Les promesses de Jésus-Christ
à l’âme fidèle
Belle dont la beauté seule fait que je meure,
Si tu ne sais au vray le lieu de ma demeure,
Dessous quels antres frais, en quels bois, sur quels monts,
À la chaleur du jour repairent mes moutons,
Marche et de ce troupeau suis la voye tracée ;
Il guidera tes pas où tire ta pensée.
Il connaît le chemin : puis, range tes chevreaux
Près l’ombrageux séjour des autres pastoureaux.
Que puis-je comparer à tes grâces, m’amie,
Que le front asseuré de ma chevalerie
Ondoyant, flamboyant, marchant en escadron
Entre les chars dorés de ce grand Pharaon ?
Le teint frais et douillet de ta face vermeille
Rougit, étincelant, sous deux pendants d’oreilles,
Tout ainsi que l’aurore : et l’ivoire poli
De ton col blanchissant se présente anobli
De perles, de rubis et de pierres exquises,
Dans le fond d’un carquan1 naïvement assises.
Je te donrai encore un autre riche attour
Qui sera pour jamais tesmoin de notre amour,
Deux bracelets d’or fin taillés en damasquine,
Une chaîne, un carquan, et de soye plus fine
Un tissu marqueté de beaux gros boutons d’or
Mis en œuvre d’épargne, et des bagues encor.
Remy BELLEAU.
Recueilli dans Anthologie de la poésie catholique
de Villon jusqu’à nos jours, publiée et annotée
par Robert Vallery-Radot, Georges Grès & Cie, 1916.