Emblème

 

 

Vous vous plaignez, mortels, de ce que votre vie

Ne porte rien de bon que vous puissiez cueillir,

Que jamais de son fruit nulle fleur n’est suivie,

Et qu’on a plus de mal à vivre qu’à mourir.

 

Aussi juste est l’enfant qui plante, en sa folie,

Un arbre que la sève a cessé de nourrir,

Et s’étonne plus tard que la tige flétrie

De feuilles et de fleurs n’ait pas su se couvrir.

 

Ne voyez-vous pas là, dites-moi, votre emblème,

Vous qui, pouvant choisir dans l’éternel jardin

Les germes de ces fruits d’une saveur suprême,

 

L’humilité du cœur et l’amour du prochain,

Avez, dès le printemps, planté dans votre sein

Deux arbres morts, l’orgueil et l’amour de soi-même ?

 

                                                                              1838.

 

 

Edmond ARNOULD, Sonnets et poèmes, 1861.

 

 

 

 

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