Feux de nuit
Nuit, ô nuit rayonnante où mon premier amour
Naquit au clair de lune en pleine joie ancrée
Et dont la voix de l’Ange apparu sans retour
Semblait dompter la Mort et rouvrir l’Empyrée
Ah ces deux ailes d’or ce sourire ingénu
Ce transparent visage et sa lèvre empourprée
Cet orbe flamboyant comme un soleil à nu
Dans ma cellule austère et tout énamourée
De quel affreux présage est ce miroir si beau ?
De l’amour je commence à voir le doux visage
Je sais quel astre dort dans la nuit du tombeau
Quelle souffrance hélas lavera mon outrage
Ah ce premier bouquet offert à mon plaisir
Dont le parfum naïf teinte ma rêverie
Sa flamme est trop ardente et trop vif son désir
Pour l’abîme où se tord ma tristesse fleurie
Voici l’Homme chargé de la plus lourde croix
Le voici tout brisé par mes ignominies
Mais du pardon les fleurs énamourant ma voix
Sont un élixir à mes sombres agonies
Le Seigneur a percé les murs de ma prison
Je ne veux plus quitter mon bouquet de roses
Sans en avoir connu la musique et le son
Sans en avoir humé les effets et les causes...
Sœur MARIE DU RÉDEMPTEUR.
Recueilli dans Feuilles d’érable, fleurs de lys,
anthologie de la poésie canadienne-française
établie et présentée par Pierre Cabiac,
Éditions de la diaspora française, 1966.