Mon rêve !
À M. Auger.
La Fortune m’a dit : « Te faut-il l’opulence,
« Des fêtes, des plaisirs à pleins palais dorés ?
« Ou bien préfères-tu les parchemins titrés
« Des chevaliers de l’art, du trône ou de la lance ?
« Ton nom, autour duquel la gloire fait silence,
« Veux-tu le voir plus grand que les plus admirés ?
« Quels sommets rêves-tu, puissants ou vénérés ?
« Choisis, parle : à mon doigt ton destin se balance !... »
– « Arrière ! » répondis-je au démon tentateur,
« Ton idéal pour moi n’a rien de séducteur ;
« Le mien plus haut s’élève, obscur et magnanime.
« Je ne puis désirer que vivre pauvre et nu ;
« Pour le bonheur commun, en quelque élan sublime,
« Consumer tout mon cœur ; puis, mourir inconnu !... »
Esprit BARBOT.
Paru dans L’Année des poètes en 1895.