Marie-Madeleine
À Charles Fuster.
Depuis qu’en Béthanie, avec son âme pleine
D’amours ensevelis et de rêves défunts,
Aux pieds du doux Jésus, la triste Madeleine
De l’albâtre brisé répandit les parfums ;
Depuis que les cheveux qui formaient à ses charmes
Une tiède prison, les nuits de volupté,
Humblement dénoués, essuyèrent ses larmes,
Tribut silencieux à la pure beauté ;
Depuis qu’ayant compris ce cœur, le divin Maître
D’un regard en sonda l’asile profané,
Et qu’il lui dit : « Marie, il suffit pour renaître
D’avoir beaucoup aimé... Va ! je t’ai pardonné » ;
Depuis ce jour béni, la pitié souveraine
Au morne désespoir a promis du secours,
Et, quel que soit l’abîme où l’erreur nous entraîne,
Grave et doux, le pardon y regarde toujours ;
Depuis ce jour béni, toutes les pauvres femmes,
Celles dont trop d’amour a fait le cœur martyr,
Ne désespèrent plus de racheter leurs âmes
En versant à genoux les pleurs du repentir.
Albert AUGEREAU.
Paru dans L’Année des poètes en 1891.