La gaieté des berceaux

 

 

La plaintive rafale aux ronces du buisson

Se déchire en lambeaux ; dans l’humide vallon

On entend soupirer comme un convoi de râles

L’autan qui passe au loin sous les horizons pâles.

L’éclair comme un lasso d’or aux flancs des troupeaux

Court dans la nue ardente, en lumineux cerceaux.

L’arbre sec tend sa gaule au vent qui le soufflette,

Tout plie et gémit sous l’averse et la tempête.

Le rêve sous la pluie, or quel intime accord !

La pluie est la sœur de la terre et de la mort.

Le flot près de nous tord ses longs replis de brume,

Et montre, aspic maté, ses frêles dents d’écume.

 

                                   *

                                *    *

 

Ma douce amie allons au feu de l’âtre cher

Où dort le frêle enfant issu de notre chair ;

 

                                   *

                                *    *

 

Vois là-bas, les oiseaux sous les feuilles des hêtres

Regardent rêveurs comme à travers des fenêtres ;

Pour hâter le temps, tout transis ils ont recours

À des concerts de chants, de cris et de discours ;

La grive, l’alouette et l’exquise fauvette

Font courir l’heure lente en faisant la causette,

Se redisant tout bas les plus tendres aveux

De leurs compagnons de route à travers les cieux ;

Les moineaux pépiant leur éternel cantique

Disent l’office au creux d’un chêne monastique ;

Et le pinson endort en trillant à mi-voix,

Le petit nid frileux des chanteurs de nos bois.

 

                                   *

                                *    *

 

Allons près du berceau voir la clarté divine,

Aurore que l’enfant au doigt rose illumine.

 

 

                                              Juillet 1918.

 

 

 

W.-A. BAKER, Les disques d’airain, 1918.

 

 

 

 

 

 

 

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