L’arbre de Noël
Te souviens-tu, mon tout petit,
De cette minuit, blanche fête,
Où dans ta couchette blotti
« Noël » fit choir une brouette
Si pleine, sous son vernis blanc,
De fruits, de jouets, de dragées ?
Au réveil tu disais : « Maman,
La brouette était trop chargée... »
Le ciel avait comblé tes vœux,
Moi, j’en restais moins taciturne ;
Tu remerciais l’Enfant-Dieu
Haut, pendant la messe nocturne !
Au retour, c’était ravissant,
Tous deux, dans la carriole allège,
La lune à l’orbe opalescent,
Semblait une balle de neige
Effleurant notre Mont-Royal
En glissant à travers ses arbres.
Ton air épris, sentimental,
Ne venait pas d’un cœur de marbre.
Le vieux Noël, c’était prévu,
T’intriguait avec sa... tournée...
Tu me disais : « Quand l’a-t-on vu ?...
« Et, dans quel trou de cheminée ?...
« C’est l’Ordonnance du Très-Haut,
« Qui nous camionne en sourdine,
« Cet arbre de Noël, si beau ! »
Murmurait ta lèvre câline.
Chaque Noël il revenait,
Avec cette hotte si chère ;
Un soir, tu dis : « Il nous connaît !
« Son cœur, est-ce le tien, ma mère ? »
Mystérieux, cet inconnu,
Oublieux du bonheur qu’il sème ;
En lui, mon fils a reconnu,
Cette mère heureuse qui l’aime.
Marie DUMAIS-BOISSONNAULT, L’huis du passé, 1924.