Pâques tristes
Tu es triste, printemps,
Et tes buissons se plaignent.
Au ravin des étangs,
Des feuilles sèches geignent
Sous mes souliers ternis.
Et cependant les nids
Ont d’exquises querelles.
La ronde des crocus,
Comme des jouvencelles,
Vent dessous, vent dessus,
Danse sous les lilas.
Et les alléluias
Éclosent tout frileux
Aux semis du clocher.
Une enfant voit des œufs
Cachés près d’un rucher.
Sa joie de tourterelle,
Aux voix de la chapelle,
Fait un clair unisson.
Une alouette monte...
Près de moi, le pinson
S’étourdit et l’affronte.
J’ai mis sur le museau
D’un palpitant agneau
Ma lèvre cajoleuse.
Je suis triste, printemps,
Quand la terre est heureuse.
Ô mes Pâques rieuses,
Et mes Jésus d’antan !
Lucy ABRASSART, Le cri neuf et le don,
Éditions du C.E.L.F., 1961.