Divine majesté, source d’amour
Les cieux s’ouvrent, et, sur la plus haute cime, le Dieu qui anime le monde d’un seul souffle, parce qu’il l’a créé d’un seul mot, sur le trône éternel, porté par la justice, que garde la milice des anges, apparaît en sa majesté.
Les grandes étoiles qui roulent dans l’espace, la douce lumière qu’elles promènent dans leurs circonvolutions, que sont-elles pour Dieu, aperçues de ce point de vue ? Que sont-elles ? Vaine balayure de son palais, étincelle tombée du ciel et qui brille, poussière d’or semée par sa main.
Là est le Siège où la divine essence, tous voiles baissés, aux yeux de l’innocence, ouvrant son sein, montre une mer, toute une mer d’adorable beauté, mer sans fond de douceur indicible, où nagera qui sait l’aimer...
En mille degrés d’excellence les chœurs sacrés s’ordonnent et se tiennent enchaînés. Les plus purs sont voisins de Dieu ; de bas en haut va croissant la beauté, comme la pureté de la neige vers les sommets. Au degré suprême, les séraphins.
Oh ! comme l’œil du Créateur se réjouit à les voir tous aussi beaux monter et descendre leur harmonieuse échelle ! Le vêtement du lys est moins blanc, l’iris n’a pas de telles couleurs pour ceinture, ni le soleil tant d’or dans ses cheveux !
Ils glissent sur le rayon de lumière dans notre sphère. Le vent n’a pas comme eux l’aile légère, ni la pensée le vol aussi rapide. En un clin d’œil, ils vont, quand Dieu les envoie, s’ouvrant une voie d’une haute planète à l’autre, mesurant l’espace d’un regard ferme.
Tout ce que les plus élevés aperçoivent en Dieu, ils se retournent pour le montrer à ceux qui sont plus bas, vivants miroirs, fidèles réflecteurs ; effluves et flots du cœur divin, suivant les degrés un par un jusqu’aux parties les plus profondes, ils sèment la joie et les amours...
Dans un transport d’extatique allégresse, dans chaque chœur, dans toute hiérarchie, monte en chantant la voix amoureuse de mille et mille adorateurs, et, dans l’éclat rythmique de sa gorge, vibrent leur joie et leurs ardeurs.
Sous leurs doigts, de lyres d’or éclatantes coulent mélodieux des flots d’amour qui se marient à leur chant. Et l’hymne éternel, harmonieuse symphonie : « Saint, saint, saint, saint ! » vole et résonne à travers les cieux. L’infini répond : « Saint, saint, saint ! »
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« Dieu tout-puissant, source éternelle de vie, qui, suivant l’intime et libre impulsion d’un amour qui n’a ni fin ni mesure, avez peuplé le monde de merveilles, le ciel d’anges, l’espace azuré d’étoiles, les semant comme une poussière d’or ;
Providence paternelle pour ce que vous avez créé, c’est votre amour qui le gouverne avec sollicitude, tenant ses ressorts dans les doigts ; et votre cœur, qui ne s’endort jamais ni jamais ne s’oublie, garde votre main toujours ouverte et jamais vide pour tous les êtres grands et petits.
Qui vous donnera, comme il convient, honneur et gloire, Seigneur ? Oh ! le soleil, sur son char de victoire, publie votre nom en tout lieu ; le jour ne se lasse jamais de le célébrer, et la nuit porte sur le front votre louange sculptée en lettres de feu !
Et nous, à qui vous avez accordé la faveur de contempler votre visage en une lumière si vive et si claire, buvant à sa source votre amour, qui donc allumera, Seigneur, pour vous adorer et vous rendre hommage comme vous le méritez, un zèle assez ardent et assez pur dans notre cœur ?... »
Jacques BOHER.
Traduit du catalan par Jean Amade.
Recueilli dans Anthologie catalane (1re série : Les poètes roussillonnais),
avec Introduction, Bibliographie, Traduction française et Notes
par Jean Amade, agrégé de l’Université, professeur au Lycée
de Montpellier, 1908.