Jubilus de nomine Jesu
De Jésus, le seul souvenir
Si doux, met au cœur la vraie joie :
Mais plus douce encore que miel,
Plus que tout, douce est sa présence.
Rien à chanter de plus suave.
Rien qui sonne de plus joyeux,
Rien à méditer de plus tendre
Que lui, Jésus le Fils de Dieu.
Jésus, espoir des repentants,
Pitoyable à toute demande,
Toi si bon pour ceux qui te cherchent
Que sera-ce à qui te découvre !
Ô Jésus, douceur de nos cœurs,
Eau vive, lumière des âmes,
Toi qui surpasses toutes joies,
Toi l’Au delà de tout désir.
La parole ne peut le dire,
Ni l’écriture le traduire;
Seul le croit qui put l’éprouver,
Ce que c’est, Jésus, de t’aimer.
Partout, je chercherai Jésus,
Dans la foule, ou seul au repos ;
Dans le secret d’un cœur, bien clos,
Mon amour le cherche assidu.
Avec Marie, avant l’aurore,
J’irai le chercher au sépulcre,
Criant la plainte de mon cœur.
Cherchant d’esprit et non des yeux,
Mes pleurs arroseront sa tombe,
Mes sanglots rempliront l’espace.
À ses pieds je me jetterai
Les tenant bien fort embrassés.
Jésus, roi sublime, admirable,
Triomphateur plein de noblesse,
J’aspire, douceur ineffable,
À te posséder tout entier.
Ah ! demeure avec nous, Seigneur,
Nous illuminant à ta flamme.
Chasse la brume de nos âmes,
Remplis le monde de douceur.
Quand tu visites notre cœur,
Alors la vérité l’éclaire.
Vide et pauvre apparaît le monde,
Tandis qu’en nous flambe l’amour.
Si doux est l’amour de Jésus,
Et si parfaitement suave !
Et mille fois plus ravissant
Qu’il est possible de le dire !
Preuve en est faite en sa Passion,
Preuve en l’effusion de son sang,
Qui nous obtient la Rédemption,
Dieu lui-même à contempler.
Vous tous, reconnaissez Jésus :
Venez demander son amour ;
Par votre quête passionnée,
Vous vous enflammerez pour lui.
À celui qui nous aime ainsi,
Rendez donc amour pour amour ;
Courez, séduits par son parfum,
Que vos vœux répondent aux siens.
Jésus, auteur de la bonté,
Gage pour nous de toute joie,
Source de douceur et de grâce,
Vrai délice de notre cœur,
Mon bon Jésus, fais que je sente
Ton amour en sa plénitude.
Accorde-moi par ta présence
De pouvoir contempler ta gloire.
De toi, je ne puis bien parler,
Et pourtant pourrais-je me taire ?
Ton amour me permet d’oser
Puisque toi seul me rends joyeux.
C’est ton amour à toi, Jésus,
Qui suavement nourrit l’âme ;
N’apportant jamais de dégoût,
Il nous affame de désir.
Ceux qui te goûtent ont faim de toi,
Ceux qui te boivent ont encore soif ;
Ils ne savent plus désirer
Que toi, Jésus, leur bien-aimé.
Ton amour enivrant fait voir
Combien Jésus est savoureux.
Heureux celui qu’il rassasie !
Son désir ne cherche rien d’autre.
Ô Jésus, beauté angélique,
À nos oreilles doux cantique,
Dans notre bouche, miel exquis,
Pour nos cœurs, céleste breuvage.
Vois l’infini de mon désir !
Mon Jésus, quand vas-tu venir ?
Pour quand la joie, pour quand la grâce
De me rassasier de ta face ?
Car ton amour est sans relâche.
D’amour je défaille sans cesse ;
C’est un fruit à saveur de miel
Qui reste toujours vivifiant ;
Jésus, souveraine douceur,
Joie merveilleuse de mon cœur,
Incompréhensible bonté,
Étreins-moi de ta charité !
Mon bonheur, c’est aimer Jésus
Et ne rien chercher au delà,
Mourir entièrement à moi,
Afin de vivre pour lui seul.
C’est vers toi, mon très doux Jésus,
Qu’espère en soupirant mon âme ;
Mes larmes d’amour te réclament
Et le cri du fond de mon cœur.
Ou que je puisse me trouver,
Je veux mon Jésus avec moi
Quelle joie à le découvrir,
Quel délice à le posséder !
Ce sont alors embrassements !
Ce sont baisers plus doux que miel !
Et fusion bienheureuse au Christ !
Mais que la durée en est brève !
Ce que j’ai cherché, je le vois,
Je tiens ce que j’ai convoité ;
Son amour me fait défaillir,
Mon cœur en est tout incendié.
Et lorsqu’on aime ainsi Jésus,
Cet amour-là ne s’éteint plus ;
Il ne tiédit pas, ne meurt pas,
Sans cesse il grandit et s’embrase.
Cet amour, ce feu continu,
Est d’une douceur admirable ;
La saveur en est délicieuse,
Que ce délice rend heureux !
Cet amour envoyé du ciel
Adhère à la moelle des os,
Ravage l’âme de son feu,
Et comble l’esprit de délices.
Ô quel incendie de bonheur !
Ardeur brûlante du désir !
Ô le doux rafraîchissement
Que notre amour du Fils de Dieu !
Jésus, fleur d’une mère vierge,
Ô toi qu’il nous est doux d’aimer,
Que gloire soit à ta puissance !
Étends ton règne de bonheur.
Viens, viens donc; Roi très bon, ô Père
Dont la gloire n’a pas de mesure.
Avive en brillant, ta lumière :
Je T’ai déjà trop attendu !
Jésus, plus clair que le soleil,
Et plus suave que le baume,
Doux par-delà toute douceur,
Tu dépasses toute tendresse.
Toi dont le goût est si prenant
Dont l’odeur est si tonifiante,
En toi tout mon esprit défaille,
Toi seul suffis au cœur aimant.
Toi, l’enchantement de l’esprit,
En toi seul s’achève l’amour,
Mon titre de gloire est en toi,
Comme en toi le salut du monde.
Retourne donc mon bien-aimé
Posséder la droite du Père ;
Heureux vainqueur de l’ennemi,
Jouis, au ciel, de ton royaume.
Où que tu ailles, je suivrai,
Tu ne peux plus m’être arraché ;
N’as-tu pas emporté mon cœur,
Jésus, gloire de notre race ?
Habitants des cieux, accourez,
Pour faire surhausser vos portes ;
Clamez à celui qui triomphe :
« Salut, Jésus, ô roi illustre. »
Roi très puissant, roi glorieux,
Roi victorieux et magnifique,
Jésus qui prodigues la grâce !
Honneur de l’assemblée céleste.
Fontaine de miséricorde,
Lumière de la vraie patrie,
Chasse les ombres de tristesse,
Nous donnant l’éclat de ta gloire.
Célébré par le chœur céleste
Répétant sans fin ses louanges,
Jésus réjouit l’univers
Et nous met en paix avec Dieu.
Jésus commande dans la paix
Qui dépasse tout sentiment,
Vers elle mon esprit soupire,
Hâté d’en jouir à son tour.
Jésus a donc rejoint son Père,
Gravi le royaume des cieux ;
Loin de moi mon cœur est passé,
Après Jésus s’en est allé.
Accompagnons-Le de louanges,
De vœux, d’hymnes et de prières,
Pour qu’il nous donne de jouir,
Avec lui du séjour céleste. Amen.
Hymne attribuée à Saint Bernard et dont
la première recension fut composée,
sans doute, par un de ses disciples
de la fin du XIIe siècle.
On y retrouve les images que
les mystiques ont aimé puiser
dans ce Cantique des Cantiques
commenté par l’Abbé de Clairvaux. –
cf. MIGNE: P. L. T. 184, col. 1317 à 1320.
Repris dans Devant Dieu,
anthologie de la prière chrétienne,
par Pierre Richard et Bernard Giraud,
Éditions Xavier Mappus, 1948.