Rose
Rose, Rose, ne te plains pas !
De la part qu’un Dieu bon t’accorde sur la terre
Sache faire un plus juste cas !
Rose, il n’est point de bonheur solitaire :
Il est doux d’être aimée, aimer est salutaire ;
D’être aimée et d’aimer, Rose, ne te plains pas !
Ne dis pas : l’amour est funeste.
Jeu cruel, on y met son âme pour enjeu,
On la perd... Non, non, je l’atteste,
On l’agrandit, épurée à ce feu !
Toi, maudire l’amour ? Non, c’est blasphémer Dieu !
Rose, ne me dis pas que l’amour est funeste.
Qu’est-ce que vivre sans aimer ?
Est-il d’autre bonheur ? Que vaut la vie humaine,
Si l’amour ne vient l’animer ?
Qui n’aime pas vit, sans joie et sans peine,
Une stérile vie et languissante et vaine,
Rose, et c’est être mort que vivre sans aimer !
J.-E. ALAUX.
Paru dans L’Année des poètes en 1893.