Prends le poème
Écoute, les doigts de la brise
Délacent les boutons de roses.
Tout bourdonnant de gourmandise,
Un frelon réveille l’aurore
Et violente les calices.
À bruits ténus, le jour se glisse
Par une fente de matin.
Écoute, un papillon se pose
Pour d’infidèles baisemains
Sur les feuilles du sycomore.
Écoute chanter la lumière
Aux castagnettes des bouleaux.
Entends la rosée en grelots
S’évaporer dans la prière.
Regarde s’étirer le ciel,
Aspire l’émoi des prairies,
Caresse la joie d’arc-en-ciel
Qui rutile sur l’eau fleurie.
Goûte à la source un vin d’azur
Et bois à la santé des anges.
Prends le poème à l’état pur,
Plus exaltant que les vendanges.
Lucy ABRASSART, Le cri neuf et le don,
Éditions du C.E.L.F., 1961.