Nocturne
Mon cœur est une église vieille
Et droite et fière et seule, seule infiniment
Qui s’érige en le soir et lourdement sommeille
En sa vide torpeur et son vague tourment.
Regorgeant de splendeurs amoncelées et d’ors
Patinés d’ombre et de poussière,
Elle repose ; un peu d’encens spirale encor
Et son odeur morte d’oubli s’accroche aux pierres.
Et ses pesants vantaux sont clos, noirs et rigides
Et tous ses orgues se sont tus, et leur effroi
Et leur stupeur flottent, se cognent dans ce vide
Où plane et pèse et dort un chagrin morne et froid.
Et plongent dans la nuit, volontaires ses tours ;
Pointent ses tours fixes ardentes
Comme des bras tendus, des bras tendus et gourds.
De prière têtue et d’immobile attente.
Fred BELHOMMET.
Quinze ans de poésie française à travers le monde,
Anthologie internationale,
textes rassemblés par J. L. L. d’Arthey,
France Universelle, 1927.