Retour
Je ne connais pas une route
Assez longue pour me lasser,
Ni qui me mène loin assez
De la maison que je redoute ;
Là pourtant Dieu me reconduit ;
En vain je cours jusqu’à la nuit
Et la terre qui s’offre toute
Se déroule à mes yeux sans fin :
Il attend l’heure où le chemin
Gagne l’ombre au fond de la route,
Lorsque mon cœur sera trop lourd
De son amour qu’il garde encore
Et, comme il fuit depuis l’aurore,
Si las de battre après le jour !
Or je ne reviendrai pas triste
Et solitaire sur ma piste
Ni n’ouvrirai les yeux sans voir
Que la lune, guidant ma course,
Sur le chemin comme une source
Divine, ruisselle, ce soir.
Pierre BAILLARGEON.
Paru dans Amérique française en 1941.