Pubenza
Douce comme la jeune biche au gîte
Dans la fougère où elle est née, le col
Tendu, guettant le limier de ses yeux
Pleins de timidité et pleins de crainte ;
Pure comme la colombe candide
Qui, sur le bord de l’onde murmurante
Où elle boit, entend le roucoulis,
Premier message d’amour ignoré ;
Belle comme la rose en ses prémices
Éployant au printemps, toute modeste,
Une beauté qui n’a point de rivale ;
Tendre comme l’aimante tourterelle
Qui se lamente en son nid solitaire
Et, de son bien perdu, pleure l’absence,
Et son amour du compagnon fidèle ;
Claire comme un rayon qui se reflète
Dans le cristal d’une eau de la montagne
À l’heure où ni la pluie ni le nuage
N’en peut ternir le pur éclat naissant,
Majestueuse comme le palmier
Qui dresse dans la plaine sa fierté
Sous la haute couronne de ses palmes,
Défi vivant à la foudre du ciel.
Mais sur la pâleur de son front passaient
La douleur et le noir accablement
Et la tendre lumière de ses yeux
S’embrumait d’une larme fugitive.
Elle filait sa vie silencieuse,
Dévorant son malheur et son tourment.
À l’âme délicate, Dieu n’accorde
Jamais hélas ! un moment de repos.
Telle est Pubence, en elle ne respire
Que pureté et qu’amour et que grâce.
Un charme est en ses yeux et la douceur
S’épanouit sur l’œillet de ses lèvres.
La volupté et la réserve ensemble.
Ornent cette enfant gracile, indienne
Par don d’aimer et par vertu, chrétienne.
Son cœur n’était qu’un vase d’innocence.
Julio ARBOLEDA, Gonzalo de Oyón.
Traduit par Mathilde Pomès.
Recueilli dans Anthologie de la poésie ibéro-américaine,
Choix, introduction et notes de Federico de Onis,
Collection UNESCO d’œuvres représentatives, 1956.