L’église de campagne
Le jour fuit.... approchons de ce temple rustique
Dont la mousse et les ans ont noirci le portique.
Le soleil qui s’éteint sur les sombres vitraux,
Verse la pourpre et l’or de ses feux inégaux.
Quel silence ! observons cette enceinte profonde,
Seul avec ma pensée et le maître du monde :
C’est là que des étés redoutant la fureur,
À genoux et priant, le pauvre laboureur
Au sort de ses moissons intéresse Dieu même,
Et ses vœux, écoutés par le Juge suprême,
Montent comme l’encens au palais éternel.
Quand du septième jour le repos solennel,
Proclamé par l’airain, règne dans leurs campagnes,
Suivis de leurs enfants, suivis de leurs compagnes,
Tous ces bons villageois, la paix au fond du cœur,
Viennent prêter l’oreille au discours du pasteur
Qui, des simples vertus leur retraçant l’image,
A d’un ange du ciel la voix et le langage ;
Sa parole nourrit la veuve et l’orphelin.
Mais bientôt, revêtu de son habit de lin,
Il unit, par les nœuds d’une propice chaîne,
Le couple qu’à ses pieds un chaste amour amène.
Des festons enlacés par un zèle pieux
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Serpentent sur les murs du champêtre édifice.
Belle de ses quinze ans, fraîche sans artifice,
Et baissant vers la terre un front plein de candeur,
La jeune amante espère et rougit de pudeur.
Un bandeau fastueux n’entoure point sa tête ;
Elle n’apporte pas, à cette simple fête,
Un trésor bien souvent par le crime obtenu :
Sans richesse elle a tout ; sa dot est la vertu.
Pierre-Marie-François BAOUR-LORMIAN.
Recueilli dans Choix de poésies morales et religieuses, 1837.