visiblement transportés en dehors d’eux-mêmes, au-dessus d’eux-mêmes. Une main surnaturelle les meut. Ils nous apparaissent comme un champ bouleversé par le cyclone, et qui reste inconscient des drames dont il est le support. En de telles circonstances, l’être humain rêve pour ainsi dire. Il prononce des paroles sans les comprendre ; l’Esprit le possède ; le sens de ces choses lui échappe ; et il faut que les autres hommes attendent des siècles pour discerner quels mystères furent alors en conversation.

Car les mystères vivent. Les mystères sont des anges. Ils s’expriment dans une langue surhumaine, quoique leurs interprètes emploient les mots humains.

Ainsi : « Heureuse », dit Élisabeth, « celle qui a cru ce qui lui a été dit de la part du Seigneur ». Voici la seconde circonstance où, dans le récit évangélique, apparaît l’idée de la foi. Croire, c’est un acte supra-intellectuel. Comprendre quelque chose, c’est l’incarner dans son mental. Croire à quelque chose, c’est agir conformément à une lumière encore imperceptible, et dont la tension la plus haute de notre esprit arrive à peine à nous faire soupçonner l’existence. C’est ainsi que, dans les nuits d’orage, au sein des ténèbres les plus profondes, l’œil du veilleur perçoit un peu moins de ténèbres, là où l’aube ne s’élèvera vraiment que quelques heures plus tard.

L’acte de croire exige une filiation précise entre notre cœur et tel mystère. Croire à quelque chose de faux indique que l’erreur habite au centre de nous-mêmes. Croire au Vrai incompréhensible et même inconcevable exige une pureté morale et l’obombration de ce Vrai. Or, qui se ressemble s’assemble. Le juste et l’humble attirent la vérité, le méchant et le vaniteux attirent l’erreur.

C’est pourquoi Marie répond à Élisabeth : « Mon âme magnifie le Seigneur. »

 

 

*

*     *

 

Les dix versets de cette réponse, construits avec des réminiscences des psaumes et des prophètes, sont désignés sous le nom de cantique. Qu’est-ce qu’un cantique ?

Il nous faut ici regarder l’univers sous les deux aspects de vérité et de beauté. Parce que la création gît dans l’erreur, le concept de vérité implique à tort pour nous celui de matérialité ; et la plupart des hommes ne tiennent comme vrai, c’est-à-dire comme réel, que ce qui est matériel. Pour eux, le beau, c’est de l’irréel, de la poésie, de la littérature. Pour eux, dans la vie sérieuse, on parle en prose ; ce n’est que sur le théâtre, pour s’amuser, qu’on parle en vers et que l’on chante.

Et cependant toute vérité comporte nécessairement de la beauté. Le vrai et le bien qui ne possèdent pas un peu du luxe superflu de la beauté ne sont complètement ni vrai, ni bien. L’homme, quand il demeure à plat, ne converse qu’avec le résidu des mouvements de la vie, qu’avec ce que la vie contient de décompositions. Mais, si un feu le brûle, si un flambeau l’illumine, si une douleur ou une joie le transporte, la nécessité d’un mode extraordinaire d’expression le contraint à chanter. Ceux-là seuls chantent qui portent en eux des magnificences ou, alors, ils ne sont que des comédiens plus ou moins habiles.

Si quelque présence surhumaine nous oppresse, une nouvelle forme de langage devient nécessaire. L’art est cet effort admirable de notre impuissance sublimée qui se transmue en puissance. C’est l’élan d’une bouche balbutiante dont une volonté vivante dompte enfin l’ivresse. C’est pourquoi il faut faire des poètes et des artistes notre habituelle société ; ils nous aideront à mettre de l’ineffable dans le prosaïsme ambiant qui nous anémie.

Le cantique de la Vierge exprime avec simplicité l’essence éternelle du Beau. Elle dit : « Mon âme magnifie le Seigneur », et : « Mon esprit se réjouit en Dieu, mon Sauveur. »

L’âme, c’est notre principe d’éternité ; autonome, immuable, toute sereine ; inspiratrice et témoin de tout le reste de nous-mêmes ; elle est le canal indestructible par où coule l’eau de la fontaine éternelle ; elle est le centre fixe autour duquel tournent tous les corps, toutes les planètes, dont l’ensemble constitue notre esprit. Sa vie, c’est l’amour, un cantique sans fin de béatitude, de louange et de remerciements.

L’esprit dans l’enceinte duquel gravitent, comme les astres dans le zodiaque, le caractère, la personnalité, le tempérament, la compréhension, la pensée, l’animisme, le moi ; l’esprit, c’est tout ce que la Nature a prêté à l’âme pour travailler. Par conséquent, il peine, il mérite, il démérite. Il tend invinciblement vers la Lumière éternelle. Il n’atteint donc sa stase normale que lorsqu’il est enté sur Dieu, sur la forme de Dieu qui nous est seule accessible, sur le Sauveur, notre Jésus. Alors, étreignant son Idéal, son Époux, « il se réjouit » dans l’extase des fiançailles mystiques.

L’âme connaît les différents organismes qui la vêtent et leurs buts ; c’est pourquoi elle seule peut « magnifier » le Seigneur. Mais l’homme, l’esprit de l’homme ne connaît pas l’âme ; sa fin est justement de parvenir à cette connaissance vivante. Ce que l’Église appelle les mystères sont des phénomènes appartenant au monde de l’âme ; on peut les interpréter selon des points de vue physiques, philosophiques, scientifiques, sociologiques, moraux. Ainsi naissent les systèmes ; ce sont des images, mais on ne peut les comprendre dans leur essence, il nous faut avant cela recevoir le baptême de l’Esprit.

L’âme n’a pas besoin d’être sauvée, puisqu’elle ne tombe pas. Mais le reste de l’être humain est perpétuellement en butte aux forces cristallisantes de l’individualisme et du néant ; et ses chutes le rendent de plus en plus incapable de résistance. Telle est la raison d’être du Sauveur.

Ne quittons pas cette idée sans avoir vu comment cette première strophe du Magnificat exprime la théorie essentielle du Beau.

L’âme, c’est l’idéal, toujours inaccessible, si l’on borne le sens de ce mot « toujours » à la durée finie du Temps.

L’esprit, c’est l’homme qui gravit les sentiers raboteux de la montagne mystique, en haut de laquelle plane l’idéal.

L’idéal, c’est tout ce que nous savons qui est, mais que nous ne pouvons encore ni voir, ni comprendre, ni posséder ; c’est le Beau ; c’est la plénitude de nos aspirations ; c’est Dieu. L’esprit, c’est nous-mêmes ; c’est ce qui aspire, et ce qui expire ; c’est le désir, tous les désirs ; c’est la volonté ; c’est la faim et la soif de bonheur qui nous tue, tous tant que nous sommes. Veillons à bien choisir le mode de notre bonheur, le mode sous lequel nous sentons Dieu.

 

 

*

*     *

 

La Vierge s’humilie ; elle sait les lois des dynamismes spirituels ; elle sait que les créatures s’éloignent de Dieu en se haussant, parce que les hauteurs créées touchent au Néant, tandis que l’Incréé se rejoint par les profondeurs centrales du monde. Comment son esprit est-il parvenu à cette admirable attitude ? Voici :

Quand l’homme est envoyé dans l’univers, il croit pouvoir y marcher seul ; il n’a de confiance qu’en lui-même ; il ne veut pas être soutenu ; et, comme le petit enfant téméraire, il trébuche et se meurtrit. C’est l’orgueil. Toutefois, à force de tomber, il finit par s’apercevoir de son inexpérience et de sa faiblesse ; il apprend à demander de l’aide. Tous, si nombreuses qu’aient été nos incarnations, nous ne paraissons encore, dans le jour de la Vérité, que de tout petits enfants.

L’amour dont le Père nous enveloppe, Sa grâce nous donnent des forces, et nous guident par des chemins plus sûrs. Mieux nous nous connaissons, davantage nous sentons notre faiblesse. Qui prétend se diriger seul, erre, responsable de ses retards et du sort de ses suivants, visibles ou invisibles. Qui s’en remet au Ciel, une fois tous ses devoirs accomplis, se dégage des entraves du destin ; et l’aide divine lui demeure acquise, permanente et constante.

Les versets du Magnificat relatifs aux orgueilleux, aux puissants et aux riches peuvent recevoir une triple explication.

Socialement, si quelqu’un prend de la place, du pouvoir ou de la fortune plus que sa part, s’il emploie des moyens illégaux, il frustre des concitoyens, il appelle une réaction inévitable, il provoque le désordre.

Au point de vue cosmique, l’homme cherche de même à dominer, par des moyens défendus (appel, collaboration forcée, pactes avec des invisibles). Il fait ainsi sortir des êtres de leur voie normale ; le plan physique reçoit alors des forces qui, sans être toujours mauvaises, ne lui sont pas adaptées ; d’où désorganisations au-delà, en deçà et ici-bas 1.

En nous enfin, l’orgueil, la tyrannie, la soif des richesses sont des tendances qui doivent finalement produire par réaction l’humilité, la charité, le goût du divin. On se figure devoir sa réussite commerciale ou politique à son habileté, à son énergie, à sa souplesse. Ces moyens sont des effets et non des causes. Et, dans l’âme, dans l’univers et dans la société, l’apparition du Verbe remet chaque être à sa place, fait rendre le bien mal acquis, rétablit la justice.

C’est pourquoi le christianisme détermina le long de son développement des conversions individuelles, des convulsions sociales, des renversements cosmiques. Tous ces remaniements ont eu lieu dans tous les mondes imaginables. De la sorte se justifie avec exactitude le titre de Réparateur que l’on a donné au Christ et la protection active, spéciale et personnelle que le Père étend sur tout homme voué à Son service. Le Ciel ne reprend jamais ce qu’Il a donné ; Il donne à perpétuité et le serviteur jusqu’alors fidèle qui trahit son Maître pendant quelques jours, ou pendant quelques siècles, ne provoque ni la colère, ni la vengeance de Dieu ; son inconstance ne fait qu’élever un mur entre lui-même et la bonté du Père. C’est ainsi qu’il faut entendre l’Amour dont nous sommes gratifiés.

 

 

SÉDIR, L’enfance du Christ,

Bibliothèque des Amitiés Spirituelles.

 

 

 



1 Ce serait le moment de décrire le remous que la descente du Verbe provoqua dans les courants cosmiques en les refoulant jusqu’aux limites de la Création. On verrait qu’en effet les eaux éthérées, venant battre Sa voix rigide, changèrent la direction de leur flux, déplaçant les hiérarchies, roulant vers la gauche et vers le bas ce qui coulait vers la droite et vers le haut. Et, entre autres conséquences, on apercevrait ici la ruine des sciences occultes et divinatoires de l’antiquité. Mais nous sortirions de notre plan et des bornes de ces essais.

 

 

 

 

 

 

 

www.biblisem.net