Une présence d’herbe
Une présence d’herbe a lutiné mon front
Et mes yeux sont offerts à l’invite câline.
Pour tant de baisers d’or ouverts sur le gazon
À l’ombre blanche des ombelles qui s’inclinent,
Merci mon Dieu.
Pour cet adieu
Humblement exhalé sous une dent brouteuse,
Du trèfle à peine bleu, déjà sacrifié,
Pour l’aérien froufrou des palombes neigeuses
Dans cette faille où tout ton ciel s’est déployé,
Seigneur, que je te remercie.
Maître, voici donc cette vie
Où les oiseaux viennent picorer sur mes pas
Où mon regain d’amour s’engerbe avec les roses
Quand la bruyère a chaud dans le bois qui repose,
Lorsque hier et demain s’étreignent dans mes bras.
Qu’ainsi je te rende grâce
D’avoir fécondé la trace
Où l’on peut, droit et fort, voir monter son froment.
Tant l’ivraie est en fleur, elle n’est plus nuisance.
Être bon, quelquefois, et béni d’innocence,
Est-ce l’éternité ou n’est-ce qu’un moment ?
Lucy ABRASSART, Le cri neuf et le don,
Éditions du C.E.L.F., 1961.